Coupe du Monde 2022

Jude Bellingham, dans les traces de papa, le flic-buteur à la gâchette infernale

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Une carrière professionnelle ne tient souvent qu’à un fil. Ténu, fragile, parfois invisible. Tous les sportifs vous le diront. Un événement, une rencontre, un cri du destin, un déclic, et tout peut basculer. Comme tant d’autres avant lui, Jude Bellingham fait, lui, partie de ces jeunes au déclic tardif. Jusqu’à ses six ans, ses parents osaient à peine lui parler de football. “Donniez lui une balle, il vous la rendait immédiatement” se remémore sa mère, Denise.

Pourtant, chez les Bellingham, quasiment tout tourne autour du ballon rond. La faute à Mark, le papa, dont la passion dévorante gangrène le quotidien familial. Son dada, à Mark, policier dans le civil, ce sont les ligues non-professionnelles de football. Avant ses shifts nocturnes à la police,  il y exhibe fièrement son talent de buteur, poli au gré des clubs qu'il écume (24 au total) : “Honnêtement, je ne sais pas comment il faisait. Dès la fin de l’entraînement, je voyais Mark quitter le terrain en courant. Il prenait rapidement sa douche, sautait dans sa voiture pour commencer son service de police à 22 heures” explique Jason Cadden, l’un de ses entraîneurs, dans des propos retranscrits par So Foot.

Un tacle jeté ? Si peu, chez les Bellingham

La légende raconte même que Mark était l’une des stars les plus méconnues du Royaume, lui le buteur féroce qui aurait planté plus de 700 roses en 20 ans de carrière. Ces 20 ans de carrière, Jude n’y a évidemment pas assisté. Forcément, il n’est né qu’en 2003 à Stourbridge, une anonyme bourgade bien anglaise, nichée à l’ouest de Birmingham.

Mais comme tous les gosses, il accompagne son papa dès son plus jeune âge En observant les prouesses du paternel de loin, d’un air ostensiblement désintéressé. “Je ne voyais pas l’intérêt du foot” confie Jude, sourire en coin, avec le recul. “Et puis, un jour, j’ai eu un déclic. Depuis, je ne veux plus faire que ça…” renchérit-il.

A 6 ans, Bellingham s’inscrit donc timidement au centre de formation de Birmingham. Son histoire d’amour avec le football n’en est qu’à ses balbutiements, mais le jeune Jude tente déjà de s’inspirer de son idole de père. “Il ne se jetait jamais. Je ne l’ai jamais vu tacler. J’essayais de faire pareil.”

Un maillot retiré après 44 matches, ça classe un bonhomme

Jude Bellingham, dans les traces de papa, le flic-buteur à la gâchette infernale
Jude Bellingham, dans les traces de papa, le flic-buteur à la gâchette infernale © AFP or licensors

La classe à la Bellingham est née. 13 ans plus tard, Jude Bellingham ne tacle toujours pas. Ou si peu. C’est qu’il n’en a pas besoin, le bougre. Récupérer, mettre les pieds dans le cambouis, s’arracher, il parvient à le faire en restant debout. La sérénité personnifiée.

Une sérénité qu’il aurait pu perdre en 2020, quand sa carrière a pris un nouveau tournant. A l’époque, il n’avait qu’une petite saison et 44 matches professionnels dans les guibolles, à Birmingham, son club de toujours. Pourtant, il n’a pas flanché au moment de céder (déjà) aux sirènes de Dortmund, toujours à l’affût de la bonne affaire. Il n’a pas flanché non plus quand le BVB a déboursé la modique somme de 20 millions d’euros pour le gamin de 17 ans qu’il était. Comme il n’a pas bronché en apprenant que Birmingham avait décidé de… retirer son maillot pour lui rendre hommage.

Son épopée allemande, il l'entame évidemment dans la peau d'un titulaire. Forcément, c'est dans ce rôle-là qu'il excelle, quand il parvient à prendre du rythme et à imprimer sa patte sur la rencontre. Milieu central, milieu gauche ou droite, Bellingham est partout. Et dans l'ombre d'un Erling Haaland qui monopolise, sans broncher, l'étouffante attention médiatique, le kid de Birmingham fait ses gammes.

Des gammes et une mise sous couveuse volontaire qu'il abandonne dès le moment où Haaland traverse la Manche en direction de Manchester City. Le costume de star, laissé vacant par l'ovni norvégien, il est désormais pour lui et pour personne d'autre. Dans un style différent d'Haaland, évidemment, mais en dégageant la même impression de facilité. Titulaire indiscutable, il devient la plaque tournante d'un BVB qui déjoue en son absence. Les kilomètres il les avale, les minutes il les accumule sans sourciller (il n'a plus raté une seconde de Bundesliga depuis mi-janvier). Mature, serein, devenu tellement vite ce soldat précieux dont rêverait tout entraîneur.

La futur superstar anglaise ?

© AFP or licensors

C'est donc tellement logiquement qu'il entame ce Mondial dans la peau d'un titulaire, malgré une concurrence féroce et un talent qui dégouline d'un peu partout chez les Three Lions. Gareth Southgate n'est pas dupe, il a besoin de lui. De son abattage, de sa vision de jeu et, surtout, de sa justesse.

Parce que c'est sans doute là que Bellingham impressionne le plus. Il n'a que 19 ans, même pas 150 matches professionnels derrière lui, mais il joue juste. Dimanche face au Sénégal, Bellingham a fait 31 passes. Il en a réussi 29 (94%), soit le plus haut total du match. Sa passe décisive, pleine de vista, sur le but de Jordan Henderson, est un modèle du genre. L'ensemble de son œuvre, aussi.

"C'est une future superstar" s'enflammait d'ailleurs le bouillant Roy Keane après la rencontre. "On dirait qu'il sait tout faire" renchérissait Gary Neville  dans la foulée.

Tout faire, Bellingham n'en est peut-être pas encore capable. Mais il fait déjà tellement pour son âge. 19 ans et une telle autorité dans le jeu, c'est flippant. Où a minima impressionnant, c'est comme vous voudrez.

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