Guerre en Ukraine

Guerre en Ukraine : le moment des négociations est-il arrivé ?

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Ces dernières semaines, plusieurs personnalités américaines ont fait allusion à la possibilité de trouver une solution diplomatique au conflit en Ukraine. La dernière en date vient du chef d’Etat-major américain, le général Mark A. Milley. Sommes-nous à un tournant du conflit ? La réponse est plus nuancée, selon Nicolas Gosset, chercheur au Centre d’études de sécurité et de défense.

Alors que l’Ukraine fête la reprise de Kherson, le général Mark A. Milley a affirmé, lors de réunions internes aux autorités américaines, que les Ukrainiens avaient désormais obtenu tout ce qu’ils pouvaient espérer avant l’arrivée de l’hiver. Et que le temps était venu de réfléchir aux négociations, selon le New York Times.

Dans un discours prononcé à New York, il a affirmé : "Saisissez le moment", et étayé ensuite ses déclarations dans une interview sur CNBC : "Nous avons vu l’armée ukrainienne combattre l’armée russe jusqu’à l’immobilisation. Maintenant, ce que l’avenir nous réserve reste incertain, mais nous croyons qu’il y a des possibilités pour des solutions diplomatiques."

Le chef d’Etat-major américain, le général Mark A. Milley
Le chef d’Etat-major américain, le général Mark A. Milley © AFP or licensors

La Maison Blanche a pris ses distances

La Maison Blanche a tout de suite pris ses distances sur ces propos, affirmant qu’elle ne fait aucune pression sur l’Ukraine et qu’elle continue de la soutenir. Pas plus tard que cette semaine, Washington a annoncé une nouvelle tranche d’aide militaire de 400 millions de dollars à Kiev. Il est donc à exclure, pour le chercheur, que le problème soit de nature économique.

Et bien que tous soient conscients que la guerre ne pourra pas durer pour toujours, "aucune chancellerie occidentale ne prendrait le risque de négocier sur le dos de l’Ukraine. Et quand bien même, si on négociait maintenant, le prix payé à la fois par l’Ukraine et par les pays occidentaux et l’Union européenne en particulier, serait trop grand", commente le spécialiste.

Un "appel du pied" à la Russie

"Il faut distinguer les discours tenus par l’administration américaine avant et après les élections de mi-mandat. Avant les mid-terms, le camp Biden a cherché à faire un pas vers l’aile gauche de son parti des Démocrates, qui est contraire à la guerre et voudrait une solution pacifique. En même temps, les Etats-Unis n’ont pas réellement changé leur attitude face à l’Ukraine", explique Nicolas Gosset.

La situation est différente aujourd’hui, après le vote. "J’ai interprété la prise de parole du chef d’Etat-major comme un message à la fois aux Ukrainiens et aux Russes que la guerre ne pourra pas être gagnée uniquement par les moyens militaires. La déclaration m’a même semblé un appel du pied à la Russie, pour qu’elle adoucisse ses positions maximalistes, estime celui qui est aussi attaché de recherche au Centre d’études de la coopération internationale et du développement (CECID) de l’ULB.

"J’y vois également la tentative de tester si une réouverture des canaux diplomatiques serait possible. Le général voulait sans doute faire comprendre qu’il n’y aura pas d’issue fondamentale du conflit sans négociation."

Pourtant, selon Nicolas Gosset, les deux parties en cause semblent encore très loin de la possibilité de négocier.

La Russie a toujours campé sur des positions maximalistes : autrement dit, il n’y aura pas de négociation tant que l’Ukraine n’aura pas capitulé. Et elle ne semble pas infléchir à cet égard. D’autre part, l’Ukraine est bien déterminée à combattre. "Probablement, même si les Etats-Unis et l’Union européenne cessaient de l’aider, l’Ukraine continuerait de se battre. En plus de cela, quand on regarde la situation dans son ensemble, les récents développements semblent plus avantageux pour Kiev."

Entre le recul russe – lent, mais assez constant – depuis le mois d’août et la reprise de Kherson, l’Ukraine voit l’espoir renaître et estime que ce n’est pas le moment de s’asseoir à la table des négociations.

Sans compter qu’il y a quelques semaines, le président ukrainien Zelensky a affirmé qu’aucune négociation n’aurait été possible tant que Vladimir Poutine sera au pouvoir. "C’est toujours la réalité du terrain qui induit la réalité politique, et pas l’inverse", conclut l’expert.

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