L'info culturelle

La Zwanze, l’identité belge

Great Zwans Exhibition

© Artha, Eliane Van den Ende

La Zwanze, L’humour comme identité belge est une enquête menée par la virevoltante détective de l’art, Eliane Van den Ende, car zwanzer est un art. La Zwanze est un type d’humour constitutif de l’identité belge. Sous des airs d’humour potache ou trivial, la zwanze fait penser après avoir fait rire, écrivait Sander Pierron (1872-1945), homme de lettres et critique d’art, coordinateur de la Great Zwans Exhibition de 1914.

L'étymologie

Des dictionnaires historiques descriptifs en moyen néerlandais définissent " zwants " en ces termes : " un mouvement virevoltant, propre à la danse ". Le vocable " zwants " se réfère à la traîne d’une robe. Le mot connaît d’autres orthographes ; " swans " ou " schwanz " renvoient à la petite queue d’un animal. " Zwanzer, écrit Eliane Van den Ende, c’est virevolter ".

L’esprit frondeur

Dans la jeune Belgique du 19e siècle, la zwanze s’illustre par un esprit frondeur, hérité de Tyl Uilenspiegel, un farceur qui moquait les règles de la bourgeoise et bouleversait l’ordre social. Il résistait à toute occupation du territoire. Les Zwanzeurs refusent toute occupation de l’esprit. Subversifs à souhait, ils se moquent de manière subtilement énaurme du petit monde culturel, artistique et politique. Ils combattent l’esprit de sérieux et battent en brèche les idées reçues. Dada n’est pas loin.

Thyl Uylenspiegel
Thyl Uylenspiegel © Artha, Eliane Van den Ende

La farce, de l’art ou du cochon

Etonnamment, les zwanzeurs sont des notables, parfois même des officiels qui brocardent les institutions et se regroupent au sein de sociétés aux noms énigmatiques : L’Ordre Petotico-Maronico-Huitrique, Les Agathopèdes, La Société des Joyeux, Le Diable au corps. Les hommes festoient. Ils ripaillent. Les femmes ne sont pas admises dans ces sociétés d’hommes. Les Agathopèdes sont amis comme cochons. Pour être membre des Agathopèdes, le candidat participe à une cérémonie d’initiation. Il doit répondre à des questions loufoques : " L’adultère consommé sur un mur mitoyen peut-il être considéré comme perpétré dans le domaine conjugal ? " ou  " Les Romains portaient-ils des parapluies à leur arrivée en Belgique. Prouvez votre opinion par des documents archéologiques et numismatiques. "

Zwanze, illustration
Hymne au cochon

Les notables

Les Agathopèdes comptent entre autres membres Alphonse Balat, architecte royal ; Bruno Renard, ministre de la guerre ; Auguste Baron, fondateur de l’ULB, et Renier Chalon, receveur des contributions, bibliophile et numismate. Renier Chalon est, écrit Eliane Van den Ende, un " Uylenspiegel du monde scientifique ". Il crée de faux timbres-poste et des monnaies tout aussi fictives. Il invente la bibliothèque d’un personnage imaginaire, le " comte de Fortsas ". Les bibliophiles mordent à l’hameçon.

Médaille Renier Chalon
Médaille Renier Chalon © Artha, Eliane Van den Ende

Louis Ghémar

Un autre personnage clé est Louis Ghémar. Caricaturiste dans Le Charivari, il est le photographe du Roi. Il photographie la Senne, la rivière de Bruxelles, avant son voûtement, et il immortalise le Banquet des Misérables offert à Victor Hugo à Bruxelles en 1862. En 1870, Ghémar, le Directeur de la Joie Publique ", selon son ami Nadar, crée son Musée Fantaisiste. Une baraque de bois où il présente des pastiches, de vrais Ghémar à la manière de ... Millet, Courbet, Géricault, Fromentin, Puvis de Chavannes… Les Belges ne sont pas épargnés. Il peint à la manière de Madou, Gallait, Wiertz, Navez, Verboeckhoven. Il expose le premier monochrome blanc de l’histoire, Toile blanche / Peinture de l’avenir, préfigurant la Composition suprématiste : carré blanc sur fond blanc (1918), de Kasimir Malevitch, et devançant les Arts incohérents qui amuseront le public parisien et précédant ainsi l’exécution du tableau blanc d’ Alphonse Allais, titré : Première communion de jeunes filles chlorotiques par un temps de neige. Ghémar ne donne pas dans le calembour. Il note : Commande du gouvernement. Le Musée Fantaisiste est une attaque contre l’institution. Il crée un premier musée d’art contemporain et fustige les académies et les salons officiels. Il attache une truelle à un pastiche de Gustave Courbet qui maniait le couteau comme une truelle. Il cloue de vrais clous aux semelles des zouaves d’Horace Vernet. Il ajoute des bras à une Vénus de Milo. Elle pourra ainsi lire la Constitution belge. La critique du pouvoir revient comme un boomerang.

Toile blanche Louis Ghémar
Toile blanche Louis Ghémar © Artha, Eliane Van den Ende

L'anar(t)chie

La zwanze flirte avec l’anarchie, jusqu’à affirmer ses droits aux élections. Les Agathopèdes ont un programme en 1848 à l’adresse des électeurs conservateurs, sous-entendu, des conservateurs de musée. Les liens avec le Pacifisme sont aussi affirmés.

La Zwanze. L'humour comme identité belge est un ouvrage qui fera date. L’auteure Eliane Van den Ende, historienne et journaliste culturelle, se fait une fête de pointer les origines de l’humour et de l’identité belges. Des documents exceptionnels illustrent des propos gaillards. Livre paru aux éditions Artha. Un livre à offrir !

Infos  : www.zwans-zwanze.be

Eliane Van den Ende au micro de Pascal Goffaux.

La Zwanze, l’identité belge

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