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La réforme des règles budgétaires européennes : de la couture sur mesure pour chaque pays membre

Par Sandro Calderon via

La Commission européenne a présenté cette semaine une réforme qui était très attendue. Un peu crainte aussi dans certains pays de l’Union européenne. C’est la réforme des règles budgétaires européennes, dont le petit nom officiel est Pacte de stabilité et de croissance. L’enjeu est important.

Cet instrument, qui occupe une place centrale dans la construction européenne, existe depuis plus de 25 ans. Mais aujourd’hui, il est jugé obsolète et inefficace.

L’obésité des dettes

Les chiffres le prouvent. Les dettes publiques pèsent de plus en plus lourd dans l’Union. La Grèce détient le record absolu avec une dette à 171% du PIB. La Belgique est à 105%. En tout, aujourd’hui, plus d’une dizaine de pays sont loin, parfois très loin du plafond autorisé qui est de 60%.

Les crises successives, la crise financière de 2008, la crise de l’euro, plus récemment la pandémie et aujourd’hui la guerre en Ukraine ont mis en lumière tous les défauts du Pacte de stabilité.

Basé sur une surveillance stricte et annuelle du déficit et de la dette, il s’est révélé contre-productif. Il a imposé une rigueur budgétaire, pour ne pas dire une austérité, qui a freiné les investissements et la croissance.

Une nouvelle garde-robe

Que fait-on quand on ne rentre plus dans ses vêtements ? On en achète des nouveaux ? On fait régime ? C’est le dilemme vécu par la Commission européenne en préparant cette réforme. Après deux ans d’intense réflexion, elle vient de trancher.

Face à l’obésité des dettes publiques, elle propose de modifier la garde-robe des règles budgétaires européennes. Avec sa réforme, elle pourra proposer aux Etats-membres des régimes personnalisés. Du sur-mesure.

Et ça paraît logique. Pourquoi tailler des costumes, tous les mêmes, à des Etats-membres qui vivent des situations financières et économiques différentes ?

Fini les régimes annuels à marche forcée

Le principe de base de la réforme est d’assainir les finances des Etats membres de manière plus progressive. Fini les objectifs annuels de réduction du déficit et de la dette. Fini les régimes à marche forcée.

A l’avenir, la Commission veut surveiller les dépenses publiques sur des périodes longues. Chaque pays devra confectionner un plan avec des objectifs de dépenses, des projets de réformes et d’investissements sur une période d’au moins quatre ans. A la fin de cette période, le niveau de la dette devra être plus bas qu’au début.

Un véritable assouplissement des règles budgétaires européennes ?

Les avis divergent. Car si les pays membres vont gagner des marges de manœuvre, auront plus de temps pour corriger leur dérapage budgétaire, les objectifs chiffrés restent les mêmes. Les gouvernements devront toujours viser un déficit maximal de 3% du PIB et une dette maximale de 60%.

Et puis attention. Des garde-fous sont prévus. Les pays fortement endettés, comme la Belgique, seront plus encadrés que les autres. Et gare à ceux qui ne respecteraient pas les nouvelles règles. Une procédure d’infraction serait ouverte – par défaut – avec à la clé, des sanctions financières qui vraiment appliquées. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

Des habits de lumière pour l’Union européenne

Avant d’entrer en vigueur, la réforme du Pacte de stabilité devra d’abord être approuvée par le Parlement européen et les Etats membres. Avec ses propositions, la Commission a essayé de contenter tout le monde.

L’assouplissement des règles vise à satisfaire les pays du sud : l’Italie, l’Espagne, la France qui demandent plus de flexibilité. Les garde-fous doivent rassurer les partisans de l’orthodoxie budgétaire, l’Allemagne en tête.

Les négociations entre les deux camps s’annoncent ardues. Mais un compromis, si possible rapide, est nécessaire.

Car une dette soutenable permettra aux Etats-membres de financer leurs politiques économiques et sociales, d’investir dans les transitions écologique et numérique, ou encore de dégager des moyens pour assurer leur sécurité.

De quoi tailler, en même temps, à l’Union européenne un habit de lumière dans l’arène des puissances mondiales.

La question Déclic

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