Quelques jours avant le début des Elite Series, la ligue Benelux de League of Legends, Sector One a annoncé arrêter ses activités indéfiniment à cause de problèmes financiers trop importants. L’équipe était présente depuis 2014 dans le paysage Esportif belge et participait à de nombreuses compétitions comme le VALORANT Challengers France, la ligue française de Valorant, mais n'aura pas réussi à transformer l'essai.
Crée en 2014 par des amis, Sector One a d’abord été une équipe professionnelle de League of Legends avant de très vite s’exporter sur d’autres jeux comme Valorant, Rocket League ou encore Rainbow Six Siege.
Jusqu’à récemment, l’équipe avait une fanbase croissante et proposait de bons résultats : ils ont notamment remporté la première saison du VALORANT Challengers France en mars 2022.
Malheureusement, la structure belge a annoncé hier, via un communiqué sur les réseaux sociaux, qu’elle arrêtait indéfiniment ses activités à cause d’un manque de rentabilité et de rentrées financières.
Sur les réseaux, les réactions ne se sont pas fait attendre : beaucoup regrettent le départ des renards et certains espèrent encore qu’ils pourront revenir au plus vite…
Sector One n’est malheureusement pas la seule structure belge qui se voit obligée d’arrêter ses activités… Récemment les équipes de LowLandLions, ION SQUAD et KVM Esports ont toutes été contraintes de mettre un terme à leurs activités Esportives. Sur ce sujet, l’équipe mCon Esports (une structure néerlandaise) a récemment pris la parole et appelé au soutien du secteur :
[…] Il y a moins de 5 ans de cela, en Belgique, les joueurs étaient indemnisés par le remboursement de leurs tickets LAN et des frais de déplacement au mieux. L’année passée, nous avons été capables de rémunérer généreusement nos joueurs et nous n’étions pas les seuls. Même si on a l’impression que nous traversons une période difficile cette année, cela ne veut pas dire que le secteur de l’Esport se porte mal.
[...] Au lieu de jeter l'éponge, tenons-nous debout et joignons nos mains. Nous souhaitons lancer un appel à tous ceux qui se soucient de l'Esport au Benelux : soutenez-vous les uns les autres !
Mais que s’est-il passé exactement ?
Comment une équipe si prometteuse que Sector One peut-elle mettre la clé sous la porte tandis qu'elle remporte des compétitions ?
La difficulté de faire de l’Esport en Belgique
Interrogé à ce sujet, Damien Rapoye s’est confié sur les difficultés de faire de l’Esport en Belgique de manière pérenne. Selon lui, le secteur n’est pas encore assez mature et souffre parfois de la comparaison avec les circuits européens voisins, allemands et français en tête.
"Il est très difficile, voire impossible d’être rentable lorsque l’on fait de l’Esport en Belgique. Les cashprizes sont dérisoires en comparaison des coûts qu’une équipe entraîne et celles-ci doivent entièrement reposer sur du sponsoring pour se financer. Il existe évidemment d’autres solutions comme le merchandising ou la location de nos locaux — que nous avons essayé — mais dans l’état actuel du marché, ces solutions sont très peu efficaces et ne suffisent pas."
On est arrivé au constat qu’il faudrait probablement choisir entre payer les joueurs ou l’équipe opérationnelle de Sector One. On n’a pas voulu prendre cette décision, ni prendre le risque de trouver un sponsor en cours d’année, donc logiquement on a décidé d’arrêter l’aventure.
"Enfin, l’inflation ne nous a pas aidé non plus puisqu’il a fallu augmenter les tous les salaires du jour au lendemain. L’Esport n’est pas le seul secteur à en souffrir, tous les entrepreneurs regardent l’avenir d’un œil incertain aujourd’hui."
Près de 12.000 € d’impayés
Aujourd’hui, Sector One devrait au total plus de 9000 € de salaires impayés et environ 3000 € de gains de tournois à ses anciennes équipes Valorant et League of Legends, selon plusieurs sources. Au total, les frais impayés pourraient s’élever à 12.000 € selon nos confrères de Dexerto.
Quand les joueurs de League of Legends ont demandé des nouvelles des paiements en retard, Sector One a affirmé que Riot Games enquêtait sur l’équipe League of Legends pour un potentiel match truqué lors des Elite Series et à demander à la structure de geler tous les paiements. Interrogé par Dexerto, Damien Rapoye, le CEO de Sector One, l’a confirmé et a déclaré qu'a ce jour seuls deux joueurs avaient été blanchis dans cette enquête.
L'ancien CEO de Sector One a en outre déclaré que les retards de paiement répétés à l’équipe de League of Legends sont un problème récurrent dans l’industrie, citant les retards de paiement répétés des organisateurs de tournois comme exemple du problème.
La fédération belge d’Esport réagit
La fédération belge d'Esports, abrégée en BESF, est un organisme qui "s'engage à faciliter, encourager et suivre le développement et la pratique de l'esport en Belgique" comme expliqué sur leur site web. Et la tâche est de taille.
Questionné sur le sujet, Samy Bessi, vice-président de la BESF, est revenu sur les difficultés inhérentes au secteur de l'Esport en Belgique.
"Tant qu'il n'y aura pas un statut Esportif reconnu, qui rassurera d'abord les clubs et surtout les investisseurs derrière les clubs, on ne pourra pas réellement avancer. Je ne vois pas comment qui que ce soit peut investir en Belgique si le club n'est même pas sûr d'avoir un contrat valable pour ses joueurs. Et aujourd'hui c'est toujours le cas en Belgique."
Je pense qu'en Belgique il y a autant de contrats différents qu'il y a d'Esportifs... Il y a clairement un problème quelque part et ce sont justement les questions qu'on pose directement au gouvernement.
"Mais tout n'est pas perdu et les choses avancent ! Dernièrement, on a réussi à débloquer les paiements pour les joueurs : ils bénéficient désormais du même système que les sportifs lorsqu'ils gagnent des compétitions. Par contre, rien du côté des salaires à proprement parler des joueurs professionnels.
Aujourd'hui notre combat, c'est essayer de rassembler un maximum de personnes autour d'une table, de créer une vraie commission entre les différents ministères, secrétaires d'États, etc. et lancer une vraie discussion autour de l'Esport et de ce que l'on veut en faire."
Et maintenant ?
Dans un futur proche, Sector One va rentrer en liquidation d'actifs : ils vont vendre tout leur matériel informatique ainsi que leurs locaux basés dans le centre de Bruxelles. Une fois la liquidation terminée, les anciens joueurs et membres de Sector One pourront déposer une réclamation auprès de l’entité qui supervisera le processus et devraient recevoir l’argent qui leur est dû.
En attendant la suite des événements, les joueurs de feu Sector One joueront sous le tag de "Benelux United", ne pouvant pas se retirer des compétitions puisque certaines ont déjà débuté. Leur participation est maintenue pour la saison complète mais la ligue française de Valorant leur donne jusqu’au mois d’octobre pour trouver une solution durable.