Le président polonais Andrzej Duda a signé jeudi un décret sur l’introduction de l’état d’urgence pendant 30 jours à la frontière avec la Biélorussie, de crainte d’un flux massif de migrants et en prévision d’un prochain exercice militaire russe, a indiqué son porte-parole.
Plusieurs milliers de migrants, pour la plupart originaires du Moyen-Orient, ont franchi la frontière entre la Biélorussie et l’Union européenne, en Lituanie, en Lettonie et en Pologne ces derniers mois, l’UE soupçonnant une forme de représailles du régime de Minsk face aux sanctions européennes.
"Pour la sécurité de la Pologne"
"La situation à la frontière est difficile et dangereuse. […] Nous devons prendre de telles décisions et assurer la sécurité de la Pologne et de l’UE", a déclaré le porte-parole du président, Blazej Spychalski.
Selon le décret signé par le président et qui entre en vigueur jeudi à minuit, dans 183 localités de la zone frontalière, l’accès des médias à la zone concernée sera formellement interdit et celui des personnes autres que les riverains fortement limité.
La section polonaise du Press Club a aussitôt protesté contre "la privation de l’opinion publique d’informations provenant de sources indépendantes", dans un communiqué.
Il s’agit du premier état d’urgence en Pologne depuis la chute du communisme en 1989.
Les manifestations sont également interdites dans la zone concernée, une bande de territoire large d’environ trois kilomètres le long de la frontière.
Toute personne y séjournant doit être munie d’une pièce d’identité et le port d’armes est banni.
Un jeu politique ?
L’opposition accuse le parti populiste au pouvoir Droit et Justice (PiS) d’utiliser la question des migrations comme un moyen de remonter dans les sondages.
Le Président dispose désormais de 48 heures pour soumettre le décret au Parlement qui a le droit de le révoquer. Le Parlement doit se réunir lundi.
Selon le gouvernement conservateur, l’état d’urgence est destiné à diminuer la tension à la frontière avec la Biélorussie qui compte 418 kilomètres.
Varsovie affirme que le régime de Minsk a, en l’espace de quelques semaines, fait venir sur son territoire environ 10.000 Irakiens pour les diriger sur la frontière avec la Pologne, la Lituanie et la Lettonie.
Varsovie est également inquiète du prochain exercice militaire russe Zapad-2021, qui doit engager quelque 200.000 soldats sur les territoires russe et biélorusse, dont une douzaine de milliers de soldats russes à proximité de la frontière polonaise.
"En tant qu’État, nous devons avoir le sentiment que notre frontière orientale est bien préparée à diverses éventualités. D’où le grand nombre de soldats, de gardes-frontières et de policiers", a déclaré jeudi le ministre de l’Intérieur Mariusz Kaminski.
Récemment, la Pologne a dépêché sur la frontière 2000 soldats et a commencé la construction d’une clôture en barbelés pour la protéger contre la migration illégale.