Belgique

"J’appelle la direction de Delhaize à prendre le chemin de la négociation" et "à éviter la provocation", dit le ministre Dermagne à Jeudi en Prime

© RTBF

Par Jean-François Noulet

Pierre-Yves Dermagne, vice-Premier ministre socialiste et ministre de l’Economie et du Travail du gouvernement fédéral était l’invité de Jeudi en Prime.

Il est revenu sur cette proposition des parlementaires socialistes de bloquer les prix de certains produits de nécessité.

Il a aussi abordé le conflit entre la direction et les syndicats chez Delhaize pour lequel il a désigné un conciliateur social.

Il a aussi été question de nucléaire alors que le gouvernement fédéral n’a pas encore conclu d’accord avec Engie sur la prolongation des deux réacteurs de Doel 4 et Tihange 3.

A propos du conflit chez Delhaize : une "rupture du modèle de concertation sociale"

Chez Delhaize, c’est toujours le blocage entre la direction et les syndicats. La direction reste attachée à son projet de franchiser l’ensemble des 128 magasins qu’elle détient encore. Jusqu’à présent, elle s’oppose aux demandes des syndicats de retrait du plan. Aucune négociation n’a pu avoir lieu.

La semaine dernière, le ministre de l’Economie et du Travail, Pierre-Yves Dermagne a désigné un conciliateur social pour tenter de rapprocher les points de vue dans ce dossier. "C’est quelqu’un qui connaît bien le secteur", dit de ce conciliateur le ministre Dermagne, puisqu’il préside la commission paritaire de la grande distribution.

Pour le moment, "le blocage est persistant", reconnaît le ministre qui reste malgré tout confiant sur l’issue de la concertation. "J’y crois, sinon je n’aurais pas désigné un conciliateur social", réagit-il. Il reconnaît toutefois que "c’est un dossier compliqué avec un enjeu énorme".

Le ministre appelle la direction de Delhaize à la concertation. "J’appelle vraiment la direction de Delhaize, qui est un groupe belge, qui joue sur cet ancrage belge, à respecter la tradition de concertation sociale, de négociation entre les syndicats et le patronat et d’envisager aussi d’autres options que la franchisation complète de ces 128 magasins", déclare-t-il.

Par rapport au durcissement du conflit, au recours aux huissiers, notamment, le ministre parle "de rupture du modèle de concertation sociale". "C’est pour moi aussi une forme de provocation", estime Pierre-Yves Dermagne.

Pour le ministre, les dirigeants de Delhaize "ont besoin" de cette concertation. "Quand on est à ce point attaché à l’image de la Belgique, qu’on s’est même rebaptisé Belhaize pour rappeler ce lien historique et fort avec ses consommateurs, ses travailleurs, on doit s’inscrire dans une logique de concertation sociale et tenir compte des intérêts des travailleurs et travailleuses", estime le ministre.

"J’appelle la direction à prendre le chemin de la négociation, à respecter les organisations syndicales et à éviter la provocation", demande Pierre-Yves Dermagne. Il avertit en passant cette direction des risques, puisque certains pensent déjà à renforcer la loi Renault.

Pierre-Yves Dermagne voit aussi en Delhaize "un groupe devenu international", "qui fait des bénéfices, distribue des dividendes à ses actionnaires, a augmenté la rémunération de ses dirigeants et qui, d’une certaine manière, voudrait transférer la responsabilité de son personnel à des structures plus fragiles, à savoir des franchisés et des indépendants". Ces franchisés ne sont pas pour autant un problème pour le ministre. "Il y a de la place à la fois pour des franchisés et à la fois pour des magasins intégrés", estime le ministre.

Pierre-Yves Dermagne plaide aussi pour qu’on remette de l’ordre dans le secteur de la distribution. "On a trop de commissions paritaires avec des règles différentes", estime-t-il. "J’ai demandé aux partenaires sociaux, aux patrons et syndicats, de se mettre autour de la table pour simplifier le paysage de ces commissions paritaires", ajoute-t-il. Il faut, dit-il, "uniformiser les conditions de travail et de rémunération".

Je ne pense pas que le nucléaire sera la réponse et la seule réponse à la question énergétique pour l’avenir

Autre dossier "chaud" du gouvernement fédéral, celui du nucléaire. La Vivaldi est toujours occupée à négocier avec Engie les conditions de la prolongation des deux réacteurs nucléaires de Tihange 3 et Doel 4 sur lesquels le gouvernement voudrait encore compter pendant dix ans.

Le ministre Dermagne a épinglé l’un des points épineux de ces négociations : la question de la gestion des déchets pour laquelle il est prévu de facturer un montant forfaitaire à Engie. "Les masques sont tombés et on voit que c’est difficile avec Engie de se mettre d’accord sur un montant fixe pour gérer pendant des milliers d’années ces déchets nucléaires".

Le vice-Premier ministre socialiste a aussi répondu au Président du MR, Georges-Louis Bouchez qui dans le podcast "Le tournant" de La Première expliquait que son parti ne monterait pas dans un gouvernement qui n’investirait pas dans de nouvelles centrales nucléaires. Par rapport au nucléaire, Pierre-Yves Dermagne ne se dit pas "fermé à ça", mais pour lui, "on doit le regarder dans son ensemble avec les différents coûts qui y sont liés et, particulièrement, la question du traitement des déchets". Il faut aussi, estime aussi Pierre-Yves Dermagne se poser la question de l’approvisionnement en uranium. "On dépend encore majoritairement de la Russie. Donc, quand on parle du nucléaire comme étant une manière d’être autonome ou indépendant en matière énergétique, on sait que ce n’est pas le cas".

Pour le vice-premier socialiste, "le nucléaire fait partie de la transition énergétique" pour aller "vers une économie et une société beaucoup plus fondée sur le renouvelable". "Je ne pense pas que le nucléaire sera la réponse et la seule réponse à la question énergétique pour l’avenir", a-t-il conclu sur ce sujet.

Le vice-Premier ministre défend la proposition de blocage des prix des produits de première nécessité

C’est une proposition que les parlementaires du groupe socialiste ont faite. Ils veulent qu’il soit possible de bloquer les prix d’une série de produits de première nécessité. Proposition soutenue par le vice-Premier ministre socialiste Dermagne. Quels produits seraient concernés ? La liste n’est pas exhaustive. "Les pâtes, le pain, les livres", avance Pierre-Yves Dermagne. "On bloquerait les prix comme on l’a fait par le passé", poursuit-il. "Aujourd’hui, on n’a plus le mécanisme juridique pour pouvoir le faire. Il existait auparavant, il a été supprimé sous une précédente législature, mais on pourrait le réintégrer dans notre droit en cas de nécessité", estime le ministre de l’Economie et du Travail.

Alors que du côté libéral, le vice-Premier ministre Clarinval (MR) a qualifié l’idée de "communiste" et d'"inefficace", Pierre-Yves Dermagne la défend. Pour lui, cela ne ferait pas forcément de tort aux producteurs. "On peut trouver une alliance objective entre l’intérêt des consommateurs et l’intérêt des petits producteurs", estime-t-il.
Au passage, il rappelle l’intérêt du système belge d’indexation automatique des salaires et des allocations, "un magnifique système". "On s’est battu pour le maintenir pendant cette crise", explique Pierre-Yves Dermagne. "Certains autour de la table, les Libéraux pour ne pas les nommer, disaient qu’on aurait dû opérer un ou deux sauts d’index comme ils l’avaient fait sous le gouvernement précédent de Charles Michel", poursuit Pierre-Yves Dermagne.

Jeudi en Prime

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Inscrivez-vous aux newsletters de la RTBF

Info, sport, émissions, cinéma... Découvrez l'offre complète des newsletters de nos thématiques et restez informés de nos contenus

Articles recommandés pour vous