Prolongation du nucléaire : quel coût pour le démantèlement et la gestion des déchets ?
Déclic
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Belgique
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Le gouvernement fédéral et Engie se sont accordés lundi sur les principes qui présideront à la prolongation des réacteurs de Tihange 3 et Doel 4. Qu’en dit la presse ce matin ? Le titre en une de la Dernière Heure illustre bien la tonalité générale : "Ceci n’est pas un accord".
“Tout n’a pas encore été décidé”, il s’agit ici d’un accord de principe, à compléter dans les mois à venir. Reste en effet une question de taille : combien cela va-t-il coûter ? Combien pour gérer le traitement des déchets nucléaires ? Plusieurs milliards c’est sûr, mais la réponse viendra en mars seulement, ce qui fait de ce deal un accord partiel.
Pourtant on connaît l’adage, si souvent utilisé dans les négociations à la belge : "tant qu’il n’y a pas d’accord sur tout, il n’y a d’accord sur rien". Une règle politique qui semble gravée dans le marbre. Et pourtant, cette logique ne s’applique pas à cet accord. Ou plutôt à ce projet d’accord. La faute à l’urgence, explique Het Nieuwsblad. L’urgence après des années d’atermoiement politique.
"La saga nucléaire belge n’a pas encore dit son dernier mot", prévient Le Soir. "Primo, parce que l’accord conclu ce lundi n’est pas finalisé dans ses moindres détails – une nouvelle étape est ainsi prévue à la fin mars. Secundo, parce que cet accord colmate l’urgence et bétonne in extremis ce qu’il fallait absolument sauver : la sécurité d’approvisionnement en énergie de la Belgique dès l’hiver 2026 et pour les années suivantes. Il n’est pas question ici d’une véritable stratégie énergétique qui devrait encore occuper et bousculer la Vivaldi."
On a entendu le Premier ministre Alexander De Croo dire que, grâce à cet accord, l’Etat belge reprenait la main en matière énergétique, puisque le deal prévoit une participation de 50/50 entre la Belgique et Engie. "C’est la façon positive de voir les choses", dit l’éditorialiste du Soir. L’Etat récupère deux réacteurs en fin de vie, "non parce qu’il s’en est emparé mais parce qu’Engie n’en voulait plus, ou alors juste une moitié."
Un coût qui sera supporté par les générations à venir. Le résultat du "manque d’anticipation qui a caractérisé la politique énergétique de la Belgique durant ces vingt dernières années", selon L’Avenir. Et c’est plus généralement "la douloureuse facture d’une cécité qui a touché toute l’Europe".
D’autres pays européens ont également commis des erreurs politiques spectaculaires, rappelle De Standaard. L’Allemagne a accéléré la fermeture de ses centrales nucléaires et s’est jetée sans réfléchir dans les bras d’une Russie peu fiable. La France, elle, a tout misé sur le nucléaire, mais s’est heurtée à des problèmes d’usure et de maintenance imprévus.
La Libre veut quand même y voir du positif : "c’est une bonne nouvelle. Pour plusieurs raisons, dont les moindres ne sont pas, en principe, la sécurité d’approvisionnement ces prochaines années dans un contexte énergétique tendu, et la reprise en main partielle de la Belgique d’un outil ô combien stratégique, qu’il n’aurait jamais fallu laisser à la France. Cyniquement dit, notre contribution au climat s’en trouvera enjolivée en prolongeant des réacteurs nucléaires, même si le raisonnement est en partie biaisé par la construction concomitante de centrales à gaz…"
Un optimisme que ne partagent pas les autres titres de presse. Surtout sur la question de la sécurité d’approvisionnement. Ils se montrent beaucoup moins rassurés. Het Nieuwsblad par exemple, estime que les lumières risquent encore de s’éteindre au cours de l’hiver 2025-2026. Idem pour De Tijd qui rappelle que le gouvernement n’a pas obtenu d’Engie la garantie ferme que les deux réacteurs nucléaires seront encore en service d’ici là. L’accord prévoit pour Engie une obligation de moyens, pas de résultats.
Dans L’Echo l’éditorialiste parle de "soulagement". C’est le mot qui lui vient à l’esprit. "Après près de 20 ans d’errements politiques et près de 2 ans d’indécision, de bagarres intestines, de reports d’échéances, ce gouvernement a finalement paraphé un texte qui lève un énorme brouillard sur notre paysage énergétique. Ce 9 janvier 2023 est à marquer d’une pierre blanche, une pierre nucléaire."
Soulagement donc, mais pas aveuglement, écrit l’éditorialiste. "D’abord, parce que certains petits diables sont venus se loger dans les détails. Le premier concerne évidemment cette "méthodologie" pour déterminer la facture finale des déchets. […] Autre petit diable, autres questions : comment se déroulera la relation entre Engie et les prochains gouvernements au sein de ce véhicule commun chargé de la gestion des deux réacteurs prolongés ? Engie ne garde-t-il pas là un moyen de pression sur l’État et sur ses velléités taxatoires dont on sait qu’elles ont tendance à cabrer l’énergéticien ?
Ces interrogations et bien d’autres viendront jalonner l’histoire d’un long fleuve qui, jusqu’à présent, fut tout sauf tranquille. L’accord du jour n’est d’ailleurs qu’un aspect des immenses défis énergétiques à venir."
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