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Guerre des gangs en Haïti : l’ONU redemande avec insistance l’envoi d’une force internationale

Haïti est "au bord du précipice" à cause de la guerre des gangs

© AFP

Par Françoise Berlaimont avec agences

En Haïti, les violences liées au contrôle de territoires par les gangs ont fait plus de 600 victimes en avril à Port-au-Prince, selon les Nations-Unies. Haïti, gangrené par la violence des gangs, "est suspendu au-dessus du précipice", estimait déjà en février dernier le Haut-commissaire aux droits de l’homme, Volker Türk. "Les Haïtiens ont besoin de soutien et ils en ont besoin maintenant", a-t-il affirmé hier à Genève. Le Haut-commissaire demande l’envoi d’une force internationale.

Des violences de plus en plus atroces

Depuis janvier, ce sont plus de 1200 personnes qui ont été tuées, selon les indications du Bureau de l’ONU en Haïti (BINUH). Désormais, la population cherche de plus en plus à mener des représailles contre ceux qui sont suspectés de faire partie de gangs. En avril, plus de 160 de ceux-ci ont été exécutés ou lynchés par des masses de protestataires. La population a répondu à l’appel de certains responsables politiques de constituer des groupes d’autodéfense.

Les violences s’intensifient et des régions qui étaient auparavant considérées comme sûres sont désormais affectées. Les gangs élargissent aussi leurs atrocités. Enlèvements, violences sexuelles, trafic d’êtres humains, exécutions extrajudiciaires et enrôlement d’enfants dans les groupes armés sont le lot quotidien des habitants de Port au Prince. Ces violences ont été alimentées notamment par le manque d’accès à la nourriture, à l’eau ou aux soins. Il faut une "réponse robuste urgente" plaide encore le Haut-commissaire.

Une force internationale

Les habitants devraient pouvoir s’appuyer sur la police et la justice, mais l’État haïtien n’a pas la capacité de répondre. Volker Türk a donc réitéré son appel à la communauté internationale à déployer le plus rapidement possible une force de soutien sur la question des droits humains. "Les institutions haïtiennes ont besoin d’un soutien immédiat, via le déploiement d’une force de soutien spécialisée et respectueuse des droits humains, avec un plan d’action complet", a-t-il insisté.

La semaine dernière, la nouvelle émissaire de l’ONU dans le pays Maria Isabel Salvador avait souligné que la "terreur" infligée par les gangs à la population se propageait "à un rythme alarmant". Dans ce contexte, l’ONU ne cesse de répéter son appel à envoyer une force armée spécialisée internationale pour aider la police dépassée à rétablir l’ordre. Mais sans résultat jusqu’à présent. Si quelques pays ont indiqué être prêts à y participer, aucun ne semble vouloir en prendre la tête.

Des sanctions peu efficaces

Le Conseil de sécurité de l’ONU se dit "très inquiet" de la détérioration de la situation en Haïti mais a simplement pris "note" de l’appel répété du secrétaire général à envoyer une force internationale. Dans un communiqué le Conseil "condamne dans les termes les plus forts l’augmentation de la violence, les activités criminelles et les violations des droits humains qui sapent la paix, la stabilité et la sécurité pour Haïti et la région". Il appelle à ce que "les responsables de ces crimes abjects soient traduits en justice".

Il souligne également son propre rôle dans le cadre du régime de sanctions mis en place en octobre pour cibler des chefs de gangs. Mais ces sanctions ne visent pour l’instant qu’une personne, Jimmy Cherizier, surnommé "Barbecue". Peu efficaces jusqu’à présent. Le Conseil de sécurité s’inquiète en outre du trafic d’armes vers Haïti qui "alimente" la violence des gangs", et souligne le "besoin urgent d’interdire le transfert d’armes" vers des "acteurs non étatiques engagés ou soutenant les violences des gangs.

En avril dernier, la nouvelle émissaire de l’ONU pour Haïti, Maria Isabel Salvador, a estimé que c’était peut-être le moment pour l’ONU d’être "novatrice", évoquant notamment une force d’intervention qui pourrait être composée de policiers et non de militaires. Mais six mois après l’appel d’Antonio Guterres, le Secrétaire général des Nations Unies, à une force internationale, aucune proposition ne se concrétise.

Aucune élection n’a eu lieu en Haïti depuis 2016. Le Premier ministre Ariel Henry, nommé seulement 48 heures avant l’assassinat du dernier président Jovenel Moïse en juillet 2021, doit faire face à des questions sur sa légitimité. Certains experts jugent impossible de tenir des élections dans de telles conditions d’insécurité.

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