L’Afghanistan aux mains des talibans : panique à Kaboul, les nouveaux maîtres sèment la terreur, les Afghans fuient

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Par RTBF avec Agences

L’Afghanistan se trouve lundi aux mains des talibans après l’effondrement des forces gouvernementales et la fuite à l’étranger du président Ashraf Ghani, qui a reconnu leur victoire au terme d’une guerre de près de 20 ans.

A Kaboul, les habitants tentent de fuir. Les forces américaines, qui tiennent l’aéroport, ont tiré en l’air lundi matin, des milliers d’Afghans ayant envahi le tarmac, cherchant à fuir leur pays après la prise du pouvoir par les talibans, a rapporté un témoin à l’AFP.

"J’ai très peur. Ils tirent des coups de feu en l’air. J’ai vu une jeune fille être écrasée et tuée", a déclaré ce témoin.

Les talibans ont gagné

"Les talibans ont gagné", a reconnu dimanche soir le président, qui se trouverait désormais au Tadjikistan, tandis que les insurgés célébraient une victoire militaire aussi rapide que totale en investissant le palais présidentiel à Kaboul.

Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le mollah Abdul Ghani Baradar, co-fondateur des talibans, a salué la victoire du mouvement islamiste. "A présent, c’est le moment d’évaluer et de prouver, à présent nous devons montrer que nous pouvons servir notre nation et assurer la sécurité et le confort dans la vie", a-t-il dit.


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L’entrée redoutée des combattants a provoqué un vent de panique dans la capitale, où des milliers d’habitants s’efforçaient de fuir, s’agglutinant notamment à l’aéroport où des scènes de chaos ont été rapportées.

L’aéroport de Kaboul "sécurisé" par les Américains

Le drapeau américain a été retiré tôt lundi de l’ambassade des Etats-Unis à Kaboul et "mis en sécurité avec le personnel de l’ambassade" regroupé à l’aéroport dans l’attente d’une évacuation, ont annoncé depuis Washington le département d’Etat et le Pentagone.

"Nous pouvons confirmer que l’évacuation en toute sécurité de tout le personnel de l’ambassade est maintenant terminée", a déclaré dans un communiqué le porte-parole du département d’Etat Ned Price. Le périmètre de l’aéroport est "sécurisé par l’armée américaine", a-t-il ajouté.

"Au cours des prochaines 48 heures, nous aurons étendu notre présence de sécurité à près de 6000 militaires avec une mission centrée uniquement sur la facilitation de ces efforts et qui prendra en charge le contrôle aérien", précise-t-il.

"Demain (lundi) et au cours des prochains jours, nous allons transférer hors du pays des milliers de citoyens américains qui résidaient en Afghanistan, ainsi que des employés locaux de la mission américaine à Kaboul et leurs familles, ainsi que d’autres Afghans particulièrement vulnérables", selon le texte.


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De nombreux autres diplomates et ressortissants étrangers ont également été évacués à la hâte de Kaboul dimanche. Le Conseil de sécurité de l’ONU doit se réunir lundi à 14h00 GMT pour débattre de la situation en Afghanistan.

La débâcle est totale pour les forces de sécurité afghanes, pourtant financées pendant 20 ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis. En dix jours, le mouvement islamiste radical, qui avait déclenché une offensive en mai à la faveur du début du retrait des troupes étrangères, notamment américaines, a pris le contrôle de quasiment tout l’Afghanistan.

Et ce vingt ans après en avoir été chassé par une coalition menée par les États-Unis en raison de son refus de livrer le chef d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.

Cohue

Taliban closes in on Afghanistan&#39 ; s capital Kabul

Au fil de la journée de dimanche, la panique s’était rapidement emparée de Kaboul à mesure que les insurgés, qui encerclaient déjà la ville, s’en rapprochaient puis y pénétraient. Les magasins ont fermé, des embouteillages monstres sont apparus, des policiers ont été vus troquant leur uniforme pour des vêtements civils.

Une énorme cohue s’est formée auprès de la plupart des banques, les gens cherchant à retirer leur argent tant qu’il était encore temps.

Sur les réseaux sociaux, des vidéos montraient des groupes de combattants talibans lourdement armés patrouillant dans les grandes villes, brandissant des drapeaux blancs et saluant la population.

D’autres scènes apparemment tournées à l’aéroport faisaient état de scènes de cohue avec des foules énormes envahissant le tarmac dans l’espoir de monter à tout prix à bord d’un avion pour fuir le pays.


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La peur régnait aussi parmi les dizaines de milliers de personnes réfugiées à Kaboul ces dernières semaines pour fuir les violences dans leur région.

"Je crains qu’il n’y ait beaucoup de combats ici", a confié un médecin ayant requis l’anonymat, arrivé de Kunduz (nord) avec 35 membres de sa famille. "Je préférerais rentrer chez moi, où je sais que ça s’est arrêté".

Lorsqu’ils dirigeaient ce pays, entre 1996 et 2001, les talibans avaient imposé leur version ultra-rigoriste de la loi islamique.

Au moins cinq morts à l'aéroport

Au moins cinq personnes sont décédées à l'aéroport de Kaboul alors que des milliers d'Afghans tentaient d'embarquer de force dans des avions quittant la capitale, ont rapporté plusieurs témoins à l'agence de presse Reuters.

Un témoin oculaire a indiqué avoir vu les corps de cinq personnes être chargées dans un véhicule. Le journal américain Wall Street Journal a reçu des informations selon lesquelles trois personnes ont été abattues. 

Donald Trump appelle à la démission de Joe Biden

"Ceci n’est pas Saïgon", a assuré le secrétaire d’Etat américain Antony Blinken sur CNN, évoquant la chute de la capitale vietnamienne, en 1975, un souvenir encore douloureux pour les États-Unis.

Mais la pilule est amère pour Washington dont l’image en ressort profondément écornée et qui déplore 2500 personnes tuées, ainsi qu’une facture de plus de 2000 milliards de dollars.

Le président américain Joe Biden a défendu sa décision de mettre fin à 20 ans de guerre, la plus longue qu’ait connue l’Amérique. "Je suis le quatrième président à gouverner avec une présence militaire américaine en Afghanistan […] Je ne veux pas, et je ne vais pas, transmettre cette guerre à un cinquième", a-t-il lancé dimanche.

Son prédécesseur Donald Trump a fustigé "l’une des plus grandes défaites dans l’histoire américaine" et l’a appelé à démissionner.

Première rotation d'évacuation de Français 

La première rotation aérienne d'évacuation de Kaboul organisée par l'armée française entre sa base aux Emirats et la capitale afghane tombée aux mains des talibans est prévue d'ici "la fin de ce lundi", a déclaré la ministre française des Armées Florence Parly.

"Nous avons organisé sur la base dont nous disposons aux Emirats arabes unis les conditions d'accueil des premiers évacués, qu'il s'agisse de ressortissants français qui seraient encore à Kaboul, mais qu'il s'agisse aussi des personnes qui sont nous notre protection et que nous allons évacuer", a-t-elle dit.


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Cette opération militaire d'évacuation, baptisée Apagan, mobilise notamment deux avions de transport de l'Armée de l'Air, un C130 et un A400M, qui ont décollé dimanche soir et lundi matin de France pour les Emirats.

L'ambassadeur russe va rencontrer les Talibans

L'ambassadeur de Russie à Kaboul va rencontrer les talibans mardi, a annoncé lundi l'émissaire du Kremlin pour l'Afghanistan, Zamir Kaboulov, précisant que Moscou allait décider de reconnaître ou non le nouveau pouvoir afghan en fonction de ses "agissements".

"L'ambassadeur russe (Dmitri Jirnov) est en contact avec les talibans. Demain, il va rencontrer leur coordinateur pour la sécurité", a indiqué Zamir Kaboulov à la radio Echo de Moscou. "La reconnaissance ou non va dépendre des agissements du nouveau régime", a-t-il ajouté.

D'autres nations ont réagi

La Grande-Bretagne a réagi en qualifiant la situation comme un "échec pour la communauté internationale". Le ministre britannique de la Défense Ben Wallace a averti que ce n’était "pas le moment" de reconnaître les talibans comme gouvernement officiel du pays.

L'Allemagne a, quant à elle, fait savoir qu'elle voulait déployer des soldats en Afghanistan pour évacuer les derniers Allemands ainsi que des Afghans menacés dans le pays reconquis par les talibans après le départ des troupes de l’Otan.

Concernant la Chine, elle a indiqué lundi qu’elle souhaitait des "relations amicales" avec les Talibans. Pékin "respecte le droit du peuple afghan à décider de son propre destin et de son avenir", a affirmé devant la presse une porte-parole de la diplomatie chinoise, Hua Chunying.

Les ministres des Affaires étrangères des pays de l’UE tiendront mardi une réunion par visioconférence pour discuter de la situation en Afghanistan, où les Etats occidentaux accélèrent leurs opérations d’évacuation.

Afghanistan: le pays est aux mains des Talibans

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Afghanistan aéroport: une foule d'Afghans essaye de quitter le pays

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