La parole, les armes et l'action
Tout d’abord, elles se feront entendre par les mots en se regroupant dans des clubs de débat dans les églises, lieux inoccupés et symboliques au vu de leurs revendications anticléricales. Elles demanderont ainsi une éducation laïque pour tou.tes, garçons comme filles, estimant qu’il n’y a qu’en s’instruisant qu’elles obtiendront un métier, et donc une certaine autonomie. Elles réfléchiront ensemble sur l’instruction et le socialisme. Ces clubs se poursuivront doucement après la Commune jusqu’à la Première guerre mondiale.
D’autre part, l’une des mesures les plus révolutionnaires prises par la Commune est celle de l’union libre. L’historienne nous explique qu’il y avait une certaine culture populaire du concubinage, notamment pour 30% des femmes de la classe ouvrière. Elles demanderont donc une égalité des traitements dans la loi entre les femmes vivants en union libre et les femmes mariées, subvertissant ainsi les barrières de la légitimité. Il s’agira donc de traiter de la même manière les femmes veuves et les enfants dits "naturels" ou "légitimes". De même, la Commune refusera de réactiver le lieu commun selon lequel la femme par le mariage est la propriété de l’homme.
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"Les femmes étaient exclues des armes depuis bien longtemps, déjà à la Révolution française puisque la place des femmes était cantonné au foyer, et non dans les armées. Les armes, ce n’était pas pour les femmes. Pourtant, à chaque fois qu’il y a eu une révolution, les femmes les demandaient. Les Vésuviennes en 1848 en est un exemple fort. Ici aussi, sous la Commune, les femmes disent "nous voulons nous battre"", continue Michelle Perrot.
Elles se tiendront donc, au même titre que les hommes, aux fronts, formant des barricades partout dans la ville de Paris. La plus connue est celle de la Place Blanche, à Montmartre, entièrement tenue par des femmes.
Enfin, elles agirent en se mobilisant en tant qu’ambulancières, infirmières, cantinières, … Des associations, ligue et unions féminines verront le jour durant cette période parmi lesquelles, comme citée plus haut, "l’Union des Femmes pour la défense de Paris et les soins aux blessés".
Ces rôles féminins restent d’ailleurs aujourd’hui très peu inchangés et nous rappelle notre situation actuelle, en temps de pandémie. Qui sont ces femmes aux premières lignes ? Les métiers du care, majoritairement féminins.
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Le mythe des pétroleuses
Les communardes sont parfois méconnues parce que bafouées par leur image dans la presse versaillaise de l’époque. Elles apparaîtront comme responsables des incendies de la ville de Paris lors de la semaine sanglante, du 21 au 28 mai 1871. Caricaturées, les représentations connotées les plus courantes sont celles des pétroleuses, légende visuelle de la Commune.
La justice de l’époque a pris soin de rappeler aux femmes les hiérarchies de genre et la bonne distribution de la puissance dans l’espace public
Beaucoup de clichés peu glorieux leur sont assignés : alcooliques, débauchées, folles et furieuses, elles sont peintes avec des bidons de pétroles à la main, prête à ravager la ville. Cette image construite de toute pièce avait pour but de décrédibiliser le mouvement révolutionnaire de la Commune. "C’est un mythe, une légende efficace", explique l’historienne de l’art, Edith Schurgers en parlant de ces caricatures.