Justice

Fouilles à nu avec génuflexion des accusés du procès des attentats de Bruxelles : le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire recommande de les bannir

Policiers cagoulés qui escortent les accusés du procès des attentats de Bruxelles

© Belga

Le 18 janvier dernier, une délégation du Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire (CCSP) s’est rendue à la prison de Haren pour observer les fouilles à nu imposées aux accusés du procès des attentats de Bruxelles. Ces fouilles sont dénoncées depuis des mois par les accusés et leurs avocats. Un juge du tribunal de première instance de Bruxelles a estimé que le côté systématique de ces fouilles à nu avec génuflexion était contraire à la Convention européenne des droits de l’Homme. Mais depuis cette ordonnance du 29 décembre 2022, peu de choses ont changé comme l’a constaté le CCSP.

Mi-janvier, la délégation s’est rendue dans la section de sécurité renforcée de la prison de Haren en vue d’assister à une fouille à nu. Les services de police ont toutefois refusé sa présence lors de la fouille. Les membres du CCSP ont donc observé les choses à distance et à travers les images des caméras de surveillance. La délégation a également pu s’entretenir avec les accusés et avec les policiers de l’unité DAP (Direction de la Protection) qui procèdent à ces fouilles.

Risque de multiplier les incidents

Le CCSP a pu constater que la fouille se déroule en deux temps. D’abord, le haut. Et puis le bas. Cela dit, il est toujours demandé aux détenus de faire des génuflexions lorsque le bas de leur corps est dévêtu. Le CCSP analyse : "Cette façon de procéder est perçue comme dégradante et constitue la principale préoccupation des accusés". Le Conseil ajoute que "le caractère répétitif de ces fouilles, jour après jour, semaine après semaine, multiplie nécessairement le risque d’incidents".

Le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire relève également qu’il n’est fait mention nulle part de la nécessité de faire des génuflexions lors des fouilles approfondies. Ni dans la loi sur la fonction de police, ni dans la directive ministérielle rédigée le 2 janvier 2023 par le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne.

Par ailleurs, depuis l’ordonnance de référé du tribunal de première instance, la police doit fournir une analyse de l’image des risques intégrale et individualisée. Le CCSP s’interroge sur cette expression : "La question se pose de savoir si cette formulation n’a pas pour effet d’assurer que les fouilles sont toujours justifiées de manière semblable, ce qui conduit à une application systématique de la mesure de contrôle/sécurité". Un avis déjà partagé par des avocats de la défense qui dénoncent des motivations "copiées-collées et bourrées d’erreurs".

Identifier les policiers qui procèdent aux fouilles

Finalement, le CCSP pointe du doigt l’anonymat des policiers qui réalisent ces fouilles à nu avec génuflexion. "À l’exception du chef d’équipe dont le surnom était brodé sur son gilet pare-balles, la délégation n’a relevé aucune possibilité d’identifier les autres policiers présents". Et ajoute : "Tous les policiers étaient masqués ou cagoulés. Il n’est possible de les identifier qu’en décrivant leurs vêtements qui étaient généralement similaires, soit de couleur noire ou grise". Le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire recommande donc la suppression de cet anonymat. Ces policiers devraient être identifiables via une signalétique, un pseudonyme ou un numéro d’identification.

Dans ses conclusions, le Conseil Central de Surveillance Pénitentiaire insiste sur le respect de la dignité des personnes fouillées : "il faut proscrire les gestes humiliants et/ou à caractère vexatoire comme demander à des personnes de faire des génuflexions, de soulever ses testicules, sa poitrine ou de tousser accroupi".

Dans ce dossier, la position des accusés est claire. Certains refusent d’assister aux audiences tant que les fouilles à nu avec génuflexion se poursuivent. La position du tribunal de première instance est claire également. La répétition de ces fouilles contrevient à la Convention européenne des droits de l’Homme. Reste à savoir quelle sera la position de la cour d’appel. L’État belge a, en effet, fait appel de la décision du juge des référés. L’audience doit avoir lieu le 3 mars prochain.

Sur le même sujet :

Selon l'État belge, les fouilles à nu avec génuflexion sont un impératif sécuritaire (JP 13H La Première 03/03/2023)

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