Santé & Bien-être

Hôpitaux : afflux aux urgences et forte activité aux soins intensifs, le check-up des difficultés avec le chef du Grand Hôpital de Charleroi

L'invité dans l'actu: Manfredi VENTURA

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Manfredi Ventura est le directeur médical du Grand Hôpital de Charleroi. Avec Anne-Sophie Bruyndonckx, ils sont revenus sur la situation difficile observée dans certains secteurs hospitaliers, dans certaines unités. Le directeur du Grand Hôpital parle plutôt d’" activité tendue " : " il n’y a pas de tension psychologique. Les équipes sont là, souriantes et prêtes à accueillir les patients. Le seul problème, c’est qu’il y a un afflux important, depuis plusieurs semaines maintenant, aux soins intensifs et aux urgences, avec des difficultés pour accueillir tous les patients. En soins intensifs notamment, ça nécessite parfois de reporter certaines interventions chirurgicales qui ne sont pas immédiatement nécessaires, mais qui sont consommatrices de ce type de lits, puisqu’on prend bien sûr les patients les plus prioritaires d’abord ".

Patients "fast-food"

Il y a donc beaucoup plus de monde du côté des soins intensifs. Essentiellement des pathologies graves ou des interventions sévères. Il n’y a pas d’explication à proprement parler, souligne Manfredi Ventura. Quant aux urgences, " on voit également des patients qui arrivent avec des pathologies plus graves et il y a aussi toute une série de cas moins lourds, peut-être parce que ce sont des patients qui ont attendu plus longtemps pour être soignés ".

Une période de Covid où il a fallu reporter certaines opérations et certaines consultations. Ce n’est peut-être pas la seule explication pour Manfredi Ventura : " c’est peut-être aussi une modification des mentalités. Les gens se font peut-être moins bien suivre de façon préventive, et veulent immédiatement consommer des soins dès qu’ils ont quelque chose qui ne va pas et attendent parfois la dernière minute ". Et de paraphraser un médecin généraliste qui parle de " patients fast-foods, Amazon ou McDonald ", des patients " qui veulent tout de suite être soignés et qui demandent un service alors qu’il faudrait probablement continuer à être soigné de façon régulière, allez assez régulièrement chez son généraliste et ne pas y aller en dernière minute ou arriver aux urgences ".

(Les patients) veulent immédiatement consommer des soins dès qu’ils ont quelque chose qui ne va pas

 

En Belgique, il existe cependant des situations de saturation dans certains hôpitaux. Par exemple du côté de Liège. Une situation que Charleroi a connu ces derniers temps. " On a eu des saturations dans certains services, bien entendu en pédiatrie avec l’épidémie de bronchiolite, mais également en gériatrie avec beaucoup d’infections respiratoires. Ce phénomène-là commence actuellement à être en retrait, mais il continue à y avoir beaucoup de patients, et notamment beaucoup d’arrivées aux urgences, avec des patients qui n’y ont parfois pas leur place " explique le directeur du Grand Hôpital carolo.

Engorgements

Des urgences sous pression qu’il faudrait soulager… " Il faut d’abord, dans la mesure du possible, aller chez son médecin traitant. Et pour rencontrer régulièrement mes confrères généralistes, il faut savoir que la première ligne est aussi débordée et je pense qu’il faut probablement concevoir un nouveau modèle de soins. La mentalité des patients évolue et il faut donc – et c’est d’ailleurs ce qu’on est en train de faire — une concertation vaste entre la première ligne et les hôpitaux, pour essayer de trouver des solutions novatrices pour mieux orienter les patients dès le départ et éviter des engorgements soit dans une filière, soit dans l’autre ".

Il faut probablement concevoir un nouveau modèle de soins

Situation tendue aux soins intensifs et aux urgences

Mais cette situation pourrait-elle être cyclique ? En plein hiver, il y a peut-être plus de malades et plus de consultations demandées ? Ou bien est-on vraiment dans une dégradation des conditions de travail ou de soins due à ce " nouveau type " de consommation, un peu " fast-food " des soins de santé ?

La plupart des hôpitaux continuent à pouvoir bien accueillir les patients

" Tous les ans, évidemment, à cette période-ci, la situation se tend et il y a davantage d’infections respiratoires. Ce n’est pas anormal, même si on avait un peu perdu cette notion de grippe, de virus respiratoire syncytial et de bronchiolite avec le Covid, puisqu’il y avait le port du masque et les différentes mesures d’hygiène. Mais maintenant, il y a un phénomène qui est quand même inédit, c’est cette permanence de lits occupés aux soins intensifs depuis plusieurs semaines et ce très important afflux de patients aux urgences. Je suis également étonné d’entendre mes confrères de la médecine générale qui disent qu’eux-mêmes sont chroniquement débordés et n’arrivent pas à ou ont des difficultés à assumer leurs tâches quotidiennes ". Et Manfredi Ventura de rassurer néanmoins : " la plupart des hôpitaux continuent à pouvoir bien accueillir les patients. On a évidemment à cœur de le faire dans les meilleures conditions de sécurité et de qualité, et là il ne faut rien négliger. Mais je pense qu’il faut réfléchir à une façon plus appropriée de répondre à une demande qui change ".

Appel aux jeunes

Quant au moral des équipes, " les conditions de travail sont difficiles, mais il ne faut pas non plus noircir le tableau. Tout d’abord parce que je pense qu’on a affaire à des professionnels très compétents. Effectivement, il y a un absentéisme et il y a des gens qui sont fatigués ". Et le professionnel carolo de lancer un appel aux jeunes " pour qu’ils rejoignent ces belles professions que sont les professions de soins, que ce soit aides-soignants, infirmiers ou médecins ". " Je pense qu’en ayant un tout petit peu plus de bras, la situation peut redevenir très agréable face à des métiers qui ne sont quand même pas non plus des métiers horribles. Il y a vraiment un réel plus de pratiquer ces métiers, un service aux patients et la possibilité de vraiment œuvrer pour le bien collectif. Ça, je pense qu’on ne le trouve pas dans tous les métiers. Il est clair que certaines conditions de travail doivent être revalorisées, mais je pense surtout qu’il faut garder le moral et avoir une attitude positive par rapport au métier parce que l’important est de bien accueillir les patients ".

Inscrivez-vous à la newsletter Tendance

Mode, beauté, recettes, trucs et astuces au menu de la newsletter hebdomadaire du site Tendance de la RTBF.

Articles recommandés pour vous