Jean-Claude Defossé, ancien journaliste phare de la RTBF : "Il faut donner des conditions aux journalistes pour pouvoir exercer une liberté de presse"

Jean-Claude Defossé est donc connu pour avoir réalisé des reportages sur des sujets tabous avec en trame de fond la question de l’indépendance et la liberté d’expression. Aujourd’hui en 2023, la liberté d’expression est-elle menacée ? Selon, le journaliste, "elle est toujours menacée." "Je crois que pour que la liberté de presse vive, il faut donner des conditions aux journalistes pour pouvoir exercer une liberté de presse."

A ce propos, "je suis très très content", dit-il ce matin en rappelant qu’au mois de décembre dernier il a gagné un procès devant la Cour européenne des droits de l’homme, après 17 ans de la diffusion d’un reportage dans "Questions à la Une" sur un couple qui avait organisé des rencontres privées de lutte féminine – avec la participation de jeunes filles partiellement dénudées – dans le gymnase d’un établissement scolaire à Rochefort.

"Les lutteuses de Rochefort" était le titre de ce reportage. Jean-Claude Defossé revient ce matin sur l’importance de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme. "Imaginez qu’on donne à un magistrat le pouvoir de juger le ton d’une émission, c’est subjectif à crever." Il souligne qu’il est très fier d’avoir réalisé cette émission "puisqu’on m’a donné raison sur toute la ligne en condamnant cet individu".

Concernant les conditions du travail du journaliste, il précise que s’il n’avait pas eu le service juridique de la RTBF pour le défendre, "je n’aurais pas eu les moyens de me défendre. J’ai dû attendre 17 ans".

L’arrêt de Cour européenne des droits de l’homme "pris par 6 magistrats à l’unanimité est une sorte de bouclier pour toute la profession en Europe. On ne pourra plus, en quelque sorte, condamner des journalistes pour le ton de leurs émissions."

Jean-Claude Defossé rappelle dans le contexte actuel de défiance envers les journalistes, d’attaques à l’encontre des lanceurs d’alerte, l’importance de ces derniers et de les protéger. "En Belgique, on a déjà fait un grand pas avec la protection des sources […], mais si on n’a pas les informateurs qui sont aussi protégés – et de rappeler l’affaire du fondateur de WikiLeaks Julian Assange – vous pensez bien que ça va dissuader les journalistes."

Autre point : "il faut que le journaliste soit protégé par son employeur" et de souligner la difficulté pour les journalistes indépendants qui n’ont pas une structure derrière eux pour les protéger, afin de faire face à des procès souvent coûteux. "L’indépendance des journalistes ne peut se réaliser que dans des conditions optimales et je dois dire qu’ici à la RTBF, moi je les ai eues."