Belgique

La facture d’électricité est-elle une feuille d’impôts déguisée ?

C’est une affirmation que l’on entend souvent dans le débat public : notre facture d’électricité serait " une feuille d’impôt déguisée ". Alors est-ce le cas ? Qu’entend-on précisément par-là ? On a tenté d’y voir clair dans Déclic.

Pour se faire une idée, nous sommes partis d’une facture wallonne telle qu’analysée dans un rapport très détaillé de la CWAPE (le régulateur wallon pour l’électricité et le gaz). Ce rapport est sorti le 2 septembre dernier et il analyse la facture résidentielle des ménages wallons sur les 14 dernières années, de 2004 à 2021.

On y trouve un chapitre particulièrement intéressant qui détaille la facture moyenne d’un ménage en fonction de la destination réelle de chaque euro payé par KWh consommé. Voici ce que ça donne :

Composantes du prix du KWh en Wallonie, en juin 2021
Composantes du prix du KWh en Wallonie, en juin 2021 © CWAPE

Un tiers seulement pour l’électricité elle-même

Premier constat, dans la facture d’électricité, la commodité (l’électricité proprement dite) ne représente qu’un tiers du montant payé. Une part qui peut un peu varier selon les prix des matières premières et qui, vu les prix élevés actuels, est plus importante en ce moment que dans cette analyse faite en juin dernier. Ceci dit, pas de quoi fondamentalement changer la donne dans la ventilation de la facture

Un quart pour la distribution

Sur un KWh consommé, environ un quart (ici 23,7%) sert à rémunérer la distribution par le GRD (Gestionnaire de Réseau de Distribution). Pour la Wallonie, les deux opérateurs sont ORES et RESA. Le coût, tel que repris dans le graphique ci-dessus, intègre le raccordement de votre ménage au réseau ainsi que toute une série d’obligations de service public qui s’imposent aux distributeurs.

Par ailleurs, 4,5% de la facture sert à rémunérer le transport haute tension, géré en Belgique par Elia. Si l’on additionne les 2, on peut considérer que l’acheminement de l’électricité depuis les sites de productions jusqu’au domicile des clients représente 28,2% de la facture (en tout cas celle de juin 2021). Attention, il peut exister des différences entre zones géographiques. Les distributeurs n’appliquent pas les mêmes tarifs partout.

18,7% pour la transition énergétique

Autre gros morceau de la facture : l’énergie verte. Dans ce calcul de la CWAPE, elle représente 18,7% de la facture. Ce poste intègre des éléments très différents : le coût de raccordement du parc éolien Offshore en mer du nord (intégré à la part Elia de la facture), l’achat des certificats verts par le fédéral et par la région, le surcoût lié aux quotas d’énergies vertes imposés aux fournisseurs d’électricité mais aussi le financement du plan qualiwatt qui soutenait, jusqu’en 2018, le développement de l’énergie photovoltaïque, en Wallonie.

Des surcharges fédérales et régionales

A tout cela il faut encore ajouter les surcharges fédérales où l’on trouve diverses cotisations pour le financement de mesures sociales, pour payer la dénucléarisation de certains sites (à Mol-Dessel) ou encore pour assurer le fonctionnement du régulateur, la CREG.

Il y a aussi des surcharges régionales. On y trouve diverses redevances de raccordement, de voirie, " d’occupation du domaine public " dont le but principal est de compenser la perte de revenus des communes par suite de la libéralisation.

Ensemble ces surcharges régionales et fédérales représentent 5% de la facture.

Une TVA sur quasi toute la facture

Reste à appliquer la TVA de 21%. La taxe sur la valeur ajoutée s’applique sur quasiment toutes les composantes de la facture à l’exception de la cotisation fédérale et de la redevance de raccordement. Elle représente 17% du KWh payé.

Alors, une feuille d’impôts déguisée ?

Au global, les taxes, redevances et le financement de la transition énergétique représentent plus de 40% de la facture, selon ces calculs de la CWAPE. Il y a donc clairement un grand nombre de charges connexes qui reposent sur la facture du consommateur et servent à financer des politiques (environnementales et sociales) ainsi qu’à équilibrer les finances des communes. Sans compter que les bénéfices des distributeurs (ORES et RESA) retournent aussi en bonne partie dans les caisses communales sous forme de " participations bénéficiaires ".

Cela signifie que ces impôts et charges sont payés au prorata de la consommation d’électricité des ménages… Et non en fonction de leurs revenus. Cela induit également une facture élevée. La Belgique est un des pays où le KWh facturé au client résidentiel est le plus cher d’Europe. Il n’y a qu’au Danemark ou en Allemagne que l’électricité coûte plus cher.

C’est la raison pour laquelle une association comme Test-Achat mais aussi plusieurs formations politiques demandent une facture plus accessible et plus transparente qui n’intègre plus autant de surcharge et de taxes.

 

Déclic, une autre façon d’aborder l’info. Chaque soir de 17h à 19h sur La Première et à 19h, sur La Trois.

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