Tendances Première

La fermentation en cuisine, une bombe d'énergie !

© GMVozd/Getty Images

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Le processus de fermentation, vieux comme le monde, revient au goût du jour. C'est simple, responsable et bon pour la santé ! "Une consommation régulière fait l'effet d'une bombe d'énergie", souligne le chef doublement étoilé de "L'Air du temps", Sang-Hoon Degeimbre. 

La fermentation existe depuis le paléolithique. Au départ, il s'agissait d'artisanat un peu mystique autour d'un processus assez mystérieux. La pasteurisation a permis de comprendre les phénomènes scientifiques de cette fermentation. Elle avait un peu disparu avec l'avènement de l'industrialisation, mais elle fait un retour en force.

La fermentation est la transformation par des micro-organismes, dans le sens général du terme : le pain, le vin sont des fermentations.

La lactofermentation, c'est une famille de fermentations réalisées par les bactéries lactiques : yaourt, fromages, légumes, certains fruits, explique Dorothée Goffin, co-fondatrice et directrice de Smart Gastronomy Lab, à Gembloux Agro-Bio Tech/Université de Liège.


Comment expliquer ce retour ?

La fermentation présente des bienfaits qui touchent à la fois à l'écologie, à la santé, à la consommation locale et à la culture. Elle réunit de nouvelles tendances liées à l'écologie, au terroir, à l'idée que ce qui existait avant était mieux, au retour à certaines pratiques ancestrales.

Elle permet de lutter contre le gaspillage, de remettre en avant les légumes de saison, les produits plus locaux et plus identitaires, au goût spécifique.

Pour la santé, pour mieux vieillir aussi, on se tourne vers des produits plus naturels, plus accessibles. La fermentation est en quelque sorte une prolongation au bio. D'un point de vue nutritif, elle apporte, par les probiotiques, les minéraux et les vitamines, une réelle valeur ajoutée aux aliments. En particulier la vitamine C, et James Cook l'avait déjà bien compris, lui qui emmenait de la choucroute à bord de ses bateaux pour éviter le scorbut.
 

Comment fonctionne la fermentation ?

Les micro-organismes - bactéries, moisissures, levures - transforment l'aliment et améliorent ses qualités. 

De nouvelles molécules se forment : les sucres se transforment en alcool ou en gaz, pour obtenir la pétillance dans la boisson, et les acides vont permettre de conserver le produit. La fermentation libère aussi certaines molécules bienfaisantes, des minéraux.

Les bactéries vivantes au sein du produit vont, elles aussi, favoriser un meilleur équilibre gastro-intestinal, une meilleure digestibilité, et c'est finalement la santé dans sa globalité qui va s'améliorer, souligne Dorothée Goffin.
 

"Etant coréen, je crois que je suis tombé dans la lactofermentation"

La Corée est le pays de la lactofermentation, concrétisée par le kimchi, un chou fermenté, rendu piquant par l'ajout d'un piment, explique Sang-Hoon Degeimbre. On y ajoute du sel, qui sert à isoler la bactérie lactique, qui va permettre la transformation du glucose ou de la cellulose en gaz carbonique et en acide lactique, pour permettre sa conservation.

Le chef doublement étoilé a expérimenté tout ce qui est végétal, tous les légumes, les fruits et même les fleurs. Il précise que les fruits, à cause de leur taux élevé de sucre, finissent parfois en alcool.

En particulier, tout ce qui est racine est idéal pour la fermentation : carottes, radis, navets,...

Si vous n'avez pas l'habitude de manger des produits fermentés, votre corps va réagir tout de suite, au niveau des intestins. Mais si vous avez l'habitude, vous pouvez en consommer tous les jours, même en quantité importante, précise Sang-Hoon Degeimbre.
 

Les conseils de Sang-Hoon Degeimbre 

Commencez par un élément simple que vous connaissez, comme la carotte. Expérimentez. Par la suite, vous pourrez ajouter un peu de gingembre, un peu d'ail... pour augmenter la palette de goûts.

Prenez des légumes non traités, idéalement bio pour des bactéries bien vivantes, laissez-les entiers ou coupez-les en morceaux.

Dans un bocal, pour 500 gr de radis par exemple, ajouter 500 gr d'eau, additionnée d'1.5% de sel.

Laissez à température ambiante et après deux jours, la pétillance apparaît, la fermentation se produit.

"On retrouve le radis. La texture est peut-être moins craquante : quand on a un radis frais, ça claque. Sur le radis, j'appelle ça le mou-croquant, c'est un peu tendre sous la dent, puis ça claque de nouveau. Au niveau du goût, il y a une acidité qui est présente et qui fait vraiment saliver. On a l'impression d'avoir un équilibre au niveau du goût et ça, c'est fantastique."

On peut les consommer rapidement après la fermentation, même après deux jours seulement, précise Sang-Hoon Degeimbre.

"Je compare toujours ça à des jeunes vins et des vieux vins. Comme un beaujolais nouveau, sur le fruit avec encore un peu de frisant, vous pouvez manger vos fermentations après deux jours, avec cette fraîcheur du produit, ce craquant, ce léger frisant. Mais ils commencent à devenir vraiment intéressants quand l'acidité se développe. J'aime bien les travailler après dix jours, ou parfois après un ou deux mois. C'est vraiment des concepts différents de produits, avec des réactions différentes."

Le terrain de jeu est incroyable. On expérimente énormément de choses. Aujourd'hui, on arrive à remplacer la viande par un tartare d'hémérocalles lactofermentées. On le coupe en morceau et cela fait comme un petit tartare de veau, avec la texture, le goût, la sensation viandeuse, explique-t-il.
 

La fermentation spontanée

A la maison, on fait de la fermentation spontanée : on profite des bactéries et des moisissures qui sont déjà sur l'aliment. Il faut être sûr que ce soit les bonnes bactéries, les bactéries lactiques, qui prennent le pas sur les mauvaises. C'est comme cela que le produit se stabilise dans le temps. C'est la salinité qui va permettre cette sélection, car seules les bactéries lactiques vont pouvoir résister à cette acidité.

Dorothée Goffin précise qu'il faut toujours travailler dans des conditions d'hygiène parfaites. Le bocal vide doit être bien nettoyé, bouilli. La saumure peut se faire avec un pourcentage de 1 à 6% de sel dans l'eau. Il faut éviter que les légumes soient en contact avec de l'air, une fois dans le bocal.

Si la fermentation rate, des paramètres olfactifs et visuels se manifestent, avec un taux d'acidité élevé. Il faut être prudent, parce que certaines bactéries pathogènes peuvent survivre si la fermentation ne se fait pas bien, avec risques d'intoxication.

"Méfions-nous aussi quand on fabrique du pesto avec des herbes sauvages dans de l'huile, il ne s'agit pas de fermentation et les mauvaises bactéries restent présentes dans le produit", conseille-t-elle.

La tendance est aussi de se tourner vers des boissons fermentées, pour remplacer les sodas. On a ainsi la pétillance, le côté festif sans les méfaits du sucre ou des additifs : kefir, kombucha sont ainsi faits à partir de produits naturels fermentés.
 

Un laboratoire culinaire

Smart Gastronomy Lab, c'est un laboratoire culinaire associé aux Facultés agronomiques de Gembloux. Cette structure originale de 'living lab' inclut le consommateur dans le processus d'innovation, pour développer des produits plus en adéquation avec ses besoins.

Ses objectifs sont la recherche, l'aide aux porteurs de projets, la sensibilisation, en particulier via des ateliers, pour que le consommateur comprenne mieux ce qui se passe dans son alimentation et fasse de meilleurs choix.

>>> Une formation en ligne sur la fermentation en cuisine est proposée
cette semaine par le Smart Gastronomy Lab.
Renseignements sur le site <<<

 

Ecoutez ici la séquence complète de Tendances Première
 

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