Le groupe d'une dizaine de touristes français défile dans le monde souterrain d'Enver Hoxha, qui s'était fâché avec la terre entière (Occident, ex-URSS, ex-Yougoslavie, Chine) et se préparait à être assailli de toutes parts.
Le complexe devait abriter les cadres du régime et le commandement militaire en cas de conflit et c'est de là qu'ils auraient dirigé les opérations militaires. Plusieurs fois par an, des habitants étaient appelés à y effectuer des manœuvres.
"Le peuple tout entier était un peuple de soldats dont le devoir était de protéger la patrie", rappelle Engjell Serjani, 60 ans.
Lui-même était journaliste à la radio locale de Gjirokastra et à ce titre, a participé dans les années 1980 à "la couverture" d'une guerre inventée de toutes pièces. "Nous devions en fait imaginer des informations sur les attaques, les morts, les dégâts subis au 'front' et préparer des émissions spéciales", dit-il.
Aujourd'hui, les murs suintent et les tunnels sont délabrés mais initialement, le complexe était sophistiqué : des galeries interminables censées résister à des bombes atomiques de 20 kilotonnes desservaient des salles dédiées au commandement de l'armée, à la police secrète, au parquet, à l'instruction, au tribunal, au contre-espionnage, décrit Astrit Imeri, 67 ans, ancien militaire.
On y trouvait aussi des pièces réservées aux transmissions ou aux écoutes, des dortoirs, une boulangerie, des citernes d'eau et même des Kalashnikov et des pistolets TT contre une intrusion potentielle de l'ennemi. "Le tunnel disposait e toutes les ressources pour y rester non seulement quelques heures mais des jours et des semaines entières", ajoute-t-il.