Fatima, Redwane et moi ou l’histoire d’un combat et d’une amitié

Fatima et son fils Redwane

© Triangle 7

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Par Anne Schiffmann

Derrière les chiffres anonymes cités quand on parle des sans-papiers, se cachent des visages, des femmes et des hommes aux parcours si souvent douloureux. Ce très beau film raconte l'histoire de l’une d’entre eux. Il raconte le long combat de Fatima pour avoir le droit d'exister en Belgique avec son fils Redwane. Il raconte aussi son amitié avec Bernadette, réalisatrice du film.

Fatima, Redwane et moi : un documentaire de Bernadette Saint-Rémi à ne pas manquer dans l’émission Regard sur le lundi 6 décembre à 21h20 sur La Trois et à revoir sur Auvio

On estime qu’environ 100.000 personnes vivent en Belgique en situation irrégulière. Des hommes, des femmes, des enfants ou des adolescents qui vivent ici parfois depuis des années. Le chemin vers une hypothétique régularisation est souvent très long et difficile. Et quatre mois après la grève de la fin menée par 470 d’entre eux, pas grand-chose n’a bougé malgré une promesse d’examen de leur dossier. 

Derrière les chiffres et l’actualité, il y a des parcours individuels. Ce film raconte celui de Fatima, venue d’Algérie en Belgique il y a 15 ans, persuadée de pouvoir venir y faire des études complémentaires à ses diplômes universitaires d'Algérie. Mais rien ne s’est passé comme espéré. Un mariage avec un homme violent, une naissance, une séparation … elle était devenue sans papiers.  Mais avec une rage de vivre et un inépuisable optimisme, elle a fini par voir le bout du tunnel. C'est une tranche de vie partagée avec la réalisatrice depuis 4 ans qui a donné place à ce film.

Un film produit par Triangle 7 en coproduction avec la RTBF

Rencontre avec Bernadette Saint-Rémi

La réalisatrice Bernadette Saint-Rémi et Fatima
La réalisatrice Bernadette Saint-Rémi et Fatima © Triangle 7

Comment est né ce film ?

Je connais Fatima depuis 10 ans et j’ai commencé le film il y a 4 ans. C’est un coup de la colère qui m’a poussé à faire ce film; la colère par rapport à la situation qu’elle vivait depuis si longtemps, trop longtemps ! Sa situation me paraissait tellement injuste, hors de toute raison et j’ai eu envie de la raconter. Je me suis rendu compte aussi que cette femme était lumineuse, un vrai personnage de film.

La situation de Fatima était d’autant plus compliquée qu’elle était une femme ... 

J’ignorais cette violence qu’elle avait vécue avec son mari. En arrivant en Belgique, Fatima ne savait qu’elle serait sans papiers. Elle ne savait pas non plus qu’elle allait tomber sur un homme violent et qu’en le quittant ses démarches seraient plus compliquées encore. Quand je l’ai rencontrée, elle était encore en plein processus de reconstruction. Son histoire est aussi révélatrice de comment une femme doit parfois soulever des montagnes, pour elle et son enfant. 

Votre film raconte l’histoire de son combat mais aussi celle de votre amitié, qui a été déterminante pour Fatima et Redwane ?

Quand des choses me révoltent, j’essaie d’agir. Je les ai soutenus et aidés comme je pouvais mais c’est elle qui a pris les choses en mains pour se battre. Mais comme elle l’explique dans le film, ils rencontrent tellement de refus, de non, qu’à un moment donné, ils perdent courage. A ce moment-là, je pouvais me battre à ses côtés et c’est plus facile pour moi puisque c’est mon pays, ma culture …

J'aimerais qu'avec ce film, on change de regard. Il y a tellement de gens qui parlent de cette problématique sans rien connaître.

Comment vont-ils depuis lors ?

A la fois ça va bien, ils vivent dans leur petite maison, ils ont un logement, Redwane va à l’école et Fatima a un travail. Mais Fatima est confrontée au plafond de verre. Avant, pendant et après le film elle est toujours femme d’ouvrage. Elle est licenciée en langue et elle travaille comme femme d’ouvrage... Peut-on être fier de ça ? On lui laisse une petite place parce qu’elle a beaucoup insisté, mais quelle place ? Donc moi je suis toujours en colère mais Fatima est fatiguée. Ce sont des combats qui épuisent. Tout le monde va dire, " mais ça va, son problème est résolu, on ne l’a pas obligée à retourner en Algérie, son fils peut étudier ici, elle a du boulot, tout va bien ". Mais non en fait. C’est comme si sur un canapé, on ne la laissait s’asseoir sur un coin. Et il n’y a pas de raison et donc ça me met toujours en rage. Je ne défends pas une cause avec ce film. Mais j’aimerais que grâce à lui, on change de regard. Il y a tellement de gens qui parlent de cette problématique sans rien connaître ! 

Un film produit par Triangle 7 en coproduction avec la RTBF

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