Belgique

La réforme du statut d'artiste en Belgique tient-elle ses promesses ?

Ce 1er décembre, la Chambre des représentants votait la création d'une commission du travail des arts, la dernière étape en date pour la mise en œuvre de la réforme du statut d'artiste en Belgique, annoncée depuis le printemps dernier.

Mais dans les faits et selon les principaux intéressés, comment est vécue la mise en place de cette réforme, et surtout, a-t-elle atteint ses objectifs jusqu'ici ? Témoignages.

Une reconnaissance simplifiée

"Biche de Ville" nous donne une petite représentation-minute.
"Biche de Ville" nous donne une petite représentation-minute. © RTBF

C'est jour de fête pour Biche de Ville. Ce chanteur bruxellois tente depuis des années d'obtenir un statut d'artiste, un régime de sécurité sociale adapté au secteur. Aujourd'hui, c'est chose faite. Ses revenus mensuels étaient d'environ 500 € par mois. Ils doubleront.

Biche de Ville, artiste musical.

"Ce que ce statut va me permettre c'est de libérer de la place où créer mon art sereinement. Et j'avoue que ce papier, il l'a un peu fait. J'ai senti, j'ai senti en fait les choses qui coulaient comme ça de mes doigts. J'ai été d'un coup libéré d'un poids."

Un renouvellement du statut plus compliqué

Elsa Poisot, metteuse en scène, comédienne et autrice, pointe du doigt le manque de considération vis-à-vis du temps de préparation nécessaire aux métiers d'artiste.
Elsa Poisot, metteuse en scène, comédienne et autrice, pointe du doigt le manque de considération vis-à-vis du temps de préparation nécessaire aux métiers d'artiste. © RTBF

Un soulagement de courte durée. Selon beaucoup de travailleurs des arts, cette réforme simplifie l'accès au statut, mais elle compliquerait son renouvellement. Il faut prouver plus de jours de travail en tant qu'artiste, remplir plus de paperasse, ce qui laisse moins de temps à la création, l'écriture et la préparation. Elsa Poisot a ce statut depuis quinze ans. Aujourd'hui, elle craint que la réforme ne pousse à la précarité.

Elsa Poisot, metteuse en scène, comédienne et autrice.

"Ce qui va se passer là, avec cette augmentation du nombre de jours qu'on doit prester pour reconduire le statut, c'est qu'on n'a plus de temps pour la réflexion, on n'a plus le temps pour la  dramaturgie. Et ce travail invisible n'a jamais été valorisé. Mais il était encore réalisable auparavant parce qu'on ne devait pas courir après le cachet."

Des techniciens plutôt déçus

Sébastien Chartier, polytechnicien, en plein travail de précision.

Même problème pour les techniciens indispensables à la création. Sébastien Chartier est polytechnicien dans le secteur artistique. Il y a huit ans, il tente d'obtenir le statut d'artiste. C'était si difficile que depuis, il a renoncé.

Sébastien Chartier, polytechnicien dans le secteur artistique.

"Il y a toute une série de problèmes qui se présentent aux techniciens parce qu'on nous demande que la nature de notre travail soit strictement artistique. Mais dans les faits, même si la nature même du chantier n'est pas artistique, par exemple si je fais un plan lumière, ça reste une création, ça reste de l'art. Et ça, ils ne veulent absolument pas le reconnaître."

Cette réforme devait initialement faciliter l'accès aux techniciens. Sébastien Chartier a participé aux premières discussions autour de cette réforme. Après des moments d'espoir, il abandonne, visiblement déçu : 

"À un moment il a fallu reprendre notre activité professionnelle, et puis on s'est simplement désintéressé de cette réforme. Elle n'est vraiment pas du tout ce qu'on attendait. Ce qu'on voulait, c'était juste être reconnu comme intermittents et ce n'est toujours pas le cas."

Un bilan très mitigé, voire médiocre

C'est donc la déception autour de cette réforme attendue depuis près de 20 ans par ces travailleurs des arts, souvent en situation de précarité. Vincent Raoult est comédien et membre de l'UPACT/Union de Professionnel·les des Arts et de la Création. Et il tire un bilan plutôt amer :

Vincent Raoultn, comédien et membre de l'UPACT, l'Union de Professionnel·les des Arts et de la Création.

"Il y a eu des belles intentions, des belles déclarations d'intention. Et puis finalement, avec ce rapiéçage politique qui s'est fait après la consultation, on se retrouve avec un système qui finalement est désavantageux pour les artistes et pour les techniciens et tous les métiers du travail des arts."

La suite de la réforme entrera en vigueur en janvier. Une commission du travail des arts sera créée, composée à moitié d'artistes chargés de délivrer ce précieux statut.

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