Belgique

Greffier du Parlement wallon : pour Christie Morreale, "il faut que les langues se délient en matière de harcèlement au travail"

Jeudi en Prime

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Depuis quelques jours, on ne parle que de ça : la plainte pour harcèlement déposée à l’auditorat du travail de Namur contre le greffier du Parlement wallon Frédéric Janssens, proche du MR, et contre cinq députés wallons. L’information, rapportée par Le Soir lundi, a entraîné une série de conséquences en cascade. Une information judiciaire est ouverte et le greffier a été suspendu pendant six mois. Christie Morreale (PS), vice-présidente du gouvernement wallon, ministre de l’Emploi, de l’Action sociale, mais aussi de la Santé et de l’Egalité des chances, revient sur ce dossier (mais pas que) sur le plateau de Jeudi en prime.

"La sanction, précise-t-elle, c’est surtout, pour le moment, une procédure pénale parce qu’une plainte a été déposée pour harcèlement. Et, selon la loi, puisqu’il y a une plainte au pénal, il ne peut pas y avoir de sanction par le Parlement. Néanmoins, celui-ci a décidé d’écarter le greffier pendant six mois pour trouver la sérénité et s’assurer que le droit du travail soit respecté."

Aujourd’hui ministre, Christie Morreale a été député régionale wallonne entre 2014 et 2019. Elle se souvient de Frédéric Janssens comme de quelqu’un ayant une "attitude très sèche", et partage quelques anecdotes. "Parfois, il fallait s’assurer que les repas étaient servis également pour le personnel ou que les pauses étaient respectées, mais jamais dans une mesure aussi grave que celle des faits déclarés ces derniers jours."

Dans une circonstance précise, elle se souvient être intervenue : "Une fois j’ai réagi parce qu’une parlementaire avait été extirpée d’une salle parce qu’elle allaitait son bébé pendant une séance nocturne. A cette occasion, j’avais demandé à changer le règlement pour qu’on prenne en compte la situation d’une maman qui travaillait mais qui devait aussi s’occuper de son enfant." A l’époque, le greffier avait rechigné, alors que Christie Morreale prônait une interprétation plus souple du règlement.

Un audit pour examiner les dépenses du greffier

A côté de cela, on reproche à Frédéric Janssens de dépenser des sommes faramineuses pour des déplacements, des communications téléphoniques et autre. Ce qui peut susciter l’indignation chez les Wallonnes et les Wallons, encore plus à un moment où la conjoncture économique est particulièrement défavorable.

La bonne gouvernance, j’en ai fait une affaire personnelle

"Pour moi, il faut agir rapidement quand les faits sont reprochés : d’une part, il y a la procédure au sein de l’auditorat du travail, avec la suspension. De l’autre, en matière de dépenses, un audit a été demandé. Dès qu’il sera terminé, il sera envoyé à tous les députés, y compris les membres de l’opposition, dans un souci de transparence. La bonne gouvernance, j’en ai fait une affaire personnelle depuis que je milite au sein du PS", affirme Christie Morreale.

Quel rôle pour le Bureau du Parlement ?

En cause, aujourd’hui, toutefois, il n’y a pas que les agissements de Frédéric Janssens. L’efficacité du Bureau du Parlement est, elle aussi, remise en question.

Dans un courrier dont la RTBF a pu prendre connaissance ce jeudi matin, 52 agents statutaires parmi les 106 agents du greffe du Parlement wallon ont envoyé un courrier aux membres du Bureau du Parlement, avec copie à l’auditorat du travail. Ils s’inquiètent de la manière dont sont gérées par le Bureau du Parlement les révélations de harcèlement dans le chef du greffier du Parlement, Frédéric Janssens.

Alors, le Bureau du Parlement, a-t-il mal fait son job ? La question se pose d’autant plus que son président, qui est aussi le président du Parlement wallon, c’est Jean-Claude Marcourt, camarade de parti de la ministre.

"Quand le Bureau a été saisi de la plainte, il l’a actée et a écarté le greffier. Je pense que c’est une bonne mesure. Après, c’est le Parlement qui contrôle le Bureau et le gouvernement, dont je fais partie, n’a pas de contrôle sur le Parlement."

Interrogée sur Jean-Claude Marcourt, elle est plus évasive : "Les présidents et présidentes successifs n’ont pas été saisis de plaintes. Il faut voir ce qu’il y avait comme frein pour que le travail soit fait."

Lutter contre le harcèlement, de manière plus large

Mais pour la ministre de l’Emploi, les faits qui se produisent aujourd’hui au Parlement wallon doivent montrer à l’ensemble de la société qu’il faut que les langues se délient face au harcèlement au travail.

"Aujourd’hui, il faut libérer la parole, parce que ce qui se passe au Parlement se produit aussi dans d’autres entreprises. Les travailleurs se sentent angoissés alors qu’une loi contre le harcèlement existe : dès lors, le message que je veux faire passer est que s’il y a une difficulté au travail, le harcèlement reste une infraction punissable d’une amende et d’une peine de prison."

Les aides en Wallonie sont-elles suffisantes ?

A côté de ce sujet d’actualité, nous avons également interrogé la ministre sur les mesures prévues pour aider les citoyens face à la hausse des prix de l’énergie.

Le gouvernement régional va prolonger une série de mesures, va suspendre les expulsions domiciliaires, les coupures de courant. Pourtant, c’est toujours un casse-tête pour les Wallons de trouver une solution efficace face à la hausse des prix que nous vivons. Et, par ailleurs, les aides ne font pas rentrer de l’argent dans les poches du citoyen.

Face à cela, la ministre rappelle les actions de la Région : "Le gouvernement régional a dégagé plus de deux milliards pour aider à financer l’isolation des bâtiments et pour les aides aux ménages. Il y a par exemple le tarif social élargi, octroyé aux sinistrés ou aux indépendants qui bénéficient du droit passerelle, mais qui sera également accessible aux familles en difficulté. Ces familles peuvent se tourner vers le CPAS et demander de bénéficier du tarif social élargir : ce n’est pas un droit automatique, car nous ne savons pas quelle est la situation des familles, mais celles-ci peuvent en faire la demande".

Pourtant, et la ministre le reconnaît, la Région n’a pas beaucoup de leviers face à la crise énergétiques. "L’Union européenne a des leviers mais il ne faut pas se renvoyer la balle. Dans une situation aussi grave, il faut que chacun prenne sa part. Cette part, c’est 70% du prix, qui est le prix de la matière première et qui est fixé par l’Europe : l’Union a son sort en main et a énormément de responsabilités. Je pense qu’elle sera capable de prendre des mesures importantes pour que les prix à la source soient moins importants et pour que l’on puisse capter les surprofits. Il y a 40 milliards de surprofits au niveau européens à aller chercher."

Rappelant que le premier à avoir été chercher la rente nucléaire était Paul Magnette, lorsqu’il était ministre fédéral de l’Energie en 2010, la ministre explique qu’aujourd’hui, "on va chercher 800 millions d’euros sur les rentes du nucléaire. Pourtant, il y a encore des surprofits que le fédéral peut aller chercher et ce, pour un montant estimé à 1 milliard d’euros, selon la CREG (le régulateur fédéral de l’énergie, ndlr)."

Si Christie Morreale attend que ses collègues du fédéral aillent chercher les surprofits, il ne faut pas oublier que ceux-ci même en Wallonie, notamment du côté des gestionnaires des réseaux de distribution de gaz et électricité, dont Ores, le plus grand distributeur wallon.

"Nous avons demandé à Philippe Henry, le ministre de l’Energie wallon, de voir avec le régulateur wallon si on peut aller chercher des surprofits en Wallonie, explique-t-elle. Et s’il y en a, il faut que ceux-ci reviennent dans les poches du citoyen. Il n’est pas question que quelques multinationales s’enrichissent sur le dos des Etats et des gens." Le rapport sur Ores, lui, est attendu pour ce 21 septembre.

D’autres pistes sont aussi à l’étude : une idée qui fait son chemin dans les trois régions c’est qu’il n’y ait pas d’indexation de loyer pour les propriétaires de maisons qui sont des passoires énergétiques. Pourtant, isoler coûte cher et tous les propriétaires ne peuvent se le permettre.

Va-t-on alors les pénaliser, par une telle mesure ? La ministre insiste sur l’existence de "possibilités pour les propriétaires qui louent leur immeuble d’avoir des aides ou des prêts à taux zéro pour investir dans l’isolation. S’ils ne l’ont pas fait, ce qu’il faudrait faire, et c’est une proposition de Christophe Collignon, ministre du Logement, c’est voir si pour ces bâtiments et qu’on est locataire, s’il est juste et normal d’appliquer une indexation de 8%. Le propriétaire qui aura décidé d’investir, lui, il pourra indexer son bien légitimement."

La Wallonie, surendettée, va devoir faire des économies

Depuis 2020, la Région wallonne enchaîne les crises : le coronavirus, les inondations, et, maintenant, la crise énergétique. Dans ce contexte économique, ses finances s’amenuisent et sa dette se creuse. Récemment, la banque Belfius a tiré la sonnette d’alarme, inquiète. Pour elle, il faut que la Région arrive, pour chaque exercice budgétaire, à réduire la voilure de 150 millions d’euros de manière structurelle.

Pour Christie Morreale, ce n’est pas une mission impossible. "Dans le cadre du conclave budgétaire, nous avons fait un exercice vérité où nous sommes allés chercher plusieurs dizaines de millions d’euros pour faire du structurel. Dans les prochains jours, nous allons encore nous voir en conclave pour l’exercice 2023 et nous ferons l’effort demandé par Belfius. C’est la meilleure manière de montrer que la Wallonie a certes fait face à des difficultés incroyables – le coronavirus et les inondations ont provoqué un dérapage 'conjoncturel' de 10 à 11 milliards -, mais qu’elle est gérée de manière responsable."

Pour la ministre, pas question de dire que la Région soit "à l’os". Pour elle, il faudra prendre en compte "les dédoublements, les mesures parfois un peu surestimées du plan de relance, voir quels projets ont été lancés ou pas. Nous devons faire un travail honnête mais qui n’affecte pas le citoyen ni aggrave son pouvoir d’achat."

La quatrième dose en Wallonie : en a-t-on vraiment besoin ?

Dans ce contexte, et alors qu’il faut compenser les dépenses engendrées par la crise du coronavirus et que les chiffres de l’épidémie sont à la baisse, beaucoup se demandent si la campagne de vaccination pour le covid est encore légitime.

Ce lundi, en effet, a débuté la campagne pour la 4e dose, destinée notamment aux plus de 65 ans, au personnel soignant et aux immunodéprimés.

"Je me fie aux scientifiques et aux spécialistes, qui sont tous d’accord sur le fait que la vaccination a sauvé de milliers de vies en Belgique et bien plus dans le monde, en permettant de reprendre une vie normale, estime Christie Morreale. La saisonnalité du covid fait que vers octobre-novembre il y aura un pic. Cela veut dire que les chiffres vont augmenter et qu’il faut se prémunir, notamment les personnes plus fragiles, mais aussi toutes celles et ceux qui le souhaitent."

En revanche, les centres de vaccination sont amenés à disparaître : la ministre de la Santé préconise une "banalisation" du vaccin contre le coronavirus, c’est-à-dire une simplification des procédures.

Selon elle, pour l’instant plus de 20% de la population invitée à se faire vacciner a répondu, et 213 mille Wallonnes et Wallons se sont inscrites ou se sont fait vacciner depuis lundi.

Inscrivez-vous aux newsletters de la RTBF

Info, sport, émissions, cinéma...Découvrez l'offre complète des newsletters de nos thématiques et restez informés de nos contenus

Sur le même sujet

Articles recommandés pour vous