Un an de guerre en Ukraine

Guerre en Ukraine : l’aide matérielle envoyée est montée en puissance en un an, "une question de survie" pour l’Ukraine

Des membres d’une équipe de chars ukrainiens préparent leur char pour une opération dans la région de Donetsk, le 22 février 2023, dans le cadre de l’invasion militaire de la Russie en Ukraine.

© ANATOLII STEPANOV / AFP

"Je n’ai pas besoin d’un taxi, envoyez-moi plutôt des armes". Depuis le début du conflit, l’Ukraine et son président Volodymyr Zelensky, demandent de "l’aide matérielle" à l’Occident. Entendez par-là, des armes. Des lance-missiles portatifs au début du conflit aux chars en janvier 2023, cette aide est montée en puissance. Un soutien indispensable si l’Ukraine veut résister mais qui ouvre débat sur la question de la paix.

Les lance-missiles antichars

Un instructeur des forces armées britanniques tient un système antichar Javelin alors qu’il s’entretient avec des recrues ukrainiennes au cours d’une formation au combat de cinq semaines avec les forces armées britanniques près de Durrington, dans le sud
Un instructeur des forces armées britanniques tient un système antichar Javelin alors qu’il s’entretient avec des recrues ukrainiennes au cours d’une formation au combat de cinq semaines avec les forces armées britanniques près de Durrington, dans le sud © Daniel LEAL / AFP

Précis, transportables et faciles à utiliser, les lance-missiles antichars portatifs Javelin venant des Etats-Unis et N-Law donnés par le Royaume-Uni ont permis aux Ukrainiens de se défendre facilement dans les premiers jours du conflit. Au moment où cette longue colonne de chars descend depuis la Biélorussie pour atteindre les faubourgs de Kiev par exemple, les troupes russes défendent mal leurs flancs. C’est dans ce genre de situation que les Ukrainiens peuvent les utiliser.

Les canons autotractés

Sur cette photo d’archives prise le 28 décembre 2022, des militaires ukrainiens tirent avec un obusier automoteur CAESAR en direction des positions russes dans l’est de l’Ukraine.
Sur cette photo d’archives prise le 28 décembre 2022, des militaires ukrainiens tirent avec un obusier automoteur CAESAR en direction des positions russes dans l’est de l’Ukraine. © Sameer Al-DOUMY / AFP

De plus longue portée, les canons posés sur un camion permettent une fois de plus aux Ukrainiens d’être agiles : ils se déplacent rapidement sur route et dans les champs, sans être eux-mêmes touchés. Les Français livrent les Caesars dès le printemps 2022. Les Américains, les Himars, juste avant l’été. Cela va permettre aux Ukrainiens de tirer loin derrière la ligne de front, notamment durant l’été. Cette aide matérielle, couplée aux renseignements reçus grâce aux Occidentaux permet également de toucher des points stratégiques russes.

Les défenses antiaériennes

Des modules de lancement Patriot montés sur des M983 HEMTT faisant partie du système de missiles sol-air (SAM) Patriot MIM-104 fabriqué aux États-Unis sont photographiés dans un champ ouvert le 18 février 2023 à Zamosc, en Pologne.
Des modules de lancement Patriot montés sur des M983 HEMTT faisant partie du système de missiles sol-air (SAM) Patriot MIM-104 fabriqué aux États-Unis sont photographiés dans un champ ouvert le 18 février 2023 à Zamosc, en Pologne. © Omar Marques/Getty Images

Pour protéger ses villes, l’Ukraine utilise différents systèmes de défenses antiaériennes. L’idée est de les cumuler pour que chacune d’entre elles protège un rayon différent autour de la ville. Parmi ces défenses antiaériennes, les Patriots envoyés par les Américains en décembre 2022. Mobile car il est transporté sur des camions, il permet d’intercepter des avions à haute altitude ainsi que des missiles balistiques tactiques.

Les chars

Des soldats polonais et ukrainiens sur un char Leopard 2 A4 lors d’un entraînement à la base militaire de Swietoszow, dans l’ouest de la Pologne, le 13 février 2023.
Des soldats polonais et ukrainiens sur un char Leopard 2 A4 lors d’un entraînement à la base militaire de Swietoszow, dans l’ouest de la Pologne, le 13 février 2023. © Wojtek RADWANSKI / AFP

Dernière aide promise en janvier 2023 : les chars Leopard 2 allemands, Abrams américains et Challenger britanniques. Grâce à leurs chenilles, ils permettent de se déplacer dans la boue, la fameuse "raspoutitsa" due au dégel du printemps en Ukraine. Ils sont aussi plus puissants, plus précis et plus faciles d’utilisation que les chars soviétiques utilisés par les Ukrainiens jusqu’ici. Quelques défauts tout de même : les munitions ne sont pas les mêmes dans tous les chars et ils ne roulent pas tous au même carburant. Si l’armée ukrainienne s’est montrée flexible et s’adapte au nouveau matériel depuis le début du conflit, les chars seront plus difficiles à maîtriser.

Ce matériel va donc demander entretien, réparations et munitions de ceux qui les ont fournis. Occident et Ukraine sont donc bel et bien reliés dans ce conflit. Ce qui amène à la question…

Y aurait-il une guerre entre Occident et Russie via l’Ukraine ?

D’abord, cette aide matérielle est cruciale si l’Ukraine veut survivre, selon Coline Maestracci, doctorante à l’ULB et spécialiste de l’Ukraine invitée dans l’émission Déclic. "Pour les Ukrainiens, la résistance militaire n’est pas une question de choix, c’est une question de survie. Si l’armée ukrainienne arrête de se battre aujourd’hui, c’est la fin de l’Ukraine. La détermination est visible depuis 2014 et encore plus depuis 2022."

Pas une question de choix, c’est une question de survie

La question de savoir si l’Occident mène une guerre contre la Russie sur le territoire ukrainien via l’armée de ce pays serait donc un renversement de la situation. Une victimisation utilisée par le président russe Vladimir Poutine, comme lors de son discours du 21 février 2023.

La responsabilité incombe aux élites occidentales

"La responsabilité de l’alimentation du conflit ukrainien, de son escalade et du nombre de victime incombe entièrement aux élites occidentales", a déclaré le président russe. "Et bien sûr, à l’actuel régime de Kiev pour qui le peuple ukrainien est essentiellement un étranger. Le régime ukrainien actuel ne sert pas ses intérêts nationaux mais ceux de pays tiers."

Néanmoins, la question reste légitime, répond Christophe Wasinski, professeur en relations Internationales à l’ULB, expert dans les domaines de légitimation de la guerre et des questions d’armement et de sécurité. Mais il y répond directement : non.

"Formellement, en termes de droit international, les États de l’OTAN et de l’Union européenne ne sont pas en guerre directement contre la Russie. Mais il est vrai que certaines personnes, ici en Europe de l’Ouest considèrent que ces fournitures d’armes ne sont pas uniquement destinées à repousser une attaque, que c’est plus que cela. Que cela sert également à affaiblir la Russie."

Manque d’initiatives diplomatiques

De là à parler d’escalade, les différents analystes invités s’accordent à dire que non et parlent plutôt d’une guerre d’usure. "On nourrit une continuité du conflit", continue Christophe Wasinski. "Je m’interroge toujours sur le manque d’initiatives diplomatiques. J’entends peu d’acteurs dire qu’il est impératif d’aller à la table des négociations et faire tout pour arrêter le conflit." La question des armes occulterait donc la volonté de trouver la paix ?

Nicolas Gosset, chercheur à l’Institut royal supérieur de défense (IRSD), soupire sur les ondes de Matin première à cette idée. "Sur le fond, je comprends mais je trouve cela irréaliste. L’assemblée des Nations-Unies a voté (le 23 février 2023, nldr). La résolution soumise à tous les Etats de l’ONU était de voter pour une paix juste durable et globale : 140 pays ont voté en faveur, 30 pays se sont abstenus. La Russie a ligué une quinzaine de pays […]. " Un vote qui n’a pas beaucoup changé depuis un an.

"Il me semble qu’il n’y ait pas beaucoup de place pour la paix dans ce qui est proposé", continue Nicolas Gosset. "Soyons réalistes, interrompre le soutien occidental à l’Ukraine, c’est la garantie de son effondrement."

Guerre en Ukraine : sujet JT du 24/02/2023

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