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Epicentre, un nouveau centre de soins pour une santé inclusive et non-normative

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Depuis le début de cette année 2023, un nouveau centre de santé a ouvert ses portes à Saint-Gilles : Epicentre. Cet espace pluridisciplinaire s’adresse à tous et toutes – avec un focus sur les minorités de notre société -, et regroupe de multiples professionnel·le·s de la santé et du bien-être : des médecins généralistes (à partir d’avril), des psychologues, des sexologues, des logopèdes, des masseur·se·s ou des spécialistes des soins esthétiques.

On conçoit la santé d’une manière large – des soins médicaux aux soins paramédicaux, aux soins psychologues, aux soins en lien avec notre rapport à notre corps, avec l’esthétisme du corpsPour nous, la santé va au-delà d’une vision purement médicale ", explique Noah Gottlob, psychologue de formation, cofondateur et coordinateur d’Epicentre.

Ensemble, ces spécialistes de la santé réfléchissent et travaillent pour construire une santé " non-normative " et " non-oppressive " – une santé inclusive pour tous et toutes.Nous essayons de mettre en place un système de soins de santé qui inclut plus qu’il n’exclut comme c’est encore le cas ailleurs. "

La désertification des soins de santé

Car ce centre se veut une réponse au constat tiré par les associations de terrain, sur base de l’expérience des professionnel·le·s de la santé, des témoignages des personnes concernées ou encore de la recherche scientifique : les minorités comme les personnes LGBTQIA+* désertent les soins de santé. " Idéalement, tout le monde devrait pouvoir aller se soigner au centre médical au coin de sa rue ou chez son médecin de famille sans se soucier de savoir s’il ou elle va bien être accueilli·e. Mais dans les faits, cela ne se passe pas comme ça."

D’un côté, ces minorités craignent d’être victimes de discriminations ou de ne pas être bien prises en charge. " Au-delà de la peur, certaines personnes subissent des discriminations avérées, sont pathologisées dans leur orientation sexuelle ou l’identité de genre ou se voient carrément refuser des soins. "

De l’autre, les médecins ne sont pas assez sensibilisés et formés à l’accueil de ces minorités ou aux spécificités de leur santé. La confiance est donc rompue entre le monde médical et les patient·e·s qui font moins de dépistages, consultent moins, se soignent moins.

Pour réparer cette relation, des associations LGBTQIA + ont alors lancé des réseaux de médecins conseillés par et pour la communauté LGBTQIA +. C’est le cas d’Ex-Aequo – pour les hommes gays et bisexuels —, de Go To Gyneco – pour les femmes lesbiennes et bisexuelles -, ou de Genres Pluriels – pour les personnes transgenres et intersexuées.

Respecter l’autodétermination

Epicentre opte pour une autre approche, plus centralisée : il s’agit bien de réunir dans un seul et même endroit des spécialistes de la santé capables de mieux accueillir et soigner les personnes LGBTQIA +, mais pas seulement. " On parle bien ici de toutes les diversités. Des diversités de corps, d’origine, de parcours migratoires, de compositions familiales ou relationnelles. Mais on est ouvert à tout le monde, même si – il est vrai – nous avons un focus, une vigilance particulière au respect des besoins et vécus des personnes qui s’écartent de la norme. "

Noah Gottlob l’affirme : il préférerait que ce centre n’existe pas, mais il répond bien à un manquement, à un besoin de ces minorités, " notamment en respectant leur capacité à s’auto-déterminer. "

L’autodétermination est un concept central au sein de la communauté LGBTQIA + : chacun·e peut se définir seul·e dans son orientation sexuelle ou son identité de genre, sans influence ou confirmation extérieure – médicale ou autre.

Cette auto-détermination s’inscrit d’ailleurs pleinement dans les valeurs promues par le centre. " C’est aussi dans une logique de non-normativité : c’est ne pas ramener à ce qu’on estime soi-même " normal ", mais rejoindre l’autre, faire un mouvement vers l’autre. "

Les patient·e·s peuvent ainsi décider de se rendre à Epicentre pour travailler sur des thématiques propres à leur appartenance à une diversité – leur identité de genre ou leur orientation sexuelle par exemple -, mais peuvent aussi rechercher simplement un centre de soins bienveillant et non-normatif. Par des feedbacks après les consultations, tous et toutes participent à la construction du centre et à la définition – toujours en évolution – d’une santé inclusive.

Par ailleurs, la diversité des pratiques et des approches du centre permet de faire indirectement le lien entre les patient·e·s et des spécialistes de la santé qu’ils et elles ne consultent plus. " Par exemple, des personnes LGBTQIA + ne vont plus voir de médecin généraliste ou de psychologue, mais ont toujours un suivi avec un·e nutritionniste ou un·e esthéticien·ne. En accueillant ces disciplines au sein d’Epicentre, nous pouvons raccrocher les patient·e·s au monde médical, leur redonner confiance et leur proposer – en cours de suivi – d’autres soins comme médicaux ou psychologues. ",

Collaborer pour s’enrichir

Le projet valorise aussi la collaboration entre les membres de l’équipe – une vingtaine pour le moment – via un partage des espaces communs ou des réunions de débriefing. " Ici, des professionnel·le·s de la santé – qui se sentaient peut-être isolé·e·s dans leur pratique – s’enrichissent en se formant et en partageant leurs expériences et leurs approches qu’ils ou elles soient ou non dans la même discipline. Imaginer une santé inclusive, cela reste nouveau. "

En plus des sept cabinets médicaux, le bâtiment dispose d’une grande salle polyvalente pour organiser des activités sociales et communautaires (des groupes de parole, des séances de yoga, des ateliers d’art thérapeute, etc.) ou des formations pour d’autres professionnel·le·s de la santé. " Ce n’est pas parce qu’on a créé Epicentre que toutes les personnes concernées par la diversité, doivent venir se soigner chez nous. On aimerait pouvoir rayonner vers les autres structures de soins – publiques ou privées – pour qu’à terme, chaque lieu soit inclusif. "

Enfin, cet espace de santé collabore avec les associations O’Yes (et ses projets Moules Frites et Go to Gyneco) et Transkids Belgique dont Noah Gottlob est également le cofondateur. Ensemble, ces associations forment le projet CESCI – Centre Evras Collaboratif et de Santé Inclusive.

Epicentre, Espace de Santé Inclusive asbl – Rue du Fort 85, 1060 Saint-Gilles à Bruxelles

Plus d’informations sur le site internet.

* LGBTQIA + pour Lesbienne, Gay, Bisexuel, Transgenre, Queer, Intersexué, Asexuel et le + pour ceux et celles qui ne se reconnaissent pas dans les orientations sexuelles et les identités de genre précédemment citées.

 

Extrait du JT du 9/6/2023

Santé : mieux gérer les différences physiques et sexuelles

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