Grève de la faim des sans-papier : la Belgique ne peut pas se permettre une nouvelle crise politique, selon Jean-Marc Nollet

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Par Lavinia Rotili

En ce jour de deuil national, plusieurs présidents de parti ont pris la parole, s'exprimant à la fois sur les conséquences des inondations et sur le dossier de la grève de la faim des sans papiers. Le premier invité était le co-président d’Écolo, Jean-Marc Nollet.

Comme ses collègues, il a exprimé sa compassion vis-à-vis de toutes les victimes "les familles endeuillées, bien entendu, mais aussi toutes les personnes qui ont perdu leur logement, qui ont perdu parfois leur outil de travail, qui ont perdu tout, tout ce que fait une vie par moment. C’est terrible ce qui s’est passé. C’est terrible ! Le constat humain est très lourd, le constat social est évidemment très lourd aussi, et les autorités politiques, quelles qu’elles soient, la Wallonie, le gouvernement fédéral, l’Europe, devront être dans la durée aux côtés des victimes de cette catastrophe."


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Or, c'est exactement la question du soutien financier aux sinistrés qui pose question, alors que de nombreuses personnes ont tout perdu et certaines se sont senties abandonnées par les autorités. Pour le co-président d'Ecolo, il est fondamental de dégager rapidement des moyens supplémentaires pour les sinistrés. "Il le faut et des réunions du gouvernement sont en cours pour qu’on puisse amener à la fois une avance et des aides concrètes, en complément de ce que les assurances devront faire aussi. Le gouvernement wallon s’est déjà réuni avec l’ensemble du secteur des assurances pour que tout puisse aller très vite, parce qu’on sait qu’il y a une énorme solidarité qui s’est dégagée ces jours-ci", a encore affirmé Jean-Marc Nollet, en louant la solidarité des Belges ainsi que l'aide apportée par plusieurs pays européens.

Pour l'écologiste, il s'agit de miser sur un redéploiement des moyens financiers, comme l'ont également prôné Paul Magnette (PS) et Georges-Louis Bouchez (MR). "Une partie des priorités doivent être retravaillées et concentrées sur la gestion de la crise. Sur la gestion à moyen et à long terme, ce que le gouvernement wallon envisage pour intégrer les conséquences de ce genre de catastrophe climatique doit aujourd’hui être mis en application plus vite et plus fort encore que ce qui avait été prévu au moment de l’accord de gouvernement". 


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Bien que le refinancement reste la priorité pour faire face à la tragédie des inondations, Jean-Marc Nollet reconnaît que "Si on reste dans les règles actuelles du fonctionnement européen en termes de finances publiques, c’est impossible" de s'en sortir.

"Mais si ce tabou-là saute, et je pense qu’il doit sauter, nous aurons les moyens pour financer non seulement le soutien immédiat aux familles concernées, mais aussi la reconstruction, le redéploiement, qu’il soit économique, social, en matière de logement, mais qu’il soit aussi culturel. Et donc, moi, j’en appelle aujourd’hui à ce que l’ensemble des responsables, y compris la présidente de la Commission européenne qui s’est rendue sur place, soient conscients non seulement de la gravité de ce qui s’est passé, mais aussi de leur responsabilité pour faire évoluer les règles européennes en la matière", a-t-il prôné. 

Le rôle du changement climatique dans les inondations

Au-delà de la question purement économique, les inondations mettent à l'avant-plan également des questions écologiques qui sont chères depuis longtemps à Ecolo. Le lien entre cette catastrophe naturelle et le changement climatique est, pour Jean-Marc Nollet, indéniable. Prenant acte de l'urgence, il estime que trois sont les solutions à adopter. 

La première c'est "d'anticiper et lutter plus fortement contre le dérèglement climatique. Il y a toute une série de solutions qui sont déjà sur la table au niveau wallon", a-t-il affirmé sans donner davantage de détails. Ensuite, il faut apprendre à mieux gérer ce genre d'événement. Sur ce point, il est largement rejoint par les présidents du PS et du MR, tout comme par les experts

Reste, en troisième position, la gestion de crise. A ce propos, le co-président d'Ecolo n'a pas manqué de lancer une pique au gouvernement Michel: "Le gouvernement fédéral précédent, MR et NV-A, a décidé de se passer de deux tiers des casernes qui sont en mesure, en termes de protection civile, d’intervenir rapidement". Un débat qui avait déjà été soulevé au lendemain de la catastrophe, notamment par le ministre-président wallon Elio Di Rupo sur nos antennesPour Jean-Marc Nollet, ces inondations sont le premier crash-test de cette réforme: "Avec un tiers de personnel en moins je comprends ceux qui, en Wallonie ou en Flandre, sont fâchés parce que la Protection civile n’a pas pu intervenir".


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On ne peut pas se permettre une nouvelle crise politique, pour Jean-Marc Nollet

L'interview de Jean-Marc Nollet a été également l'occasion d'aborder l'autre dossier brûlant au niveau du gouvernement fédéral: la grève de la faim des sans-papiers qui se poursuit depuis plus de 50 jours et à laquelle s'est ajoutée une grève de la soif à partir de vendredi dernier.

Si l’urgence sanitaire est bel et bien là – pour Médecins du Monde, le risque de décès augmente de jour en jour —, les partenaires de la majorité n’arrivent pas à s’entendre sur les modalités de résolution du problème. Suite à la menace des membres PS de la coalition de démissionner ce lundi, qui ont été rejoints par Ecolo sur ce point, le secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration Sammy Mahdi a nommé un médiateur, afin de résoudre le problème.

Alors que certains observateurs craignent une crise politique, Jean-Marc Nollet, tout comme ses partenaires MR et PS, affirme que ce n’est pas le moment d’avoir une crise politique.


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Et se veut presque optimiste: "Je pense que les premiers pas ont été faits hier. Quand le secrétaire d’État désigne un médiateur, quelque chose qui avait été demandé depuis déjà longtemps, et on le comprend, par les représentants des sans-papiers, c’est un pas intéressant. Quand il y a une zone neutre qui est mise en place, c’est un deuxième pas intéressant."

Pourtant, Ecolo et le PS avaient demandé l'intervention directe du Premier ministre. "Il est entré en action ce week-end. Lundi matin, il a organisé des réunions utiles qui nous mènent justement à ces premiers pas." En plus de cela, estime le co-président Ecolo, "il y a d’autres éléments qui sont maintenant sur la table Ensuite, le fait que les communes seront présentes dans ces lieux-là permettra d’accélérer l’analyse et la gestion des dossiers, et donc les décisions qui doivent être à la clé. Mais c’est clair qu’il y a encore quelques éléments de confiance qui doivent pouvoir être avancés."


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Rappelant que Ecolo a fait preuve de discrétion pendant dix jours pour faire avancer les négociations, Jean-Marc Nollet a affirmé que la décision de son parti de sortir du silence n'a pas été faite "de gaieté de cœur", mais qu'elle a permis d'avancer sur le dossier. "Aujourd’hui, j’ose espérer que les derniers pas nécessaires pour rétablir la confiance pourront être établis. Et une confiance, ça se gagne des deux côtés, de part et d’autre", a-t-il conclu sans toutefois confirmer que, sans cela, Ecolo quitterait la majorité.

"Vous savez, il y a des choses qui sont communiquées au Premier ministre et qui auraient dû rester au niveau du Premier ministre", a-t-il simplement commenté, en s'adressant de manière implicite au Parti socialiste. 

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