Culture & Musique

Keith Haring, quand l'art descend dans la rue pour contester

'Keith Haring' Exhibition Preview At Le Musee D'Art Moderne In Paris

© Francois Durand - Getty Images

Par Romane Carmon

À l’aide de couleurs vives, de dessins percutants, d’une technique simpliste et de slogans militants, un jeune artiste clame haut et fort les incohérences de son époque. Fuyant les galeries, symboles de l’art élitiste, Keith Haring investit les rues, les bouches de métro et les entrepôts désaffectés de New York.

Né le 4 mai 1958 dans une bourgade pennsylvanienne, Keith Haring commence son parcours artistique à la Ivy School of Professional Art de Pittsburgh, où il se consacre au dessin publicitaire. Il intègre ensuite la School Visual of Arts de New York, où il marche petit à petit dans les pas de figures emblématiques du Pop Art, comme Andy Warhol qui deviendra son mentor.

Peindre, dessiner, coller pour dénoncer

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À l’inverse de ses contemporains, c’est la rue que Keith Haring veut peindre pour crier au monde, non pas son idylle amoureuse, mais son désarroi face à une société en perdition.

Sans croquis au préalable, le pinceau de Haring balaye promptement l’espace urbain pour exprimer spontanément les revendications des années 80 : le ras-le-bol des rapports internationaux bellicistes liés à la guerre froide, les abus de pouvoir, mais aussi les dangers du nucléaire, le racisme, la religion, l’homophobie.

À 19 ans déjà, l’artiste dessinait à ses propres frais pour des tracts et des affiches anti-Reagan distribués dans les rues new-yorkaises.

Si ses œuvres sont pour lui un véritable porte-parole de la société, le street-artist refuse d’assimiler l’art à la propagande :

"Je ne pense pas que l’art soit de la propagande ; ce devrait être quelque chose qui libère l’âme, stimule l’imagination et encourage les gens à aller plus loin. Il célèbre l’humanité au lieu de la manipuler." - Keith Haring

L’art à la portée de tous

Stacey Bendet And Paris Jackson Celebrate The Launch Of Keith Haring x alice + olivia

Outre ses critiques sociopolitiques, Keith Haring se consacre à la démocratisation de l’art – par le choix de ses lieux de création, de diffusion, ses matériaux et sa démarche artistique.

C’est dans l’idée que ses œuvres puissent tenir dans n’importe quel salon que l’artiste décide d’ouvrir son propre Pop Shop en 1985.

Une œuvre : Ignorance = fear

Réalisée en 1989 pour le mouvement militant Act Up, son œuvre "ignorance = fear" est sans doute l’une des plus révélatrices d’un combat sans relâche pour une cause qui le touchera personnellement.

Déclaré séropositif à l’âge de 28 ans, Keith Haring redoublera d’efforts pour dénoncer le manque de réactivité politique face à l’expansion du sida dans le monde.

Avec le texte, en français "ignorance = peur" et "silence = mort", et les 3 personnages – qui refusent d’entendre, de voir et de parler – Keith Haring dénonce la passivité excessive des grands dirigeants face à l’évolution de l’épidémie. À l’aide du triangle rose – qui rappelle l’écusson porté par les homosexuels dans les camps de concentration nazis – l’artiste entend détruire les préjugés relatifs à la communauté LGTB + et dénoncer les discriminations dont elle est victime.

Si le VIH finit par l’emporter le 16 février 1990, à 31 ans, Keith Haring reste une figure des plus inspirantes pour nos générations et son message de liberté est, lui, bel et bien intemporel.

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