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#Investigation : 2035, la voiture électrique ou rien

Voitures électriques en charge sur borne rapide

© Jean-Christophe Willems

En 2010, lorsque Nissan a commercialisé sa Leaf, première voiture électrique de grande production, bien peu pariaient sur le succès de ce type de véhicule. Et le titre de "voiture européenne de l’année", décerné un an plus tard, n’a pas vraiment changé la donne. Il faut dire qu’à cette époque pas si lointaine, la voiture s’affichait à plus de 30.000 euros en entrée de gamme. Le réseau de recharge était quasi inexistant et le véhicule, pour lequel le constructeur annonçait 160 km d’autonomie, avait bien du mal à en parcourir 100 sur autoroute.

Depuis, les choses ont évolué. A un point tel que dans 11 ans, toutes les voitures neuves vendues en Europe seront électriques ! Pour son premier numéro de 2023, #Investigation se penche sur le dossier de la voiture électrique.

11 ans pour la transition

En 2035, les constructeurs ne pourront plus vendre de voitures dont les moteurs rejettent du C02, le gaz à effet de serre responsable du réchauffement climatique. La seule solution à court terme est l’électrification, moins coûteuse et plus efficace que le passage à l’hydrogène vert, qui convient mieux aux gros véhicules. 2035, cela parait loin mais c’est pourtant demain.

En Belgique, l’âge moyen des voitures est de près de 9 ans, et même 10 à Bruxelles. Cela signifie que pour ceux qui envisagent un achat à moyen terme, il y a de fortes chances que leur voiture essence ou diesel soit la dernière. Bien sûr, jusqu’au 31 décembre 2034, on pourra toujours acheter une voiture à moteur thermique, pour autant que les constructeurs en proposent encore. Et on ne vous interdira pas de rouler en Europe avec cette voiture thermique. Quoi que…

La limitation des rejets polluants s’est déjà traduite par l’instauration de LEZ (Low Emission Zone ou Zones de Basses Emissions en français) dans un grand nombre de villes belges et européennes. Et plus le temps passe, plus cette législation se durcit. En 2035 toujours, la Région de Bruxelles-Capitale n’acceptera plus aucune voiture ou moto thermique sur son sol.

Vous habitez en périphérie et travaillez à Bruxelles ? Pas question de rentrer en ville avec votre voiture essence, même de dernière génération, même hybride, même achetée en 2034 ! C’est en tout cas ce qui a été décidé par le gouvernement régional actuel. Rien ne dit que d’ici l’entrée en vigueur de la mesure, celle-ci ne sera pas adaptée ou modifiée, mais pour l’instant la décision est actée. Encore un argument de plus qui pèse dans la balance du passage à l’électrification.

Des cellules de batteries de voiture électrique
Des cellules de batteries de voiture électrique © Jean-Christophe Willems

Fracture sociale

Sur le fond, les différentes décisions politiques sont louables. Il faut diminuer les rejets de CO2 et le secteur du transport, qui représente près d’un quart de ces émissions, est le seul qui continue de les augmenter. En ville par contre, il s’agit plus d’un problème de santé publique que d’environnement : les gaz d’échappement causent 9 millions de morts dans le monde chaque année.

Sur la forme, la décision européenne est radicale et risque bien d’accentuer les différences entre les classes sociales. Car le principal problème de la voiture électrique, c’est son prix. Pour l’instant, il est 20% plus élevé que celui d’une voiture thermique équivalente. Hugues Dhayer, administrateur chez EV Belgium, la fédération du secteur de l’électromobilité le reconnaît : "Je ne vais pas mentir : on s’attendait à une parité des coûts entre voiture thermique et électrique en 2023-2024, on n’y est pas. Il y a eu la crise des composants électronique et la guerre en Ukraine pour l’expliquer." Les dates actuellement avancées sont plutôt 2027-2028.

Il faut dire aussi que pour rentabiliser les investissements colossaux et offrir une autonomie respectable avec de lourdes batteries, les constructeurs ont d’abord misé sur le haut de gamme. Trouver une voiture familiale électrique à moins de 35.000 euros est mission impossible actuellement.

Même la petite Peugeot 208 ne se négocie pas en dessous de 36.000 euros en version électrique. Bien sûr, les voitures essence et diesel ont aussi vu leurs prix augmenter, mais au moins elles proposent un marché de l’occasion bien développé. Il est encore possible d’acheter un "vieux clou" en état de rouler pour quelques milliers d’euros. En 2035, cela risque de ne toujours pas être le cas avec les voitures électriques.

Assemblage de batteries chez Audi Brussels
Assemblage de batteries chez Audi Brussels © Jean-Christophe Willems

Le passage forcé vers l’électrification ne se déroulera pas de la même façon pour tous. Ceux qui ont la chance de bénéficier de véhicule de société, de panneaux photovoltaïques, de possibilité de recharge au travail ou à la maison ne vivront pas cette transition de la même manière que tous les autres.

Alors, quelle solution pour ceux qui n’auront pas les moyens financiers ou la possibilité pratique de posséder une voiture électrique ? Et bien, il faudra opter pour un autre mode de déplacement dans les nombreuses villes européennes qui interdiront la voiture thermique… pour autant que cela soit possible. Nous en avons fait l’expérience.

Pendant 15 jours, nous n’avons utilisé que les transports en commun pour effectuer les déplacements domicile-travail. En moyenne, la durée de trajet était de 1h20, avec des pics à plus de 2 heures, contre moins d’une heure en voiture dans les embouteillages et 35 minutes à moto. On a donc commencé à économiser, car il ne reste que 11 ans avant la révolution électrique..


Rendez-vous ce mercredi 18 janvier dès 20h15 sur La Une ou sur Auvio.

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