La publicité sur la RTBF vous fait souvent réagir. Pas seulement pour sa présence ou sa fréquence mais aussi pour des questions de cohérence :
" Quand allez-vous une fois pour toute arrêter le double message sensibilité à l’environnement et publicité pour les banques et les voitures ? ". Cette question de Jean-Noël, Alexis la partage également :
" Ce court message pour vous indiquer l’inconfort régulièrement ressenti lorsqu’une publicité auto suit ou précède des informations sur l’urgence climatique, dans vos émissions, leurs invités, les informations… J’ai le souvenir d’une invitée très impliquée dans son propos sur le climat suivie d’un publicité virile sur un gros SUV électrique ".
L’incohérence dans le message global de la RTBF vous paraît d’autant plus flagrante quand l’actualité nous rappelle l’urgence d’agir pour préserver un équilibre. Pour Didier, " afficher sur la page info en ligne une publicité encourageant la pratique du golf à un moment où les feux ravagent des forêts et des gens meurent de soif, en connaissant la consommation faramineuse en eau de ces golfs pour garantir des pelouses bien vertes et bien grasses ", devient simplement inconcevable.
On vous a déjà partagé dans INSIDE (ici) des infos sur l’étanchéité qui existe entre les choix éditoriaux de la RTBF et les annonces publicitaires gérées par la RMB, sa régie publicitaire.
Cette imperméabilité peut-elle faire place à plus de cohérence ?
" Vous pourriez, dit Didier, choisir vos annonceurs avec plus de soin et de bon sens ".
Et Alexis nous tend la perche : " Quelles sont les possibilités de la RTBF pour mieux choisir les annonces publicitaires pour qu’elles soient plus en phase avec les enjeux actuels environnementaux et sociétaux ? "
Ces possibilités, la RMB a choisi de les créer, en lançant les écrans Blue screen. Il s’agit d’écrans publicitaires réservés aux annonceurs les plus écoresponsables. L’initiative n’en est qu’à ses débuts. Le Blue screen a fait son apparition pour la première fois durant la semaine du 13 au 17 mars, autour des JT de 13h et de 19h30. L’opération est une première en Belgique.
Se préserver du greenwashing
Les écrans Blue screen sont réservés exclusivement à des organisations ou à des produits qui sont les meilleurs en termes d’engagement durable. Pour y avoir droit, l’annonceur doit répondre à plusieurs critères écoresponsables. Des critères décidés par la RMB, qui a mis en place une charte d’éligibilité.
La charte de la RMB intègre plusieurs labels ou certifications existants comme l’étiquette énergétique, les émissions de CO2 ou encore l’énergie 100% renouvelable.
Aujourd’hui en Belgique, il n’existe pas vraiment de réglementation qui permette de déterminer si une organisation ou un produit est durable. Pour établir sa charte, la RMB s’est inspirée de travaux réalisés par l’ADEME. L’organisation française mène depuis 30 ans un travail de recherche qui aide, notamment, à identifier les meilleurs labels et les meilleurs moyens de déterminer les produits et organisations durables.
La RMB a ensuite confronté ses conclusions à l’avis de l’ASBL belge Eco Conso. La charte d’éligibilité mise en place pour le Blue screen repose ainsi sur des critères très stricts qui préservent un maximum du greenwashing.
" De manière assez précise, explique Valérie Janssens directrice du développement à la RMB, on a un ensemble de labels qui sont identifiés par secteur d’activité, puis on a d’autres critères comme par exemple tous les produits qui seraient éligibles aux éco chèques ".
Pour certains secteurs d’activité où il existe des données disponibles, la charte de la RMB essaye d’aller le plus loin possible. Le secteur de l’automobile, par exemple, est aujourd’hui très réglementé en matière d’émissions de CO2 et de poids. La RMB a décidé de tenir compte de ces deux paramètres, complémentaires : " c’est pas tout de ne pas avoir d’émissions de CO2, mais quand on est un gros SUV électrique, le poids de la voiture fait qu’il y a quand même beaucoup d’impact négatif sur l’environnement ", explique Valérie Janssens. " On a essayé de mettre des critères vraiment très restrictifs pour que les audiences et les consommateurs ne se sentent pas induits en erreur ".
Être strict et continuer à attirer les annonceurs
En lançant les écrans Blue screen autour du JT, la RTBF et la RMB ont envoyé un signal fort aux annonceurs. Le JT, c’est l’espace le plus qualitatif, là où l’audience est la plus forte.
Réserver les écrans durables à ces espaces qualitatifs, c’est en réalité envoyer un double message : récompenser les acteurs qui font le plus d’efforts et inviter tous les autres à en faire davantage.
Depuis la semaine du 13 mars, de nombreux annonceurs se sont manifestés auprès de la RMB, pour faire partie de ces nouveaux espaces de publicité. Peu répondent à tous les critères fixés par la charte d’éligibilité mais, l’objectif est d’amorcer un changement, de lancer un nouveau processus.
" Le fait d’avoir fait ce premier pas, c’est vraiment de lancer, on espère, un cercle vertueux qui va encourager tout le monde à se mobiliser pour faire évoluer les choses et vraiment faire transiter la publicité. Parce qu’on pense que la publicité peut aussi avoir un rôle positif en termes de changement de comportements ", explique Valérie Janssens.
Ces comportements, ce sont ceux des annonceurs évidemment mais aussi, ceux des consommateurs, à aller vers des produits plus durables, qu’ils peuvent identifier plus facilement.
La RMB encourage les annonceurs à poursuivre et à mesurer leurs efforts. Elle sait aussi qu’elle doit adapter sa charte aux petits acteurs qui font beaucoup d’efforts mais qui ne disposent pas nécessairement de labels.
Si les annonceurs ne sont pas encore très nombreux à cocher toutes les cases, le Blue screen, en tous cas, a réussi son entrée et va se reproduire avant la fin juin, puis en septembre et ainsi de suite pour – espérons-le – modifier petit à petit le modèle publicitaire. En télé d’abord, mais en radio et sur le web aussi.