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Guerre en Ukraine : comment le groupe Wagner s’est imposé sur TikTok et a déjà récolté plus d’un milliard de vues

Déclic et des claques

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Le groupe Wagner, des mercenaires privés qui se battent aux côtés des soldats russes, en Ukraine, a imposé sa propagande sur TikTok. Il publie des vidéos d'exécutions glaçantes et d’apologie de la violence envers le peuple ukrainien… récoltant plus d’un milliard de vues, avec l’aide de l’algorithme du réseau social chinois.

Les images font froid dans le dos. Sur le réseau social TikTok, le groupe Wagner publie des vidéos d’exécutions, des liens pour recruter des mercenaires ou qui incitent à la violence envers les Ukrainiens.

Elles datent du mois d’octobre. On y voit entre autres, le corps d’un homme appelé Yevgeny Nuzhin, couché, la tête collée contre un mur en brique. Un soldat brandit une masse… juste avant que la caméra ne s’éteigne. Nuzhin avait été recruté dans une prison russe, par le groupe paramilitaire Wagner.

Une fois sorti, il s’était enfui et avait donné des interviews pour dire qu’il avait déserté Wagner, en soutien à l’Ukraine. Ce soldat a été rattrapé, exécuté et la vidéo de cette exécution a été a posté sur une chaîne Telegram liée à Wagner.

C’est notamment cette vidéo-là qui a été postée sur TikTok, retrouvée par NewsGuard. NewsGuard est une start-up américaine, un organisme privé qui emploie des journalistes et qui a développé une application indiquant le niveau de confiance qu’on peut avoir dans les contenus en ligne. Newsguard a publié ce 1er décembre, un rapport sur la présence de Wagner sur Tiktok, en cherchant à partir de toute une série de hashtags.

Leurs journalistes ont retrouvé 14 versions différentes de cette vidéo d’exécution. Une de ces vidéos, mise en ligne le 12 novembre, aurait été vue plus de 900.000 fois avant que TikTok ne la retire.

Des centaines de vidéo d’apologie de la violence

Ce ne sont pas les seules vidéos liées au groupe Wagner décelées par les analystes de NewsGuard. Ils ont retrouvé en tout 160 vidéos qui font allusion, montrent ou glorifient des actes de violence perpétrés par le groupe Wagner.

Et en plus de cela, 500 vidéos de clips musicaux qui ne contiennent pas de violence à proprement parler… mais qui incitent à "tuer les Ukrainiens, car ils sont des 'nazis'", rhétorique que l’on reconnaît.

Cela ne paraît pas énorme quelques centaines de vidéos, mais d’après Newsguard, ces vidéos ont été visionnées plus d’un milliard de fois.

Visiblement, l’algorithme de TikTok pousserait les utilisateurs vers ces contenus violents du groupe Wagner. Par exemple, lorsqu’un journaliste de NewsGuard a tapé le terme 'Wagner' dans la barre de recherche de TikTok, directement, la plateforme lui a suggéré de rechercher 'Wagner exécution' et 'Wagner masse'.

Ce dernier terme n’est pas lié uniquement à la vidéo d’exécution de Nuzhin. Il y a d’autres vidéos où des masses sont utilisées, notamment en 2017 en Syrie.

On voit aujourd’hui des utilisateurs de TikTok prendre la pose que le bourreau prenait sur cette vidéo de 2017, poser avec une masse. En fait ces vidéos d’une extrême violence deviennent des memes. Et parce qu’elles créent un fort engagement des utilisateurs grâce au nombre de vues et de commentaires, de manière automatique, TikTok les viralise.

Il y a aussi des morceaux de musique qui reviennent derrière ces vidéos qui sont étiquetées Wagner.

Le rythme des publications est quant à lui soutenu. Toujours d’après NewsGuard, des "dizaines de nouvelles vidéos glorifiant le groupe Wagner" seraient publiées chaque jour sur TikTok.

Contourner la politique de publication pour recruter de nouveaux mercenaires

Parmi les contenus proposés, toutes ne montrent pas que des contenus violents, ce qui leur permet de circonvenir aux règles de publication du réseau social chinois.

Il y a par exemple une vidéo produite par RT, un média russe, qui diffusait un temps en français, et qui est titrée Contrat avec la mère patrie. Des extraits de cette vidéo montrent des soldats qui mènent une guerre à l’esthétique de jeu vidéo.

Une vidéo comme celle-là, elle ne contrevient pas à la politique de TikTok, qui ne peut pas retirer toutes ces vidéos. Or, parmi ces vidéos, certaines contiennent des liens qui renvoient vers la chaîne Telegram de Wagner ou des sites extérieurs à TikTok où le groupe poste des annonces pour recruter des mercenaires.

L’enjeu se situe aussi à ce niveau : en parvenant à rendre la guerre tiktokable, c’est la possibilité de trouver nouvelles recrues jeunes, à l’étranger, hors Russie.

D’organisation militaire secrète à outil de propagande russe

Une percée sur les réseaux sociaux qui place une nouvelle fois le groupe Wagner sous le feu des projecteurs. Jusqu’à il y a peu, c’était une organisation paramilitaire secrète. Aujourd’hui, il est devenu un groupe qui joue un rôle de plus en plus important dans la campagne de propagande pro-guerre de la Russie. Il y aurait un millier d’hommes de Wagner en Ukraine.

Et c’est intéressant de noter que le groupe Wagner a été fondé par un homme d’affaires proche de Poutine, Evgueni Prigojine, qui jusqu’à récemment niait tout lien avec Wagner et qui a finalement reconnu être à sa tête.

C’est lui qui est aussi à la tête de l’Internet research Agency, qui est l’organisation à l’origine de grandes manœuvres de désinformation en ligne.

La mobilisation partielle en Russie, Moscou, 10 octobre 2022.
La mobilisation partielle en Russie, Moscou, 10 octobre 2022. © Stringer/Anadolu Agency via Getty Images

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