À l’université, elle se lance dans des études d’histoire de l’art. Une fois diplômée, entrepreneuse dans l’âme, elle crée une première entreprise de communication culturelle avec deux amies. Le succès est au rendez-vous et le rythme de travail extrêmement soutenu.
Alors qu’elle a déjà une fille et qu’elle s’apprête à mettre au monde ses deux jumelles, elle doit faire face à un gros coup dur professionnel. Stressée et fatiguée par la situation, elle revend ses parts. "J’avais besoin de prendre du temps pour moi." Alors qu’elle n’y connait encore rien, elle décide de s’inscrire à une formation en menuiserie au Forem. "J’avais déjà voulu faire de la menuiserie en sortant d’humanité, mais pour différentes raisons, j’ai changé de parcours."
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Mère de trois enfants en bas âge et soutenue par son compagnon, au début de la trentaine, elle démarre une nouvelle vie. Lors de cet apprentissage d’un an, elle réalise différents stages. À la fin du cursus, très rapidement, en 1997, elle lance son entreprise de menuiserie. Elle s’associe à Monsieur Green (qui quittera le projet en 2000) et c’est comme ça que nait Wouters et Green. "Un peu tête brulée, j’ai acheté des machines et je me suis dit ‘j’y vais’. J’ai engagé le premier ouvrier Robert, puis le deuxième Pierre, le troisième..."
Au mur de son bureau : une belle photo de toute l’équipe composée de six personnes. Parmi les ouvriers, une ouvrière. Tous·tes sont là depuis plusieurs années. "Robert était un excellent ouvrier. Il est resté des années, il est aujourd’hui à la retraite, mais nous a toutes et tous formés. Grâce à lui, on a une super technique !"
Où sont les menuisières ?
Femmes et menuiserie, l’association est plutôt rare. "Dans les années 90, il y avait très peu de femmes dans la menuiserie. Aujourd’hui, nous ne sommes toujours pas très nombreuses..." Quid du sexisme dans ce monde masculin ? Véronique Wouters explique n’avoir jamais connu de véritables problèmes, sauf sur un gros chantier au début de sa carrière. "Là c’était incroyable, les ouvriers venaient vraiment observer LA femme qui travaillait !", s’exclame-t-elle.
Pour la fête des Mères, mes filles me dessinaient derrière mon établi avec des crolles, des grandes boucles d’oreilles et un marteau...
"Sinon c’est plutôt intéressant : comme je suis une des seules femmes, tout le monde se souvient de moi, que ce soit les fournisseurs ou les clients." Elle se dit optimiste quant à la féminisation du secteur. "Je suis certaine qu’il y aura de plus en plus de femmes." Selon elle, chaque année de futures menuisières se forment, mais c’est au niveau des entreprises que les stéréotypes ont la dent dure. Certains employeurs sexistes refuseraient leurs candidatures. C’est également le témoignage qu’a fait Océane, 19 ans, au journal l’Avenir dans un article titré : "Océane se voit refuser un stage en menuiserie à Verviers, car elle est une fille."
Véronique Wouters reçoit régulièrement des femmes qui lui partagent leurs projets. Elle les écoute, les conseille, les oriente. "C’est important de sortir du rêve. C’est un métier où il faut du courage." Cette cheffe d’entreprise féministe se dit attentive à la parité des salaires, à la prise des congés de paternité comme ceux de maternité. "Pour moi, l’humain c’est très important. On fait tous attention l’un à l’autre."
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C'est sûr, la menuisière est un rôle modèle inspirant. "Pour la fête des Mères, mes filles me dessinaient derrière mon établi avec des crolles, des grandes boucles d’oreilles et un marteau...", rigole-t-elle.
De la poussière, du bruit, du bois
Il est important de ne pas glamouriser le tableau : la menuiserie est un métier dur et fatigant. "J’ai beaucoup de force physique et les ouvriers m’ont beaucoup aidée. Ce qui est plus fastidieux c’est la saleté, mais on s’habille différemment pour travailler, il faut juste s’habituer."