Coronavirus

Fermer les lieux culturels, un choix politique sans base scientifique : les expériences pilotes menées au printemps le prouvent

Selon DNAlytics, le risque de contamination n'est pas plus important dans une salle de spectacle qu'au restaurant ou dans une grande surface.

© Heath Korvola

La décision de fermer les lieux culturels à partir de ce 26 décembre a surpris tout le monde, à commencer par les acteurs culturels eux-mêmes. Certains en appellent à la résistance, affirmant qu’il n’y pas de risque de contamination dans une salle de spectacle, de théâtre ou de cinéma, à condition de respecter quelques règles : ventilation, distance, port du masque. Mais qu’en est-il exactement ?

Au printemps, pour aider le monde politique à prendre ses décisions, des tests grandeur nature ont été réalisés. Et il s’est avéré, en effet, qu’il n’y avait pas plus de risque de contamination dans une salle de spectacle qu’ailleurs dans la société.

Six événements pilotes ont été organisés, dans diverses configurations et avec un public suffisant (4500 personnes au total). A chaque fois, les participants étaient répartis en deux groupes. D’un côté, ceux qui assistaient au spectacle ; de l’autre, ceux qui n’y assistaient pas. Tout le monde était testé avant et après. Résultat sans appel.

"On n’avait pas statistiquement pu mesurer un taux de contamination supérieur parmi les gens qui participaient au spectacle, en comparaison avec ceux qui n’y participaient pas et qui menaient une vie normale, explique Damien Bertrand, directeur commercial de la société DNAlytics (basée à Louvain-la-Neuve) qui a piloté cette expérience. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de risque du tout, mais le risque existe dans toutes les activités de la vie en société. Dans le contexte dans lequel on avait mené ces expériences, il n’y avait aucun élément qui permettait de stigmatiser particulièrement la culture par rapport à d’autres secteurs."

Un risque accru avec Omicron?

Bien sûr, depuis le printemps, la situation épidémiologique a changé. Le coronavirus a fait un retour en force, de nouveaux variants plus contagieux sont apparus. Mais selon Damien Bertrand, même avec Delta et Omicron, on ne dispose pas d'éléments permettant d'affirmer qu'il est plus risqué d’aller au cinéma ou au théâtre que d’aller au restaurant ou faire des courses.

"Sans résultats scientifiques additionnels, j’ai envie de dire que les conclusions restent les mêmes. Il n’y a, a priori, d’un point de vue raisonnable, aucune raison de penser que participer à une activité culturelle est plus risqué que participer à d’autres activités."

En clair, si Omicron est plus contagieux, il l’est tout autant au cinéma ou au théâtre que n'importe où ailleurs.

Retrouver l'adhésion et la cohésion

Pourquoi, dès lors, pénaliser un secteur plutôt qu’un autre ? C’est un choix politique. Selon DNAlytics, quels que soient les éléments qui ont guidé le Codeco, la décision n'a pas été expliquée sur base de raisonnements scientifiques, ce qui pourrait s’avérer contre-productif.

"Il faut recréer une adhésion et une cohésion dans la lutte contre l’épidémie, poursuit Damien Bertrand. Le plus grand risque, tel que je le vois autour de moi, c’est le décrochage, les gens qui n’y comprennent plus rien et qui ne sont plus en phase avec les mesures qui leur sont imposées. Dans le meilleur des cas, ils ne vont pas les suivre. Dans le pire des cas, ils vont commencer à les critiquer et à mener des actions, entre guillemets, de résistance sur les réseaux sociaux et cetera. On doit retrouver cette solidarité entre citoyens dans la lutte contre le coronavirus. Et il faut sortir de cette dynamique qui consister à choisir un secteur plutôt qu’un autre, et imaginer d’autres manières de contenir cette épidémie."

Et de citer l’exemple du Danemark où la culture des auto-tests serait bien plus ancrée. La responsabilisation individuelle par rapport au risque de contamination susciterait bien plus d’adhésion au sein de la population.

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