La chanteuse Marie Dubas, ou l’art de se réinventer

Marie Dubas commence sa carrière à 14 ans, en 1908 sur la scène du théâtre de Grenelle. Elle exerce le métier de chanteuse d’opérette jusqu’en 1926, année de ses 32 ans. Et voilà qu’un accident vocal la contraint à s’orienter vers le music-hall. Marie Dubas va marquer un tournant dans l’histoire de l’interprétation en francophonie.

A cette époque l’artiste chanteur de chanson populaire devait être danseur et comédien et les systèmes de revue engendraient de grandes vedettes : les Mistinguett-Maurice Chevalier-Joséphine Baker. Mais nous arrivons à un épuisement du genre fin des années 20. Il y a un essoufflement esthétique, le public se lasse de la surenchère du gigantisme et du clinquant. De plus la crise économique et le coût de plus en plus élevé des programmes, auquel il faut ajouter la concurrence du cinéma… tout cela fait penser de plus un plus à une façon de se réinventer.

Marie Dubas, a l’égal de ses compères comme Georgius ou Maurice Chevalier, sera la pionnière d’un nouveau genre : le "tour de chant". Une prestation de trois à huit titres en moyenne selon la notoriété de l’interprète, en alternance avec des "attractions" de music-hall. Il ne s’agit pas encore du concert en deux parties ni a fortiori du récital, même si, certains interprètes à fort abattage le préfigurent parfois. 

Marie Dubas c’est aussi la créatrice d’un tube légendaire, Mon légionnaire. Ce n’est pas Edith Piaf qui l’a créé, encore moins Serge Gainsbourg qui lui a donné pourtant une nouvelle vie avec une patine homoérotique en 1987, et pourtant c’est bien Piaf qui l’a emmené vers la postérité. Mais retournons à son origine, Marie Dubas — également fascinée par Piaf — nous parle de cette chanson, en disant "J’en suis la créatrice, tout autant que Piaf". Marie Dubas était d’ailleurs admirée par Edith Piaf qui lui laisse ces mots : "Je vous admire de tous mes yeux, de tout mon cœur, vous êtes la plus grande".

Marie Dubas est une interprète quelque peu tombée dans l’oubli. Véritable bête de scène qui inspirera toutes les chanteuses de l’époque, Marie Dubas arrête sa carrière en 1958, victime d’épuisement : "J’ai payé trop cher, ce métier m’a tué".

Marie Dubas avec Mon légionnaire, des paroles de Raymond Asso, une musique de Margueritte Monnot, en 1936 sur le single du même nom, c’était dans l’air du temps et ça l’est toujours.