Economie

Inflation : il faut plus de transparence sur les prix alimentaires

Le marché matinal

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Par Maxime Paquay (L'Echo), avec A.P. via

C’est du jamais vu : l’inflation alimentaire atteint des sommets en Belgique : +20% selon les chiffres de Test-Achats sortis cette semaine. Ce sont surtout les fruits et les légumes qui tirent le prix des aliments à la hausse.

Alors que ces dernières décennies, la part du portefeuille des ménages dédiée à l’assiette n’a cessé de baisser, le coup de chaud de ces derniers mois est spectaculaire. Selon une étude d’HelloSafe, c’est désormais plus de 30% du budget des familles belges qui est consacré à l’achat de nourriture.

Les raisons avancées sont toujours un peu les mêmes ces derniers mois : un mélange de prix des matières premières et de l’énergie en hausse, de l’augmentation des coûts du transport, de l’indexation des salaires, et le petit dernier : une mauvaise météo, plus froide qu’à l’accoutumée, dans certains pays du Sud, qui aurait amoindri les rendements.

Les arguments invoqués semblent logiques et rationnels. Mais ils manquent cruellement de précision. Comment se découpe l’augmentation actuelle des prix ? Quel facteur joue quel rôle concret dans l’augmentation des coûts ou dans une baisse de rendement ? Est-ce vraiment un coup de froid à ce point exceptionnel en Espagne ou au Maroc qui fait grimper de 40% le prix de certains légumes ? Personne ne sait vraiment.

Et c’est problématique parce que, à écouter tout le monde, nous serions en train de subir une conjoncture effroyable dans laquelle tout le monde serait perdant. A lire les producteurs, à écouter la grande distribution, à entendre les associations de consommateurs, tout le monde serait en train de se serrer la ceinture.

Et ce n’est pas le cas. On le sait, une entreprise n’est pas l’autre. Et quand de grands groupes de l’industrie agroalimentaire annoncent des profits trimestriels records en pleine crise énergétique, certains patrons de la grande distribution grincent d’ailleurs des dents.

A écouter les producteurs, la grande distribution, les associations de consommateurs, tout le monde serait en train de se serrer la ceinture. Et ce n’est pas le cas.
 


Signe que là où certains acteurs sont à la peine, d’autres se permettent opportunément d’augmenter leurs marges, d’augmenter plus vite leurs prix de vente qu’ils ne voient monter leurs coûts de production. Or, si chaque entreprise de la chaîne essaie de se protéger au détriment des autres, cela finit forcément par augmenter l’inflation.

Est-ce ce qui est en train de se passer aujourd’hui ? Ce qui est certain, c’est que, faute de transparence sur les prix, il y a heureusement la concurrence, qui sert en quelque sorte de garde-fou au consommateur.

Mais qui peut garantir que cette concurrence suffira encore longtemps ?
Même la Banque Centrale Européenne le reconnaît désormais : dans de nombreux pays et de nombreux secteurs, la croissance des marges des entreprises contribue plus à l’inflation que l’augmentation des salaires, pourtant redoutée par de si nombreux économistes. Ces marges éventuellement excessives, où se font-elles, à quel niveau d’intermédiaire ? On reste sur sa faim, faute, à nouveau, de données suffisantes.

Mais, pour revenir à l’alimentaire, c’est problématique, non seulement pour le consommateur qui se retrouve incapable de savoir ce qui influence réellement les prix; mais aussi pour de nombreuses entreprises, que cette opacité généralisée empêche de dégager une marge acceptable, faute de pouvoir négocier un prix convenable.
L’agacement règne d’ailleurs aujourd’hui entre agriculteurs, producteurs et distributeurs.

Comment dès lors sortir de cette situation ? Plutôt qu’envisager un blocage des prix, comme le prône Test-Achats; mesure tentante, mais fort peu significative et par nature destinée à un échantillon limité de produits, ne faudrait-il pas obliger les différents acteurs de la chaîne alimentaire à se parler, tous ensemble, pour lever la méfiance généralisée dans le secteur ? Et imposer un minimum de transparence sur les dynamiques à l’œuvre derrière les prix imprimés sur les étiquettes.

Parce que plus de transparence dans ce qui fait le prix final, dans le caddie, cela permettrait à la fois de mieux protéger le consommateur, mais aussi de répartir beaucoup plus équitablement les marges dans toute la filière alimentaire.

Et d’avoir, en somme, un marché, qui fonctionne mieux.

Inscrivez-vous aux newsletters de la RTBF

Info, sport, émissions, cinéma... Découvrez l'offre complète des newsletters de nos thématiques et restez informés de nos contenus

Sur le même sujet

Articles recommandés pour vous