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Karima, mère de Bilal El Khannouss, le joueur bruxellois du Maroc : "Mon fils n’est pas déçu de ne pas encore avoir eu de temps de jeu"

Bilal El Khannouss pourrait être sur le terrain ce samedi, pour la petite finale contre la Croatie.

© Belga

Le parcours du Maroc lors de la Coupe du Monde au Qatar a enchanté les amateurs de football. Et a révélé, même s’il n’a pas joué, Bilal El Khannouss. Le joueur de Genk, 18 ans, qui a grandi à Strombeek-Bever en proche périphérie bruxelloise et porté les couleurs d’Anderlecht chez les jeunes, a été appelé par la sélection marocaine. Une fierté pour sa maman, Karima Ben Aïssa. Depuis le début du Mondial, elle et Mohamed, le papa de Bilal, sont sur place, pour suivre les Lions de l’Atlas et soutenir leur fils, en pleurs, comme après l’élimination en demi-finale face à la France… En tout cas, comme Karima, gérante de sociétés, le confie à la RTBF, elle a vécu de très près le rêve éveillé de son fils. Interview…

Tout d’abord, mercredi soir, vous assistiez au stade à la demi-finale. Vous avez vu votre fils pleurer, après la défaite. Qu’avez-vous ressenti ?

J’ai vu les photos de Bilal en larmes, prises par la presse et qui ont circulé sur les réseaux sociaux. Bilal me les a envoyées très rapidement après le match. En tant que parents, comme on était dans les tribunes, pas très loin du terrain, je l’ai tout de suite vu pleurer. C’est paradoxal ce que je vais dire : c’était très beau à voir. Je n’étais pas triste de voir mon fils pleurer, mais fière que cette défaite l’ait touché à ce point. Il n’a peut-être que 18 ans. Mais c’est quelqu’un de très mature. La défaite lui a fait quelque chose. Il est présent tous les jours avec ses coéquipiers. Il voit comment ils se sont battus pour atteindre une demi-finale de Coupe du Monde. Je reste une maman. Voir son enfant pleurer, ça doit rendre triste. Mais ici, j’étais heureuse qu’il réagisse de la sorte. Cela prouvait qu’il a cru en ses coéquipiers. Certains étaient blessés et malgré cela, ils se sont battus pour le Maroc. J’ai trouvé cela très beau.

Est-il venu vous rejoindre dans les tribunes, après le coup de sifflet final ?

Non. Il était trop touché émotionnellement. Il est directement rentré aux vestiaires. Il m’a tout de même envoyé rapidement un petit message pour me dire qu’il avait un peu de temps libre, me demandant où il pouvait nous rejoindre. Une grosse partie de ma famille ainsi que celle de mon époux se sont déplacées à Doha. Nous étions 25 personnes. Cela faisait plus de trois semaines que Bilal n’avait pas vu ses petits cousins, ses grands cousins, oncles, tantes… Il nous a rejoints à l’hôtel vers 1h du matin. A ce moment, il a retrouvé son petit cousin de 9 ans dont il est très proche. Ils ont recommencé à pleurer. Après ce moment d’émotion, nous nous sommes fait livrer un petit repas dans la chambre et on a profité de ce moment. Il était très content de revoir sa famille. Pour lui, elle représente un équilibre.

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Vous n’étiez pas censés rester jusqu’à la quatrième semaine du tournoi…

On est partis de Bruxelles le 21 novembre. On est au Qatar depuis le début de la compétition. La Fédération marocaine de football a tout organisé pour les familles. On avait reçu des billets pour des retours le 2 décembre, le dernier match dans la poule du Maroc était le 1er décembre. Mais vu les événements, ils ont continué à prolonger notre séjour.

Comment cela se passait avec les autres familles des joueurs, vu le parcours de l’équipe nationale ?

C’était la folie ici, dans l’hôtel. C’était tous les jours la fête, parce qu’on est dans un hôtel où tous les parents sont rassemblés. C’était vraiment une grande famille. Tous les parents se connaissaient, tous les parents se côtoyaient, on déjeunait tous les matins ensemble. On était tous toujours contents. Donc, on prolongeait et on prenait ce qu’il y avait à prendre.

Vous avez cru au parcours de l’équipe marocaine ?

Moi, j’y ai toujours cru. Je suis indépendante, et quand mes collaboratrices me demandaient quand je revenais, je leur disais que je ne reviendrais pas avant le 18 décembre parce que j’étais très optimiste de ramener la coupe avec nous. Je ne suis pas expérimentée dans tout ce qui est football. Mais dès que j’ai vu l’équipe en place, la motivation des joueurs, ainsi que la motivation du coach et son expérience, je me suis dit qu’on avait quand même une très belle équipe. Quand je comparais l’équipe marocaine avec les autres, je me disais qu’il y avait une possibilité d’aller très loin dans la compétition.

Déçue, cependant, de ne pas encore avoir vu votre fils Bilal sur le terrain ?

Je ne suis pas déçue, Bilal non plus. Il n’a que 18 ans. Avoir déjà été appelé par le sélectionneur pour participer à la Coupe du Monde, c’est quelque chose d’extraordinaire pour lui. S’il pouvait avoir du temps de jeu, ce serait magnifique. En tout cas, il profite du moment présent. Il a l’occasion de participer aux entraînements avec des joueurs de haut niveau. Le sélectionneur Walid Regragui ne fait pas de différence entre les joueurs qu’il met sur le terrain et ceux qui ne vont pas jouer. J’ai demandé à Bilal s’il n’était pas trop déçu de ne pas avoir de temps de jeu. Il m’a répondu : "Non, le fait de tous les jours m’entraîner avec eux, l’ambiance qu’il y a entre nous et la manière dont ils s’occupent de moi, c’est déjà quelque chose d’extraordinaire."

 

Ce samedi, le coach Walid Regragui prévoit de faire tourner son effectif et donc, peut-être, donner du temps de jeu à votre fils… Votre réaction ?

Je l’espère qu’il aura du temps de jeu, qu’il pourra montrer au peuple marocain, qui a fait tellement d’éloges à son sujet, ce qu’il est capable de faire, comme il le fait déjà en Belgique à Genk. Et si ça ne se fait pas, il y aura encore une Coupe du monde en 2026. Il n’aura que 22 ans.

Bilal est le plus jeune du groupe. C’est un peu la mascotte des autres joueurs ?

J’ai eu l’occasion de rencontrer plusieurs joueurs qui m’ont dit : "Ne vous inquiétez pas, il est avec nous à l’hôtel, on le traite comme notre petit frère, il ne manque de rien". Il est très proche de Selim Amallah, qui le considère comme son petit protégé. Il s’est vraiment bien intégré et ils l’ont vraiment pris en charge.

Durant ce tournoi, avez-vous pu voir Bilal autant de fois que vous le souhaitiez ?

On l’a vu une première fois quand on est arrivés, on a pu aller à l’hôtel des joueurs et passer une petite heure avec eux. Ensuite, après chaque match, ils avaient des moments de libre. Mon mari a assisté à un entraînement. Donc, on l’a quand même vu à chaque fois.

Votre fils performe en ce début de saison avec Genk. Comment s’écrit son avenir, sa carrière de footballeur ?

Je suis quelqu’un qui laisse le choix à ses enfants (NDLR : Bilal a un frère aîné, Azzedine) de prendre leurs propres décisions et de faire ce qu’ils ont envie de faire. Bilal, il est né avec un ballon dans les pieds. Je ne peux pas vous dire tout ce qu’il m’a cassé à la maison en jouant dans la cuisine et partout dans la maison. Il a été pris en main par son cousin, qui était à ce moment-là dans un club de foot à Schaerbeek. Il y est allé et il l’a pris spontanément en disant au coach : "Il faut que vous voyiez cet enfant, il a vraiment du talent, etc. " Le coach a directement vu le talent de Bilal et a pris l’initiative de l’inscrire au Talent Day d’Anderlecht. Et il a continué… C’est quelqu’un de très motivé qui veut toujours atteindre ses buts. S’il s’est fixé des objectifs, il va les atteindre. Quand il avait 13 ans, on lui a demandé ce qu’il voulait faire plus tard, il répondait : footballeur professionnel. Des millions d’enfants rêvent comme lui. Et pourtant, il a fait beaucoup de concessions, des déplacements, des entraînements pour arriver là où il est aujourd’hui. Il ne jouait pas tout le temps avec ses copains, il ne sortait pas le soir parce qu’il devait être en forme pour ses matchs. Il a fait un choix et il est très content du choix qu’il a fait.

Mais il risque désormais d’être fort sollicité par d’autres clubs ?

 

Bilal prend les choses comme elles viennent. Il est entouré de managers qui ont les pieds sur terre et qui font leur travail. Vous dire quoi, je n’en sais rien. Mais ils font en sorte de gérer au mieux l’avenir de Bilal. Mon fils est quelqu’un d’apprécié, de considéré. Le coach du Maroc s’est exprimé à ce sujet dans les médias. A Genk, il a fait un début de saison très remarqué. Il peut encore continuer.

Qu’est-il prévu pour le retour de Bilal en Belgique ?

Déjà, une réunion entre tous les membres de la famille pour pouvoir revoir Bilal, parce qu’il y en a qui ne l’ont pas vu depuis déjà presque un mois maintenant. La famille est très importante pour nous. Dans un premier temps, ce sera ça. Puis on le laissera souffler pour qu’il puisse quand même aller voir ses amis avant de reprendre la route de Genk et du championnat belge.

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