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Inondations : le gouvernement wallon et les assureurs se sont accordés sur l’indemnisation des sinistrés

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Par J-Fr. Noulet, avec E. Groutars et C. Defoy

Les négociations entre le gouvernement wallon et Assuralia, l’union professionnelle des entreprises d’assurances ont abouti à un accord. Après les importantes inondations survenues entre le 14 et le 16 juillet dernier, il s’agissait de trouver le moyen d’indemniser les personnes qui ont souscrit une assurance incendie étendue à d’autres dégâts comme les inondations. Avec le système en place jusqu’à présent, l’intervention des assureurs aurait été limitée à 350 millions d’euros pour l’ensemble des dégâts assurés. L’accord survenu entre Assuralia et le gouvernement wallon prévoit que les assureurs feront un effort financier supplémentaire. Le gouvernement wallon, lui, paiera le surplus des indemnisations via le Fonds des Calamités en empruntant l’argent aux assureurs.

L’intervention "limitée" des assureurs était insuffisante

Dans le cas de catastrophes naturelles, comme les inondations, une loi fédérale fixe le cadre d’intervention des compagnies d’assurances. Cette loi limite les indemnités des assureurs en cas de catastrophe naturelle pour ce qui concerne les risques simples, comme les incendies ou les inondations. Ce système a été mis en place au début des années 2000 pour éviter la banqueroute des compagnies d’assurances en cas d’énorme catastrophe naturelle. Grosso modo, les compagnies d’assurances indemnisent les assurés grâce à l’argent de l’ensemble des primes d’assurances payées par tous les assurés. En cas de catastrophe de grande ampleur, il serait impossible aux assureurs de payer toute la facture des dégâts. Le total des primes de toutes les personnes assurées contre les incendies et les inondations ne suffirait pas. La législation a donc plafonné le montant total des interventions des assurances lors d’un sinistre.

Pour la Wallonie, l’intervention des assureurs aurait été limitée à un total de 350 millions d’euros pour indemniser les dégâts causés à l’ensemble des habitations et des petits commerces touchés par les intempéries du 14 au 16 juillet.


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Cette intervention légale aurait été largement inférieure aux dommages subis par les sinistrés concernés. On estime que la catastrophe naturelle des inondations exceptionnelles du 14 au 16 juillet a occasionné des dégâts pour un montant compris entre 1,3 et 1,7 milliard d’euros. Bien au-delà de ce que les assureurs doivent légalement payer en indemnisations à leurs clients.

Nouvelle répartition des efforts entre assureurs et gouvernement wallon

Vu l’ampleur de la catastrophe, le gouvernement wallon et les assureurs ont décidé de partager les efforts financiers pour que les personnes sinistrées concernées puissent être indemnisées à 100%, et ce, conformément aux clauses de leurs polices d’assurance.

Pour y parvenir, les assureurs dépasseront les limites d’intervention financière prévue par la Loi fédérale (350 millions d’euros pour la Wallonie) pour atteindre un peu plus de 590 millions d’euros. "Les assureurs prennent leur responsabilité sociétale et doublent leurs efforts", souligne Hilde Vernaillen, Présidente d’Assuralia.


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Comme les dommages totaux des personnes ayant souscrits à une simple couverture d’assurance pourraient grimper à 1,7 milliard d’euros, l’intervention des assureurs, même portée à 590 millions d’euros ne suffira pas.

Afin d’éviter aux sinistrés d’être dans la totale impossibilité de remettre en état leur immeuble alors qu’ils étaient assurés, la Région wallonne prendra en charge la différence entre l’intervention des assureurs et les montants nécessaires pour indemniser les sinistrés à 100%. Le ministre-président wallon, Elio Di Rupo se dit "soulagé qu’un accord ait pu être trouvé entre le gouvernement et les assureurs" et qu’il soit possible "d’indemniser pleinement les personnes sinistrées assurées". Il s’agit, selon lui, de la part du gouvernement wallon d’un "un effort financier maximum pour soulager les personnes sinistrées".

La Région wallonne s’endette auprès des assureurs

Pour payer sa part, entre les 590 millions dégagés par les assureurs et la facture totale de, peut-être, 1,7 milliard d’euros, le gouvernement wallon va emprunter les fonds aux compagnies d’assurances. "C’est en fait un prêt à la Région pour leur intervention, qu’ils rembourseront dans le futur, sur plusieurs années", confie Hilde Vernaillen, Présidente d’Assuralia. Assuralia présente cette solution comme "équilibrée", alors que la Région aura besoin de fonds pour indemniser les assurés sinistrés, mais aussi pour reconstruire toutes les infrastructures détruites. C’est une solution "pour éviter que la Région wallonne ne soit dans d’énormes difficultés financières", explique Elio Di Rupo, le ministre-président wallon. Selon le communiqué diffusé par le gouvernement wallon et Assuralia en fin de matinée, il s’agit d’un emprunt "à taux zéro". Pour Jean-Luc Crucke, Ministre du Budget, "La situation est tellement dramatique que les moyens financiers dégagés se justifient pleinement, d’autant que le prêt au bénéfice de la Wallonie en faveur des sinistrés s’effectuera à un taux 0% ".

A ce stade, il est encore possible que les assureurs prêtent d’avantage d’argent à la Région Wallonne. Les assureurs ont en effet été approchés pour intervenir dans le financement de la reconstruction des infrastructures wallonnes détruites lors des intempéries. Dans le protocole d’accord conclu entre le gouvernement wallon et les assureurs, un article prévoit "que les assureurs examinent cette possibilité", confie Elio Di Rupo.

Les assureurs seront les interlocuteurs centraux des sinistrés

L’accord intervenu entre le gouvernement wallon et les assureurs prévoit que ce seront les assureurs eux-mêmes qui paieront directement les sinistrés concernés. "Tous les sinistrés assurés vont pouvoir faire appel à un interlocuteur, leur assureur", confie Hilde Vernaillen, d’Assuralia. Les sinistrés assurés pourront ainsi "compter sur une indemnisation complète, ce qui n’est pas négligeable pour les gens, pour qu’ils puissent reconstruire", poursuite Hilde Vernaillen.

"Les citoyens sinistrés qui ont souscrit une assurance incendie et inondations ne doivent rien faire. Les assurances vont leur rembourser directement 100% en fonction des clauses de chaque police d’assurance", complète Elio Di Rupo.

Afin de donner force de loi à l’accord, le gouvernement wallon déposera un projet de décret d’exception au Parlement, dans les meilleurs délais.

Cependant, ce dispositif qui comprend une intervention exceptionnelle, au-delà du plafond légal, des assureurs et un financement pour les indemnisations qui seront à charge de la Région wallonne ne règle que la situation des sinistrés des intempéries du 14 au 16 juillet 2021. Si, à l’avenir, une nouvelle catastrophe de grande ampleur devait survenir, le dédommagement des victimes pourrait poser problème si le plafond légal des indemnisations à charge des assureurs était une nouvelle fois dépassé. C’est la raison pour laquelle Assuralia pour qu’on trouve "un système qui tienne dans le temps". Les équipes d’Assuralia sont d’ailleurs occupées à regarder comment le risque de catastrophes naturelles de grande ampleur est couvert à l’étranger pour trouver le système le plus adapté au contexte belge.

A ce sujet, concernant les mécanismes d’indemnisation à mettre en œuvre en vue de catastrophes futures, le ministre-président wallon explique qu’il faudra discuter "avec le Fédéral, la Banque Nationale et les assureurs".

Et les sinistrés qui n’étaient pas assurés ?

Actuellement, environ 65.000 sinistrés lors des intempéries du 14 au 16 juillet dernier ont ouvert un dossier auprès de leur compagnie d’assurances. Ceux-là seront donc indemnisés.
Mais qu’en sera-t-il des personnes qui n’avaient pas souscrit d’assurance ? Aujourd’hui, le ministre-président wallon confirme vouloir aussi aider ces personnes et "travailler sur le sujet", mais, dit-il, "ce sera un peu plus long". D’abord parce qu'"à ce stade, nous n’en connaissons toujours pas le nombre", explique Elio Di Rupo. Cela prendra aussi plus de temps que pour les sinistrés assurés parce que la Région Wallonne, qui les indemnisera, n’est pas rompue à l’exercice autant que les assureurs. "Les assureurs ont la pratique d’indemniser, ils ont des experts et toute la méthodologie. Nous, nous devons tout inventer pour les personnes qui ne sont pas assurées", poursuit Elio Di Rupo.

Sur le même sujet : JT 12/08/2021

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