Les Drag Queens* et Kings** sont l'une des nouvelles cibles des conservateurs américains. Aux USA, l’état républicain du Tennesse a récemment interdit l’art du drag auprès des mineurs. Près d’une quinzaine d’états pourraient suivre le mouvement et adopter des lois similaires.

En France, des lectures de contes pour enfants animées par des Drag Queens ont fait l’objet de pétitions et de réactions très virulentes sur les réseaux sociaux. A Toulouse, sous la pression de l’extrême droite, le maire de droite a " réorienté " un atelier de lecture de contes pour enfants… vers un public majeur !

Associer des Drag Queens, des contes et des enfants. Ce concept n’est pas neuf en Belgique ! Depuis quatre ans, ces séances de lecture sont proposées par " Unique en son genre ", un projet aujourd’hui porté par la maison arc-en-ciel*** de Liège.

En février 2023, pour la première fois, les organisateurs ont aussi été confrontés à une " manifestation " à la bibliothèque " La Ribambelle des mots " de La Louvière. " Ces opposants étaient neuf. Ils n’étaient pas physiquement agressifs, mais ils ont collé sur les vitres de la bibliothèque deux affiches avec des slogans violents et avec des références à la pédophilie. C’était brutal pour les enfants, les artistes, le personnel de la bibliothèque ", explique Sébastien Hanesse, coordinateur de " Unique en son genre ". 

Une plainte symbolique a d’ailleurs été déposée, en accord avec la bibliothèque de La Louvière, le centre culturel Central et la maison-arc-en-ciel de Liège. " Nous ne retrouvons face à des personnes qui veulent interdire le travail d’artistes, avec des arguments de l’extrême droite ou de pédopsychiatres très contestés. "

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L’art du drag pour changer les mentalités

Vakah Profana et Cléo Victoire aux Journées du Matrimoine
Vakah Profana et Cléo Victoire aux Journées du Matrimoine © – Joséphine Devillers

Pour Sébastien Hanesse et ses huit artistes impliqués dans le projet, il est difficile de comprendre ces réactions virulentes sur les réseaux sociaux et désormais directement sur le lieu de leurs performances artistiques. " Si ces opposants assistaient à nos lectures, ils verraient qu’il n’y a vraiment aucun souci ! "

Avec " Unique en Son Genre ", des Drag Queens* et des Drag Kings** content des histoires, transmettent des témoignages, répondent aux questions du public et luttent contre les stéréotypes et les discriminations à travers les mots et la littérature. " Nous ne questionnons pas juste le genre, le masculin et le féminin. Nous parlons aussi de la liberté, de l’écologie, de la grossophobie. Globalement, nous essayons de parler de toutes les formes de discriminations de notre société. Et nous avons une règle d’or : nous ne parlons jamais de sexualité avec des enfants. "

La Drag Queen Edna Sorgelsen, candidate de la saison 1 de l'émission TV "Drag Race Belgique", participe à ces animations depuis plusieurs années. "J’ai toujours trouvé important d’expliquer aux enfants qu’il est possible de faire autre chose que ce que la société nous inculque. Selon les codes, les petits garçons doivent porter des shorts et des pantalons et les filles des robes et des colliers. Mais pourquoi ne pas mêler les codes ? " expliquait-elle à la RTBF en 2021.

Pour Sandra Van De Kamp, une autre drag Queen, les contes s’adaptent particulièrement bien au jeune public. Avec la fiction, on peut raconter plein de choses. On peut le raconter en plus d’une façon adaptée pour les enfants. On aborde des choses très simples qui, en plus, à cet âge-là ne sont pas encore complètement solidifiées. En fait, ils sont en train d’apprendre ces codes-là. "Unique en son genre", c’est une fenêtre sur d’autres façons de penser, sur d’autres codes”, explique la Drag Queen au micro de nos confrères de RTC-Liège.

>> A voir : Des lectures de contes pour enfants avec des Drag Queens (RTC-Liège)

A travers ce projet, Sébastien cherche aussi à déconstruire les stéréotypes autour du drag. " Les Drag sont des artistes avant tout. On les a beaucoup catégorisés et réduits au monde de la nuit. Mais ces artistes sont multiples : ils travaillent dans des théâtres et des cabarets, ils font preuve de pédagogie, ils partagent leur vécu personnel. Puis, il y a toujours un peu de magie lorsque les jeunes découvrent les Drag Queens/Kings/Queer comme face à des personnages costumés. Nous sommes dans l’ordre du clownesque. "

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Bientôt dans les maisons de repos

Peggy Lee Cooper à Kanal
Peggy Lee Cooper à Kanal © Lorraine Wauters

Par saison, " Unique en son genre " organise en moyenne une centaine de lectures. Le projet tourne dans des médiathèques, des maisons arc-ciel et des centres culturels de Bruxelles et de Wallonie. " Nous allons partout où on nous demande de venir. Les écoles, les bibliothèques, les théâtres et même les centres sportifs ! "

Depuis sa création, le projet a bien évolué. Il s’est d’abord adressé aux enfants de 3 à 12 ans, puis aux adolescents jusqu’à 18 ans, mais aussi à leurs proches et donc à toutes les générations. Dès la prochaine saison, des animations seront d’ailleurs organisées avec des personnes en situation de handicap et des personnes âgées dans des maisons de repos.

Ces séances de lecture sont la plupart du temps gratuites. Vous retrouverez les prochaines dates sur le site internet de la maison arc-en-ciel de Liège.

Une Drag Queen* est un artiste qui créé un personnage scénique et qui joue avec les codes du féminin ; Un Drag King** questionne les codes du masculin.

*** Les maisons arc-en-ciel sont des lieux centraux du milieu associatif LGBTQIA +. Elles offrent un espace d’accueil et une aide sociale, juridique ou psychologique pour les minorités sexuelles ou de genre en difficulté. Des permanences, des activités culturelles, des formations ou des ateliers y sont régulièrement organisés.

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