Frédéric Brébant, journaliste au Trends Tendances, décortique l'actualité de la pub et du marketing. ET si on vous proposait d’être payé pour voir de la publicité ?
C'est un concept révolutionnaire dans la jeune histoire du Web, un modèle complètement disruptif puisque l’entreprise qui se cache derrière ce concept vous propose effectivement d’être payé pour voir de la publicité.
Cette société s’appelle Brave, elle est américaine et elle a développé un navigateur Internet d’un genre nouveau. Les navigateurs classiques pour surfer sur le Web, on les connaît : c’est Google Chrome, Mozilla Firefox ou encore Safari pour Apple.
Mais il y en d’autres comme par exemple Brave qui a été lancé il y a cinq ans à peine et qui ne cesse de monter en puissance. Il ne comptait que (si j’ose dire) 20 millions d’utilisateurs en 2020 et il vient de passer la barre des 55 millions d’adeptes en ce début d’année, dont 200.000 rien qu’en Belgique.
Et qu’est-ce qu’il a de particulier, ce navigateur ‘‘disruptif’’ ?
Il est révolutionnaire parce qu’il présente la particularité d’être également un adblocker, c’est-à-dire un bloqueur de publicités. En clair, Brave bloque par défaut toutes les publicités sur les sites Internet (elles n’apparaissent pas à l’écran), mais il rend également impossible ce qu’on appelle le tracking de ses utilisateurs, ce fameux pistage informatique qui permet de connaître les goûts d’un internaute à travers l’historique de ses recherches.
Le navigateur Brave se fait un point d’honneur à respecter la vie privée de ses utilisateurs. Il ne les trace pas et cette absence de traçage et de publicités a non seulement un avantage éthique sur les autres navigateurs, mais aussi un avantage technique puisque cela permet à Brave d’être plus performant.
Avec ce navigateur, la vitesse de surf sur smartphone est ainsi quatre fois plus rapide que celle de Google Chrome.
Où est la logique ?
Brave s’engage en effet à bloquer par défaut toutes les publicités du Web, mais il propose malgré tout, aux utilisateurs qui le souhaitent, une version un peu plus commerciale de son site avec une rémunération à la clé.
Sur ce navigateur, l’internaute peut en effet choisir d’être payé pour voir de la publicité sélectionnée par Brave, à un rythme qu’il définit lui-même (une fois par heure, deux fois par heure, etc.) et qui apparaît discrètement sous la forme de petites notifications.
Bref, on est ici dans une logique de récompense : l’utilisateur est payé pour le temps qu’il consacre aux messages publicitaires. Concrètement, il est rémunéré sous la forme de jetons BAT (BAT pour Basic Attention Token) qui est une crypto-monnaie qu’on peut utiliser dans l’écosystème Brave, mais qu’on peut aussi convertir en monnaie traditionnelle (dollar, euro…) lorsqu’on le souhaite.
Plus l’utilisateur acceptera de regarder des publicités, plus son portefeuille se remplira…
Exactement ! Le mot portefeuille est bien choisi, puisque l’utilisateur dispose d’un ‘‘Brave Wallet’’ pour y mettre ses jetons BAT. Des jetons qu’il peut d’ailleurs utiliser aussi pour rémunérer les créateurs de contenu des sites qu’il visite fréquemment et qui ne bénéficient pas nécessairement de la manne des annonceurs.
Bref, vous l’avez compris : on est ici dans une toute autre logique publicitaire, bien loin du modèle développé par Google, Facebook et compagnie. Dans le modèle économique des Gafa, le consommateur est le produit puisque ce sont ses données personnelles qui sont pompées pour faire tourner la machine publicitaire.
Or, avec Brave, l’utilisateur reprend pleinement possession de ses datas, de ses données personnelles qui ont une valeur et qu’il peut moyenner lui-même, comme bon lui semble. On est ici dans la nouvelle économie de l’attention.
Avec Brave, le temps vaut de l’argent. Les données valent de l’argent. Et l’attention de l’internaute est rémunérée à sa juste valeur.