L'odyssée

Franz Liszt, grand transcripteur des lieder de Schubert

© Liszt (c) Fine Art Images / Heritage Images via Getty Images / Schubert (c) Imagno / Getty Images

S’il est un compositeur qui a œuvré pour partager la musique de Franz Schubert, c’est bien Franz Liszt, qui, au cours de sa carrière, a paraphrasé et transcrit un nombre important d’œuvres de Schubert. Franz vu à travers le regard d’un autre Franz.

Franz Liszt est à lui tout seul le symbole du pianiste virtuose. Le roi du récital. Une Rock Star avant l’heure. Plein d’excès. Il était aussi un compositeur insatiable et un transcripteur de grand talent. Liszt a transcrit et paraphrasé pour piano une quantité non négligeable d’œuvres de Mozart, de Berlioz, de Wagner, de Saint-Saëns et bien entendu de Schubert. Et de Schubert, ce sont surtout ses lieder que Liszt a transcrits.

Transcrire Schubert à Vienne

C’est en 1838 que Liszt réalise la plupart des transcriptions des lieder de Schubert. En mars 1838, une immense catastrophe climatique ravage la Hongrie. L’hiver avait été rude et lors du dégel, le Danube a débordé en causant de nombreuses inondations et en causant de nombreuses victimes. Liszt apprend la nouvelle dans un journal allemand qu’il lit à Venise, alors qu’il prend boit sur café à la terrasse du Florian. Il saute alors dans un train pour se rendre à Vienne où il donne huit concerts de bienfaisance pour la Hongrie. A Vienne, qui est la ville natale de Schubert, Liszt se met inévitablement à transcrire pour piano seul un grand nombre de ses lieder. Il en programme quelques-uns lors de ses concerts de bienfaisance et le succès est immédiat. Au total, Liszt a transcrit une cinquantaine de lieder de Schubert.

Certaines de ces transcriptions de Schubert vont immédiatement être éditées, certaines par Diabelli, d’autre par Haslinger, qui a vendu des stocks assez impressionnants de transcriptions, tant et si bien qu’il a réclamé à Liszt d’autres transcriptions. Le compositeur a d’ailleurs dit à ce propos : "Le bon Haslinger m’accable de Schubert, je viens de lui envoyer 24 nouveaux lieder et pour le moment, je me sens un petit peu fatigué de cette besogne."

On peut trouver trois buts à ces transcriptions : tout d’abord elles vont contribuer à populariser le nom de Schubert qui n’était pas si célèbre à l’époque à Vienne, ensuite, Liszt a contribué à faire évoluer la technique pianistique, notamment en résolvant quelques problèmes de restitution de timbres et puis, enfin, cela a contribué à élargir le répertoire de Franz Liszt.

Des transcriptions fidèles au lied original de Schubert ?

C’est la grande question qui se pose sur les transcriptions de Liszt et le moins que l’on puisse dire, c’est que les avis divergent. Pour certains, sous prétexte de suppléer à l’absence de paroles, Liszt introduit mille ornements, fioritures, cadences brillantes et acrobatiques destinées à mettre en valeur les qualités techniques de l’exécutant et apporter une diversité fort discutable au traitement des idées musicales. Pour ces détracteurs, ces variantes trahissent souvent le caractère profond des œuvres originales. Alors bien sûr, nous savons que Liszt aime la virtuosité mais est-elle si gratuite que ça dans les transcriptions ? "Personnellement, je ne pense pas", nous dit Cécile Poss.

La grande question est : comment incorporer la ligne vocale dans l’accompagnement de piano de Schubert et en faire une œuvre qui fonctionne sans la voix. Liszt s’est bien sûr posé cette question et il y arrive parfaitement, à l’image du Roi des Aulnes. Dans la transcription qu’en fait Liszt, tout est de Schubert, à l’exception des octaves que Liszt a doublées. Et s’il l’a fait, ce n’est pas pour agacer les pianistes mais il l’a fait dans un but précis, à savoir accentuer le drame, puisqu’il s’agit du moment où le père attire son fils près de lui alors qu’ils sont poursuivis par le Roi des Aulnes. Autre exploit de Franz Liszt, c’est qu’il va donner un caractère à chaque personnage, et ce dans tous les lieder qu’il transcrits. Dans le Roi des Aulnes, Liszt va auditivement personnaliser les quatre intervenants, le père, le fils, le roi des Aulnes et le narrateur, et cela grâce au changement de registre mélodique.

Et concernant ces transcriptions et la fidélité au texte, Liszt avait toujours pris soin de noter les mots du poème dans le texte musical, car pour lui, il était capital que le pianiste ait les mots du texte sous les yeux afin qu’il puisse donner les bonnes inflexions. Et petite anecdote, lors de la première édition des transcriptions des lieder de Schubert par Liszt, Haslinger avait supprimé les poèmes du texte musical et les avait tous rassemblés au début de la partition. Une liberté éditoriale qui n’a pas du tout été appréciée par Liszt qui a déclaré que cela ne servait absolument à rien et qu’il fallait absolument rééditer les partitions avec les mots du poème dans le texte musical.

Une thématique à écouter ci-dessous (à partir de 1h53)

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