"Les préjugés de la société concernant le viol en Guinée, qui dissuadent souvent de signaler ce crime et de porter plainte, laissent les victimes de ces atrocités sans soins médicaux, soutien psychosocial, ni aide juridique afin d’obtenir justice et réparation", a déclaré Marie-Evelyne Petrus-Barry, directrice régionale de l’IPPFAR.
"Les violences basées sur le genre sous toutes leurs formes sont reconnues comme des violations des droits humains par le droit et le système international des droits humains. Les inégalités de genre, les déséquilibres en matière de pouvoir et le mépris pour les droits humains sont souvent à la racine de ces actes odieux et empêchent les victimes de faire valoir leurs droits sexuels et reproductifs, et d’en bénéficier pleinement. En tant que défenseur·es des droits humains, nous devons tous et toutes prendre position et faire cesser ces actes inexcusables", ajoute-t-elle.
Elle a envie de recommencer l’école mais ce n’est pas possible.
Le pays a récemment renforcé son arsenal juridique. Depuis 2016, le code pénal punit le viol de cinq à dix ans d’emprisonnement et jusqu’à la perpétuité lorsqu’il a entraîné la mort de la victime. Malgré cette avancée et la création d’unités de police et de gendarmerie spécialisées afin de répondre aux cas de violences sexuelles, accéder à la justice en Guinée "reste une quête ardue semée d’embûches pour les victimes de violences sexuelles, tandis que les auteurs bénéficient souvent de l’impunité. Les autorités coutumières arrivent à faire pression en faveur d’arrangements extrajudiciaires menant à l’abandon des poursuites, ce qui est contraire à la loi et aux droits des victimes", écrit Amnesty International qui recommande des campagnes de préventions contre les violences sexuelles et l’adoption d’une loi générale sur les violences basées sur le genre dans le but de renforcer les capacités de la justice.
"Les autorités guinéennes se sont engagées à combattre les violences basées sur le genre et le viol. Nous les appelons à prendre des mesures concrètes afin de renforcer les efforts entrepris par l’État pour prévenir les violences sexuelles et garantir aux victimes l’accès aux soins et à la justice", ajoute Samira Daoud, faisant également référence aux instruments internationaux ratifiés par la Guinée à ce sujet dont la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des Femmes (CEDAW) en 1982, et le Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des Peuples sur les droits des femmes en Afrique (Protocole de Maputo) en 2012.
En 2017, la Guinée s’est dotée d’une nouvelle Politique Nationale sur le Genre. En 2019, elle a adopté une stratégie nationale pour la promotion de l’abandon des mutilations génitales féminines et une loi sur la parité. La même année, le nouveau code civil a enregistré certaines avancées en matière de droits des femmes comme la reconnaissance de l’autorité parentale aux deux parents et la possibilité pour les femmes de choisir leur profession sans avoir l’autorisation de leur mari.
En 2020, une nouvelle Constitution a consacré la parité comme un objectif politique et social. "Néanmoins, malgré les efforts déployés sur le renforcement du cadre juridique, la mise en œuvre effective de ces mesures et réformes reste faible en raison de l’absence de mécanismes institutionnels, d’outils opérationnels fonctionnels et du défaut de sensibilisation et d’implication de la population. Ceci s’explique en partie par les défis liés à la coexistence du système juridique avec des coutumes et pratiques traditionnelles et religieuses discriminatoires", précise Amnesty International.