Depuis les révélations sur l’existence d’un cyberharcèlement mené par des journalistes et communicants parisiens, des nouveaux témoignages ne cessent d’arriver, que ce soit dans les rédactions ou dans les écoles de journalisme, et pour vous un dénominateur commun à ce phénomène, "l’homosocialité". Ce pourrait être l’origine du " mâle ".
L’homosocialité décrit les mécanismes qui orientent les personnes du même genre à entretenir des relations non sexuelles. Pour comprendre, regardons la socialisation des petits garçons, à l’école, qui passent obligatoirement par la case foot et la mise à distance des petites camarades, reléguées, en général, sur les bords de la cour.
Cette socialisation non-mixte, est accompagnée d’une mise à distance des émotions pour les garçons : douleur, chagrin, réprimées à coups de femelette, de pleurnicheuse… derrière ces injonctions coercitives, il y a la crainte – complètement infondée – de faire d’un petit garçon un homosexuel. Ce préjugé existe encore malheureusement.
Les petits gars souffrent donc de ces biais de genre. Pour s’en convaincre, les enseignants d’une école maternelle suédoise se sont filmés plusieurs jours. Résultat édifiant : les prof réclamaient la sagesse pour les filles, et consolaient moins les garçons. Reste alors les émotions tolérées socialement pour les garçons, la colère et l’agressivité.
Beaucoup d’hommes peu à l’aise face à ces injonctions virilistes
Etre un homme ne rime pas toujours avec virilisme. Eve Sedgwick écrivaine américaine dans son livre "Between men", explique l’homosocialité masculine comme un cercle vicieux où plus on est viril, plus on glorifie le masculin, plus on doit être misogyne et homophobe pour dissiper la tension inhérente à l’injonction à l’hétérosexualité.
Sedgwick s’est donc attachée à montrer comment les hommes utilisent stratégiquement l’homophobie et sexisme. Pour casser la tension, les blagues homophobes sont courantes. La place des femmes dans les rédactions est aussi la conséquence involontaire de cette homosocialité masculine. La ligue du Lol en est l’exemple, elle en est le produit aussi.
Les femmes deviennent des pions dans ce contexte
Ce qui importe, c’est le jugement des autres hommes, pour prouver qu’ils sont du bon côté de la barrière, à leur place. Ce que confirme Baptiste Fluzin, un des membres de la ligue dans un long message qui n'esquive rien, sur linkedin. Parlant de Twitter, il dit :
"La vérité c'est qu'une nouvelle plateforme s'ouvrait et nous l'investissions comme un free-fight géant, la bave aux lèvres (..). Nous en étions les flics, la milice rigolarde et entre deux ratonnades numériques, on se donnait des notes artistiques". C’était la surenchère dans une ambiance de 3ème mi-temps. Une ambiance qui existe aussi dans les rédactions comme l’a montré l’autre scandale du même genre, cette fois au Huffington Post.
Trois journalistes du média en ligne ont été licenciés à cause d’insultes sexistes et racistes particulièrement violentes tenus sur un groupe de discussion intitulé, Radio Bière Foot, à l’encontre de collègues féminines.
L’arrivée de nouveaux mots dans les rédactions comme mansplaining, manspreading, masculinité toxique, invitent la profession à réfléchir sur ses propres comportements. Il est temps de repenser les imaginaires liés à ce que devrait être un homme et une femme. Nos attitudes, ne devraient pas être analysées sous le prisme genre. Finalement, les représentations de genre pourrissent la vie tant aux hommes qu’aux femmes.