"Encanto" n’est ni un livre, ni un conte de fées. Quel est le point de départ de ce projet d’animation ? Quelle est son idée principale ?
Byron Howard : Depuis 5 ans nous parlons de faire un film sur les familles étendues, il y a beaucoup de films sur les familles chez Disney mais aucun n’a pris la peine de parler des très grandes familles, multigénérationnelles, qui vivent ensemble. La complexité, le bonheur et la chance que ça représente, nous ont paru une bonne idée pour mettre tout ça dans un film musical. Notre partenaire Lin-Manuel Miranda qui n’est pas là avec nous, a trouvé très intéressant de mettre toutes ces relations en musique dans le film. Et Lin trouvait aussi très excitant de placer cette histoire en Amérique Latine, ce qui nous a donné l’opportunité d’explorer la Colombie qui est ce carrefour incroyable de culture, de musique, de traditions, et une formidable diversité ethnique qui nous permet de montrer une aussi grande famille diversifiée.
Comment éviter les clichés lorsqu’on illustre et représente une location aussi "exotique" telle que la Colombie ?
Jared Bush : Selon moi, cette réalisation a été un long processus d’apprentissage qui s’est étalé sur cinq années. Même avant d’avoir l’idée de faire ce film, alors que nous étions en train de réaliser "Zootopia", nous avions un ami réalisateur qui était en train de travailler sur un documentaire sur la Colombie. Et quand nous avons commencé à parler d’un nouveau film, on nous a dit : pourquoi vous ne vous intéressez pas à la Colombie ? C’est quasiment 5 pays en un seul, c’est un pays énorme, avec la plus grande biodiversité de la planète, c’est le pays où est né le réalisme magique, une tradition littéraire qui nous a inspirés pour écrire ce film. Donc, on a continué à parler avec plein de gens, on est allés en Colombie, pour rencontrer des familles, des botanistes, des architectes, et ils ont commencé à faire partie de cette équipe colombienne qui a travaillé avec nous pendant ces 5 ans. Donc, le truc, c’est de rencontrer des gens très intelligents, et très honnêtes, avec lesquels nous pouvions apprendre tous les jours.
Dans "Encanto", on peut vraiment percevoir le mélange entre deux aspects bien différents. D’un côté, on retrouve un drame familial psychologique. D’un autre côté, il y a cet aspect musical. Comment réussir ce mélange ?
Charise Castro Smith : C’était un processus de création très complexe, on a eu avec Jared 1700 brouillons du scénario… La réalisation d’un film d’animation chez Disney est très particulière, nous écrivons le film, nous réalisons et dessinons un scénario que nous filmons jusqu’à 7 ou 8 fois, et il devient progressivement de plus en plus développé… Il nous a fallu toutes ces années, pour comprendre profondément chacun des personnages, comme des êtres humains avec des personnalités particulières et il a fallu tout ce temps pour nous sentir en communion affective avec ces 12 personnages… Donc ça a pris beaucoup de temps, avec beaucoup de passion et d’amour…
Dans la tradition Disney, il y a toujours un grand "méchant". Ici, il n’y a pas de fantômes ou de sorcière mais il y a une "menace" mais c’est une menace invisible. Comment avez-vous travaillé sur cette idée de menace lors de l’écriture ?
Jared Bush : C’est quelque chose qui nous a intéressés dès le début. Nous avons hésité dès le départ sur la présence ou non d’un "méchant" dans l’histoire, ou une force extérieure qui aurait exercé une pression sur cette famille. Mais honnêtement, en parlant avec notre propre famille et les gens du studio, et au fur et à mesure de la progression de l’histoire, tout ce dont nous avions besoin se trouvait au sein de la famille, et les forces d’antagonisme se retrouvaient dans le personnage de la grand-mère, avec sa relation cassée avec Mirabel ou bien dans la relation avec la grande sœur, l’enfant idéale qui fait de Mirabel celle qui est laissée sur le côté. Nous avons pensé que la dynamique même de la famille permettait à l’histoire de se faire sans avoir la présence d’un "grand méchant vilain". Les choses qu’ils combattent, ce sont les insécurités et les autres problèmes qui existent dans la famille, et qui sont comme des montagnes géantes à dépasser, c’est tout ce qu’il nous fallait dans cette histoire.