"Nous entendons parler des influvoleurs, du combat à mener contre nous. Nous pensons que c’est une erreur. Qu’une minorité est devenue une généralité", plaident les influenceurs dans une tribune parue dans le Journal du Dimanche.
Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie, a présenté vendredi une batterie de mesures pour réguler un secteur jusqu’ici largement sans contraintes. En particulier, il veut soumettre les 150.000 influenceurs français, qui vivent souvent de la promotion de produits, "aux mêmes règles" publicitaires que les médias traditionnels.
Le petit monde des stars d’Instagram, YouTube et TikTok s’inquiète d’être assimilé à ceux qui sont accusés de tromper les consommateurs.
"Votre seule boussole doit être la protection des consommateurs des dérives d’une minorité qui se croit tout permis et la préservation de nos activités et des emplois que nous créons. Ne cassez pas le modèle vertueux que nous construisons aux quatre coins de la France avec et pour les Français. Comprenez-le, protégez-le, faites-le grandir", demandent les influenceurs. Ils insistent :
Arnaques, contrefaçons, pratiques commerciales douteuses, certains ont fait croire ces derniers mois qu’ils étaient représentatifs de notre secteur alors qu’ils ne représentent qu’une minorité. Ce sont leurs dérives que nous souhaitons d’abord dénoncer.
"Nous ne sommes certainement pas parfaits. Nous avons fait des erreurs. Mais notre priorité est et sera toujours la protection des consommateurs, de nos communautés. Nous sommes favorables à un encadrement du secteur", assurent les signataires, en s’écriant : "Nous ne sommes pas des panneaux publicitaires ambulants".
Ils demandent aux députés de ne pas les "considérer comme une menace" ni "mettre à mal une économie florissante" qui représente "des milliers d’emplois" en aidant à promouvoir les entreprises. "Le débat n’est pas d’être pour ou contre l’influence", concluent-ils.
En janvier, la répression des fraudes (DGCCRF) a publié une enquête accablante sur les pratiques du secteur, avec tromperie sur les produits vendus, promotion de paris sportifs risqués, voire d’injections "par des esthéticiens et des non-professionnels de santé". La proposition de loi transpartisane qui doit être examinée cette semaine prévoit également d’interdire la promotion de la chirurgie esthétique.
Sauf que…
Sauf que suite à la publication de cette tribune, de nombreux YouTubeurs ont indiqué soit ne jamais avoir signé une telle tribune, soit l’avoir signée mais sans en avoir lu les détails. Si pour les premiers une action en justice peut être lancée, pour les seconds, l’erreur n’est pas très fine.
En témoigne notamment Squeezie.
D’autres se disent "trompés", c’est le cas de Dr. Nozman. Des signataires lui avaient présenté le projet de loi de Le Maire comme "trop restrictif" auprès des créateurs de contenu alors qu’en réalité, il s’agit surtout de réguler les arnaques et autres produits sponsorisés dangereux (promouvant des chirurgies esthétiques, notamment).
Enfin, dans l’équipe "je-n’ai-rien-signé-du-tout", on retrouve notamment le ponte du streaming français Gotaga ainsi que Cyprien qui assurent ne jamais avoir signé, ni donné d’accord de principe sur les revendications de la tribune publiée dans le Journal du Dimanche.
Ce matin, l'Union des Métiers de l’Influence et des Créateurs de Contenu (UMICC) réagissait dans un communiqué suite à l'embrasement sur les réseaux sociaux.
Ce capharnaüm fragilise l’écosystème français en deux points.
Premièrement, beaucoup d’amateurs de contenu proposé sur YouTube dénoncent l’égoïsme de ces YouTubeurs qui veulent à tout prix protéger leurs placements de produits, surtout lorsque ces derniers sont d’origine louche : association avec des casinos, des centres de chirurgie esthétique non-régulés, des médicaments dit "miracles".
Selon ces utilisateurs des réseaux sociaux, cet égoïsme est en totale contradiction avec la lutte actuelle contre la réforme des retraites en France.
Deuxièmement, cette tribune fragilise d’autant plus les "petits" créateurs de contenu qui n’ont rien à se reprocher en termes de partenaires commerciaux. L’écosystème actuel de Youtube est impitoyable : les créateurs aux millions d’abonnés seront toujours plus mis en avant que ceux qui disposent d’une plus petite communauté.
A l’heure actuelle, des signataires de la tribune prennent encore la parole sur les réseaux sociaux pour justifier leur action. A voir ce qu’en pensera Bruno Le Maire.