En 2020, la pêche déclarée et les importations légales de civelles au Japon représentaient moins de 14 tonnes au total, selon l'Agence japonaise de la pêche (AJP), alors que plus de 20 tonnes ont été mises en élevage, une importante différence attribuée à l'économie parallèle.
La situation serait encore plus grave selon WWF Japon : 40 à 60% des civelles élevées dans le pays proviendraient des filières illicites.
A Hamamatsu, les eaux saumâtres du lac Hamana, situé en bord de mer, offrent un habitat idéal aux anguilles et la pêche de civelles y a lieu chaque année entre décembre et avril, dans la plus grande discrétion.
"L'anguille est le poisson le plus cher de ce lac", confie Kunihiko Kato, un pêcheur de 66 ans, en remontant le long filet à bout conique qui lui sert à attraper les civelles. "Alors, on fait attention !" pour ne pas aiguiser les convoitises, glisse-t-il.
Le prix des civelles, parfois surnommées "or blanc", fluctue brutalement en fonction des prises : le kilo se négociait en moyenne 1,32 million de yens (10.300 euros) en 2020 d'après l'AJP et avait atteint un record de 2,99 millions de yens en 2018.
La consommation annuelle d'anguilles au Japon a été divisée par trois depuis son record de quelque 160.000 tonnes en 2000, selon des chiffres officiels. Leur coût de plus en plus élevé réduit en effet les occasions d'en consommer, note Senichiro Kamo, grossiste en produits de la mer installé au bord du lac Hamana.
"A une époque, toutes les grillades et tous les repas servis dans les hôtels du coin étaient à base d'anguille", se souvient M. Kamo, dont ce poisson représente 50% du chiffre d'affaires. "Elles étaient aussi utilisées dans les paniers-repas vendus dans les gares mais comme leur prix a triplé, ce n'est plus possible."