Laurence Vielle

Laurence Vielle lit "À ce monde dément, j’oppose mon refus !", un poème de Marina Tsvetaïeva

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Par Victoria De Schrijver

Laurence Vielle lit "À ce monde dément, j’oppose mon refus !", d’une grande figure de la poésie russe du 20e siècle, Marina Tsvetaïeva.

Marina Tsvetaïeva est née un 26 septembre 1892 à Moscou. Elevée au milieu des livres, fille d’un professeur d’université, elle est une grande figure de la poésie russe du 20e siècle, sa poésie sera pourtant rejetée par le régime en place. En 1913, la poétesse écrit :

"Éparpillés dans des librairies, gris de poussière,
Ni lus, ni cherchés, ni ouverts, ni vendus,
Mes poèmes seront dégustés comme les vins les plus rares
Quand ils seront vieux. "

Des mots qui ne sont pas innocents, son œuvre n’étant réellement découverte qu’à partir des années 1960. Elle quitte la Russie pour s’installer à Paris mais revient en Union soviétique à l’aube des années 1940. La Russie de Staline est soupçonneuse et les séjours à l’étranger sont suspects. Sa sœur, son mari et sa fille également sont arrêtés pour espionnage. Son mari est fusillé en 1941. Marina Tsvetaïeva met fin à ses jours le 31 août 1941. Le poète russe Boris Pasternak, avec qui elle entretiendra une correspondance — tout comme Rainer Maria Rilke —, lui confère l’âme d’une femme "indomptable" et "décidée" décrit sa mort de cette façon : "Elle s’est réfugiée dans la mort en fourrant sa tête dans un nœud coulant, comme on la cache sous un oreiller".

 

À ce monde dément, j’oppose mon refus !, poème lu par Laurence Vielle :

Sur une feuille vide et lisse

Les lieux, les noms, tous les indices,

Même les dates disparaissent.

 

Mon âme est née, où donc est-ce ?

Toute maison m’est étrangère,

Pour moi tous les temples sont vides,

Tout m’est égal, me désespère,

Sauf le sorbier d’un sol aride…

 

Ô larmes des obsèques,

Cris d’amour impuissants !

Dans les pleurs sont les Tchèques,

L’Espagne est dans le sang.

Comme elle est noire et grande,

La foule des malheurs !

Il est temps que je rende

Mon billet au Seigneur.

 

Dans ce Bedlam des monstres

Ma vie est inutile ;

À vivre je renonce

Parmi les loups des villes.

Hurlez, requins des plaines !

Je jette mon fardeau,

Refusant que m’entraîne

Ce grand courant des dos…

 

Voir… Non, je ne consens,

Écouter… Pas non plus ;

À ce monde dément

J’oppose mon refus !

 

Marina Tsetaeva / (traduction Véronique Lossky)

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