L’agitation politique autour de Jean-Luc Crucke la semaine passée n’était qu’un apéritif pour le Gouvernement wallon. Le menu des prochains mois est chargé et les tensions risquent bien de redoubler. Les deux dernières années du Gouvernement wallon risquent bien de ressembler à cette célèbre scène de l’Aile ou la cuisse où Louis de Funès est obligé de manger une infâme nourriture industrielle sous la menace d’un fusil de chasse.
Les huîtres
L’affaire Crucke ce n’était que les huîtres pas fraîches. Et les huîtres ne sont pas terminées, il n’est pas certain que Jean-Luc Crucke affaibli par cette affaire ne remette pas sa démission fin du mois. Cela dépendra des discussions au sein de son parti et de la ligne qu’il choisit. Une ligne plus offensive, quasiment de particiopposition souhaitée par Georges-Louis Bouchez à la manière de ce qu’il imprime déjà au Fédéral ou une ligne plus accommodante comme celle que mène le duo Borsus Crucke depuis le début de la législature. Ce n’est pas qu’une question de personne, c’est aussi une question de ligne qui se décide aujourd’hui chez les libéraux.
La choucroute
Les huîtres ne sont pas encore terminées et déjà le reste du menu s’annonce copieux. La fiscalité auto en Wallonie c’est la choucroute. Le décret Crucke qui a valu tant de foin contenait une disposition réservant les utilitaires aux professionnels. Dans le décret Henry il est question de revoir toute la fiscalité en fonction des émissions de CO2 et de la masse/puissance de la voiture. L’objectif est notamment d’encourager des voitures moins puissantes et moins lourdes et dès lors moins polluantes. C’est dans l’accord du Gouvernement, mais les premières esquisses sont sorties et certains hurlent déjà. La fédération des distributeurs et réparateurs parlent d’un décret qui veut “tuer le SUV”.
La poule au pot
La poule au pot, et il faut tout finir. La poule au pot c’est le budget wallon. Même si l’accord de Gouvernement indique bien aucune taxe nouvelle, les prochaines années s’annoncent compliquées. Car la dette wallonne prend des proportions inquiétantes. Si rien n’est fait d’ici elle atteindra 50 milliards d’euros en 2030. 50 milliards, un chiffre qui ne veut rien dire. Sauf si on le compare au budget d’environ 15 milliards de recettes et un déficit de 4 milliards par an. La poule au pot est tout simplement énorme. Et il faudra bien la manger, tricatel ou pas.
Le ministre Jean-Luc Crucke a prévu un plan, une trajectoire pour manger la poule au pot par petit bout en plusieurs années. Mais il faudra bien faire des économies, sur les dépenses de fonctionnement, mais aussi potentiellement sur le Forem, sur l’Aviq, sur les aides à l’emploi et peut-être trouver des recettes.
Autant de dossiers beaucoup plus sensibles que les huîtres “fiscalité juste”. D’autant que plus que la poule au pot peut soudain grossir d’un coup par un événement extérieur comme les inondations, une remontée des taux d’intérêts ou la faillite annoncée par beaucoup de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Le Gouvernement wallon va donc être forcé de manger les plats les plus difficiles d’ici la fin de la législature et il n’est pas en forme. Outre la crise au MR, il y a aussi une crise pour Elio Di Rupo. Le ministre-président a subi un camouflet sur son plan de relance, unanimement rejeté par la FGTB et l’Union Wallonne des entreprises comme du saupoudrage à l’ancienne. Manger un menu tricatel ce n’est déjà pas facile, mais le manger quand on est en petite forme comme le Gouvernement wallon c’est le chemin de croix. Il reste deux ans à souffrir avant la campagne électorale de 2024.