Week-end Première

Faut-il toujours être fun ?

© Pixabay

Par RTBF La Première/Matthieu Peltier via

Contre l’injonction au fun et au divertissement permanent, réhabilitons le sérieux ! C’est une proposition du philosophe Matthieu Peltier.

Pour Nietzsche, le sérieux est un symptôme évident de mauvaise digestion. Et pour beaucoup, en effet, être sérieux, c’est être rigide, pesant, solennel, ennuyant, voire assommant. Tandis que "la légèreté fabrique des individus très sociaux, toujours dans l’air du temps, bien intégrés dans la convivialité ludique de la consommation", dit le philosophe Serge Carfantan.

La légèreté n’a pourtant pas que des aspects positifs.

La face sombre de la légèreté

Le philosophe Pascal parlait déjà du divertissement comme d’une manière d’esquiver l’angoisse existentielle et la perspective de la mort.

Guy Debord, dans son livre 'La société du spectacle', estime que jamais une société n’a dépensé autant d’énergie, de ressources intellectuelles, d’argent pour diffuser une manière de vivre légère, sans souci, basée sur l’image. D’où le privilège immense accordé aujourd’hui à l’apparence.

Selon lui, dans cette société de la légèreté, on perd la densité et tout se déréalise.

Ce sérieux va-t-il à l’encontre de ce qui fait la jeunesse ?

Ce discours pourrait être pris comme un discours de vieux cons.

Mais pour le philosophe Raphaël Einthoven, c’est plutôt l’inverse. Il trouve que les jeunes aujourd’hui sont beaucoup plus conservateurs que lui. Il reproche à cette jeunesse de manquer de légèreté, de s’indigner trop vite, de casser l’ambiance sans arrêt, en mettant justement en question cette légèreté si chère aux soixante-huitards dont il fait partie.

La légèreté serait donc peut-être, à notre époque, justement, le propre de l’ancienne génération.

Et c’est vrai que la personne qui interroge l’impact écologique de nos actions, qui se demande dans quelles conditions ont été produits ces vêtements, ou encore qui traque le patriarcat insidieux de notre culture, n’est pas légère. Et Matthieu Peltier se demande si elle n’a pas raison de ne pas l’être…

Le réflexe plutôt que la réflexion

Le philosophe Serge Carfantan dit :

"Il est important d’observer autour de nous à quel point notre société mobilise toutes les ressources de l’intellect pour persuader l’homme de masse de la valeur suprême des objets de la frivolité. Il engage tout d’abord de la part du sujet un type de réflexion hypnotique, qui substitue le réflexe à la réflexion.

Il suppose le sabotage de tout ce qui comporterait ne serait-ce que l’ébauche d’une prise de conscience, l’évitement constant du sérieux par la dérision, le détournement systématique de la critique à des fins qui ramènent toujours vers le profit, l’art de laisser croire à chacun qu’il dispose de son libre arbitre, tout en l’empêchant de l’exercer."
 

Et donc, un peu de sérieux, s’il vous plaît !

La philo selon Matthieu, à écouter ici

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