Cela faisait 14 ans que Madeline, son époux et leurs trois enfants vivaient ici. "Nous y étions bien et il y avait une bonne ambiance entre voisins", nous glisse-t-elle en nous emmenant dans son quartier devenu méconnaissable. Même s'il a été en partie nettoyé depuis les terribles inondations, il reste encore des débris charriés par les eaux, des carcasses de voitures, des pierres au milieu de la route. Mais le plus frappant, c'est évidemment ces dizaines de façades de maisons éventrées. "C'est toujours un choc quand je reviens ici. Les images de ce qu'on a vécu ne me quittent jamais" explique la sinistrée.
Elle nous raconte alors l'incroyable, heure par heure. "La Vesdre est sorti de son lit le mercredi 14 juillet. On ne s'inquiétait pas outre mesure car quand vous habitez près d'un cours d'eau, vous savez qu'il peut déborder". Mais rapidement, l'eau monte à une vitesse de 10 centimètres par heure. Le soir, quand la famille va se coucher, le rez-de-chaussée est sous eau. "Entre 21h30 et 2h10, le niveau n'a pas bougé. Puis d'un coup, vers 2h30 du matin le jeudi 15 juillet, l'eau commence à monter. Une après l'autre, les marches de l'escalier disparaissent. Je décide de monter au deuxième étage de la nourriture, des batteries de secours pour nos téléphones, des couvertures". Tout va alors s'accélérer. "L'eau montait à vue d'oeil. J'ai réveillé les enfants vers 5h - 5h30. A 6h, les garages à côté de chez nous se sont effondrés. La toiture est venue percuter le haut des fenêtres de notre premier étage. La fenêtre du voisin a éclaté sous la force de l'eau. Dans la foulée, deux maisons se sont effondrées un peu plus loin avec des gens sur les toit. C'est là qu'on s'est dit qu'on devait fuir".
La mère de famille emmène alors tout le monde sur le toit de la maison. Ils sont rejoints par d'autres voisins. Ils parcourent plusieurs toitures pour se mettre à l'abri un peu plus loin sur un autre toit moins pentu. "Au total, nous étions 19 personnes, dont une maman avec ses deux bébés".
On a attendu les secours sur le toit de la maison pendant 11 heures
Le calvaire est loin d'être fini pour ces 19 personnes. Une longue, très longue attente, commence pour le groupe. "On a attendu les secours pendant 11 heures" nous raconte Madeline, encore émue. "Les premières heures, il y a quand même 7 personnes qui ont pu être évacuées grâce à un zodiac et grâce aux pompiers de Gand. Là, on s'est dit qu'il y avait de l'espoir. Puis le zodiac a été transpercé par une barre métallique et au moment où ils ont voulu venir rechercher nos enfants et un autre voisin, ils n'ont pas su, et ils n'ont pas eu d'autre choix que de nous abandonner parce que matériellement, ils ne pouvaient plus accéder jusqu'à nous".