Régions Brabant wallon

Le cri d’alarme d’un commerçant de Louvain-la-Neuve : "Si on est cinq, huit ou dix à fermer, l’esprit de la ville ne sera plus pareil"

Le cri d'alarme d'un commerçant de Louvain-la-Neuve

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Louvain-la-Neuve a longtemps été reconnue comme une des meilleures élèves wallonnes en matière de dynamisme commercial. Tous les ingrédients y sont : une ville complètement piétonne, une cohabitation plutôt réussie entre le centre commercial de l’Esplanade et les commerces indépendants de la dalle, de grosses "locomotives" capable d’attirer des chalands qui viennent de toute la province…

Après avoir survécu à la crise covid, le commerce local n’échappe pourtant pas à la crise financière qui pointe son nez, comme dans de nombreuses villes. "Notre chiffre d’affaires est en baisse car le pouvoir d’achat de la clientèle a baissé. Les charges, les loyers, les salaires de notre personnel augmentent. Nos fournisseurs ont aussi augmenté leurs prix", constate Claude Lebrun, gérant de la Maison du Cormoran, un magasin de jouets qui fête aujourd’hui ses trente ans.

Ce commerçant, qui n’a jamais connu pareille situation, tire la sonnette d’alarme, avant qu’il ne soit trop tard. Il s’inquiète pour la survie de son activité, alors que d’autres ont déjà passé le cap : outre la librairie "Le Furet du Nord" dont la fermeture a fait grand bruit, quelques commerces sont à remettre dans les rues du centre-ville et plusieurs cellules commerciales vides accueillent tristement les visiteurs de l’Esplanade.

Le centre-ville de Louvain-la-Neuve a toujours été cité en exemple pour son dynamisme
Le centre-ville de Louvain-la-Neuve a toujours été cité en exemple pour son dynamisme © S. Vandreck

Des aides doivent aussi venir de l’extérieur, et notamment de nos bailleurs

L’équation entre l’augmentation des frais et la baisse des rentrées semble irrésoluble pour de nombreux commerçants. Tous s’inquiètent de ce que leur avenir sera fait. "On a surtout le sentiment de ne pas avoir de prise sur tous ces éléments. On ne sait pas comment sortir notre épingle du jeu et maintenir le bateau à flot", témoigne Ingrid Nassogne, qui a ouvert il y a cinq ans une mercerie qui a bien fonctionné jusqu’ici. Elle a diversifié ses activités, avec un service de retouches, des ateliers, mais cette recherche constante de nouvelles rentrées l’épuise. "Je pense que des aides doivent aussi venir de l’extérieur, et notamment de nos bailleurs. On les a déjà interpellés sur la question. Ils se disent sensibilisés et conscients de nos difficultés, mais on attend un geste de leur part. On a été indexés dernièrement, pourraient-ils par exemple revenir en arrière ?", se demande la commerçante.

Nous avons posé directement la question au bailleur de ces commerçants, l’INESU, bras immobilier de l’UCLouvain, qui gère un patrimoine d’une centaine de surfaces commerciales sur Louvain-la-Neuve et le campus de Woluwé. "La première aide de l’Université est d’avoir, au départ un loyer inférieur aux prix du marché, répond son administrateur délégué, Nicolas Cordier. Un gel total ou partiel de l’indexation pourrait être une mesure mais, à elle seule, elle ne suffira pas du tout". Il rappelle également que les commerçants locataires de l’INESU ont été aidés lors de la crise covid, et que les loyers pratiqués par les promoteurs privés sont nettement plus élevés, classant par la même occasion Louvain-la-Neuve parmi les villes les plus chères de Wallonie.

Des commerces du centre-ville sont à remettre
Des commerces du centre-ville sont à remettre © S. Vandreck

Ne pas redevenir un campus

L’association des commerçants "La Dalle" souhaite interpeller les bailleurs, mais aussi les autorités locales, les associations d’habitants et d’étudiants pour leur faire prendre conscience de la menace qui pèse sur le commerce à Louvain-la-Neuve. "Il nous faut vraiment un soutien pour que la dynamique de la ville soit préservée, réclame son président, Gauthier Darras. On veut éviter de se retrouver dans la situation d’autres villes de Wallonie et même du Brabant wallon où les centres-villes sont dépeuplés de leurs surfaces commerciales. On a peur que cela change rapidement. Souvent les commerçants sont au bout du bout, ils ont puisé longtemps dans leurs réserves et leurs réserves s’épuisent".

La crainte des commerçants est que la perte d’attractivité du centre-ville, n’entraîne ensuite une perte d’attractivité pour la ville en elle-même, que les nouveaux projets immobiliers ne trouvent par exemple pas d’acquéreurs… et que la ville redevienne un campus. "Si on est cinq, huit ou dix à fermer, on perdrait alors l’esprit de cette ville où on voulait mélanger habitants, commerçants et étudiants, remarque Claude Lebrun. On essaie donc de rassembler tout le monde, pour que tout le monde ne tombe pas de haut quand il y aura de grosses difficultés et que Louvain-la-Neuve va changer d’âme". La période des fêtes de fin d’année, généralement très animée d’un point de vue commercial, sera donc cruciale pour ces commerçants.

Claude Lebrun s'inquiète pour l'avenir de son commerce et celui de sa ville
Claude Lebrun s'inquiète pour l'avenir de son commerce et celui de sa ville © S. Vandreck

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