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La cryptomonnaie peut-elle financer le terrorisme ?

Tendances Première : Les Tendanceurs

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Le monde des monnaies virtuelles paraît assez peu régulé en comparaison du secteur bancaire traditionnel. Mais, il y a eu un avancement récent en Belgique dans la standardisation du secteur de la blockchain. Une première avancée dans le bon sens pour éviter que la blockchain favorise le blanchiment d’argent ou permette de financer des actes de terrorisme par exemple. On en parle avec Fanny Carbonnel.

Les cryptomonnaies financent-elles le terrorisme ? C’est une question qu’on peut se poser, car on sait que le monde des monnaies virtuelles échappe à la régulation. Le blanchiment d’argent y est par exemple assez simple à réaliser (0.15% des transactions cryptos en 2021, d’après un rapport de Chainanalysis).

Depuis le dimanche 1er mai 2022, des progrès ont été faits en Belgique dans la standardisation du secteur de la blockchain (soit le secteur des monnaies sur internet). Les plateformes d’achats et d’échanges de cryptomonnaie et les fournisseurs de portefeuilles numériques qui ont un siège social sur le territoire belge — et il y en a de plus en plus — ont l’obligation de s’enregistrer auprès de la FSMA (notre autorité des services et marchés financiers) pour exercer en conformité.

Le monde de la cryptomonnaie attire des personnes aux mauvaises intentions, qui apprécient de pouvoir contourner la régulation bancaire et de se débarrasser de la surveillance des intermédiaires. Il est très difficile, dans la blockchain, de savoir qui fait des transactions bancaires. Tout ce qui est visible pour les organismes de contrôle, ce sont des successions de chiffres et de lettres, sans qu’on sache facilement à qui ces adresses de portefeuille sont reliées. Cela demande un travail long et pénible, mais qui est faisable. Il existe par exemple des entreprises qui sont spécialisées dans ce domaine pointu et travaillent avec les autorités pour identifier les transactions suspectes.

Le financement du terrorisme est donc lui aussi un crime aisément réalisé dans la blockchain, en toute discrétion. La première fois qu’une organisation terroriste a demandé une aide financière, c’était en 2016. La cellule jihadiste, basée au Moyen-Orient, a lancé un crowdfunding pour financer l’achat et la fabrication d’armes. L’appel au don en bitcoin n’a heureusement pas été très suivi, car les terroristes avaient une méconnaissance du secteur des cryptomonnaies. En publiant leur adresse de portefeuille numérique sur Twitter, Youtube et Telegram, ils ont rendu la tâche facile aux enquêteurs qui ont pu fermer la chaîne de financement.

Depuis, les organisations terroristes ont étudié le système. En 2019, une cellule djihadiste a proposé un code QR à scanner pour proposer un échange de cryptomonnaie. Nouvel échec. Mais les terroristes ont été plus loin : ils ont intégré un portefeuille bitcoin sur leur site web. A chaque fois que quelqu’un essayait de rafraîchir la page, une nouvelle adresse électronique apparaissait. Il a donc été beaucoup plus difficile pour les enquêteurs de remonter la chaîne et de bloquer l’afflux d’argent. Cette enquête est d’ailleurs toujours en cours.

Mais Fanny Carbonnel se veut rassurante. L’utilisation de la cryptomonnaie n’est pas encore très répandue dans les milieux terroristes, c’est toujours le cash qui est le mode privilégié, car moins contrôlable. La blockchain est certes une nouvelle possibilité de financement, mais à court terme, car la législation va être accrue. Il reste du pain sur la planche pour les autorités politiques et financières, mais les améliorations se font voir. A terme, le terrorisme pourrait abandonner totalement la cryptomonnaie à cause (ou plutôt grâce à) la régulation. De manière plus générale, Chainanalysis estime que la proportion de transactions illicites dans la blockchain est en baisse. De 7% en 2012, elle serait à 1% aujourd’hui.

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