"Ça, c’est un régal ! L’invention, l’élaboration, tout cela ne se fait en moi que comme un rêve magnifique et grandiose, mais quand j’en arrive à super-entendre ainsi la totalité assemblée, c’est le meilleur moment. Comme se fait-il que je ne l’oublie pas comme un rêve ? C’est peut-être le plus grand bienfait dont je doive remercier le Créateur."
L’enfant prodige
Mozart fait très tôt preuve d’un talent inouï. Son père le remarque vite. Il commence à lui apprendre le piano quand Wolfgang a à peu près 3 ans. Sa sœur, en a 7. Mozart s’amuse à rechercher les tierces qui s’accordent. Il dira plus tard :
Je cherche deux notes qui s’aiment.
Dira-t-il plus tard. Quand il fait courir ses doigts sur le clavier, l’enfant ne voit pas le temps passer et quand il trouve, cela le rend si joyeux ! Quand il a 4 ans, il commence à apprendre avec son père, des menuets et des petits morceaux. Wolfgang est si rapide. Il apprend un menuet en une demi-heure. Il fait des progrès tellement sidérants qu’en 5 ou 6 ans il compose déjà des petits morceaux. Il les joue à son père qui les note sur le papier. Mozart s’amuse aussi beaucoup avec les mathématiques. Et on dirait qu’il oublie tout le reste. Quand il apprend à calculer, il écrit des chiffres sur la table, les sièges et il continue même sur les murs et le plancher. Selon Alfred Einstein, c’est comme si Mozart avait pour tout une passion extrême. Parfois il mêle les mathématiques à la musique. Il s’amuse par exemple à réunir des fragments mélodiques de deux mesures. Wolfgang n’a jamais connu l’obligation d’aller à l’école. Si son talent suscite l’admiration, il n’en tire pas d’orgueil et il est d’un naturel très aimable.
L’impétueux au grand cœur
Quand il grandit, son père confie que Wolfgang Amadeus devient parfois très impétueux. Il aime faire des plaisanteries, il aime provoquer aussi. Son père s’inquiète. Un peu trop peut-être ? Il lui dit que c’est le premier pas vers la familiarité, qu’il ne faut pas trop la rechercher en ce monde si on veut continuer à être respecté. Mozart a bon cœur. Il donne toute sa confiance et toute son affection. Il laisse libre cours à sa spontanéité et son naturel. Il avait aussi beaucoup d’humour. Il écrivait des lettres exubérantes à sa sœur et des lettres un peu grivoises à sa cousine Anna Maria Thékla. Mozart lui écrit par exemple " Je serai vraiment en état d’apaiser, tempérer, ou adoucir votre séduisante beauté dont la colère s’exhale à coups de pantoufle, c’est une question à laquelle je veux répondre. Mais je veux y répondre à fond. Adoucir veut dire beaucoup de choses : on porte doucement quelqu’un dans une litière. Je suis par nature très doux et je mange aussi volontiers de la moutarde, particulièrement avec le bouilli. Oui, mon cher petit violoncelle, ainsi va le monde : l’un a la bourse, l’autre l’argent, et celui qui n’a pas les deux, n’a rien. Et rien, c’est la même chose que très peu, et peu ça n’est pas beaucoup, en sorte que rien est toujours moins que peu et peu toujours plus que pas beaucoup… Votre très humble et très obéissant serviteur. Ma sœur vous envoie mille baisers cousinesques, et le cousin vous donne ce qu’il n’eut pas le droit de vous donner. Adieu, ange ! Mozart s’était aussi amusé à composer des canons sur des textes tout à fait incongrus !
Le voyageur farceur
Mozart aimait les voyages. Il faut dire qu’il y est habitué. Son père l’emmenait déjà à la cour du Prince électeur de Munich alors qu’il n’avait pas 6 ans. Au cours d’un voyage en Italie, l’année de ses 13 ans, ils séjournent notamment à Rome. Ils sont accueillis très chaleureusement par le cardinal Pallavicini. Quand il rencontre Wolfgang, il lui demande "Etes-vous l’enfant célèbre à propos duquel on m’a tant écrit ?", Mozart est d’humeur joyeuse. Il écrit à sa sœur : J’ai eu l’honneur de baiser le pied de Saint-Pierre à Saint-Pierre, mais comme il a malheur d’être tout petit, on m’a, moi, votre vieux farceur, Wolfgang Mozart, soulevé jusqu’à lui. " Et Léopold raconte le célèbre exploit de son fils. Un jour, au retour d’un office à la Chapelle Sixtine à Rome, où il venait d’entendre le Miserere d’Allegri, il le transcrit de mémoire. Nissen précise que Wolfgang s’est repris à deux fois pour écrire cette partition et que la deuxième fois il aurait caché ses notes dans son chapeau pour pouvoir aller vérifier sur place.
Un talent désintéressé
Mozart était humble. Même quand il atteignait un succès éclatant, il ne devenait pas du tout prétentieux. Niemtschek dit de Wolfgang qu’il était l’homme le plus aimable du monde et, quand il voyait qu’on comprenait son art, il jouait pendant des heures même pour un inconnu. Il écoutait aussi les essais des jeunes artistes avec attention, il les encourageait. Il les aidait à trouver leur voie. Niemtschek confie que Mozart était, je cite, un ami des hommes, et désintéressé au plus haut degré. Il vivait tout entier dans le royaume des sons, il attachait peu de valeur à l’argent et aux autres biens. Il travaillait souvent pour rien, par plaisir ou pour faire le bien. C’est comme cela qu’ont été composés bien des concertos pour divers instruments, et une foule d’œuvre pour le chant. On dit Mozart était chaleureux avec ses élèves. Il est infiniment sensible au talent. Il leur vient aussi en aide quand il le peut et il a par exemple beaucoup soutenu son élève Mlle Aurnhammer, notamment en lui trouvant une situation après la mort du père de la jeune fille.
La grande amitié de Mozart et Haydn
La légende veut que Mozart ait rendu un fier service à Michael Haydn. Haydn devait composer six duos pour violon et alto pour le prince archevêque. Mais il était tombé malade et il n’était pas en mesure de terminer la commande à temps. Sans rien lui dire, Mozart s’est mis au travail. Quelques jours plus tard, il a rendu visite à son ami Haydn, en lui apportant les duos qui manquaient. En 1786, Mozart prend en pension chez lui un tout jeune garçon, Johann Nepomuk Hummel. Il est âgé de 8 ans, Mozart lui enseigne le piano. Il l’entoure d’affection. Mozart connaît le drame des enfants prodiges. S’il encourage Hummel, c’est qu’il lui reconnaît du talent. Voici le dernier mouvement du Concerto en mi majeur pour trompette et orchestre de Hummel.
Haydn et Mozart : un maître dont le disciple serait le maître, et chacun à son tour.
Ecrit Jacques Drillon. Mozart éprouvait une grande amitié pour Joseph Haydn. Il disait que c’est de lui qu’il avait appris comment il faut écrire des quatuors. Haydn admirait aussi beaucoup sa musique. Et Mozart prenait la défense de son ami quand c’était nécessaire. On raconte qu’un jour, il écoutait une œuvre de Haydn auprès de Léopold Kozeluch, qui s’est mis à la critiquer en prétendant qu’il n’aurait pas fait ça comme ça. Mozart aurait répondu : " Quand bien même on nous fondrait tous les deux ensemble, il faudra encore du temps pour qu’il en sortit un Haydn. Personne ne peut tout faire – badiner et toucher, faire rire et émouvoir, et tout cela aussi bien que Joseph Haydn. "
Une concentration prodigieuse
Mozart, quand il créait, avait une capacité de concentration prodigieuse. Sa belle-sœur Sophie Haibel était frappée par sa constante concentration d’esprit. Elle dit qu’il était "toujours de bonne humeur, mais aussi très absorbé. Qu’il regardait dans les yeux d’un regard perçant, qu’il répondait à tout, avec à-propos, bien qu’il paraissait absorbé par tout autre chose dans son travail. Elle ajoute que même en se lavant les mains, le matin, il allait et venait dans sa chambre, il ne restait jamais tranquille, et il était toujours en train de réfléchir."
Rochlitz confie que Mozart achevait dans sa tête des morceaux tout entiers, qu’il les portait en lui jusqu’au moment où il avait l’occasion de les écrire ou la volonté de s’en débarrasser d’un coup. Et pendant qu’il était occupé à coucher l’œuvre sur le papier, on pouvait parler autour de lui. Il participait la conversation, il aimait faire de l’humour. Mozart était aussi capable de composer dans des circonstances tout à fait exceptionnelles. Selon la légende, le quatuor K 421 a été conçu en 1783, pendant la nuit où Constance mettait au monde leur premier fils.
Programmation musicale :
Wolfgang Amadeus MOZART – Le deuxième mouvement du Concerto pour piano n° 23 en la majeur K 488. Alfred Brendel & l’Academy of St Martin-in-the-fields sous la direction de Neville Marriner. Philips 4204872.
Wolfgang Amadeus MOZART – Le premier mouvement de la Sonate K 279 en fa majeur. Maria Joao Pires. DG 4775200.
Wolfgang Amadeus MOZART – Une plaisanterie musicale K 522 en fa majeur pour orchestre de chambre. Orpheus Chamber Orchestra. DG 4297832.
Gregorio ALLEGRI – Miserere mei, Deus. Chœur du King’s College de Cambridge sous la direction de Stephen Cleobury) Gerald Finley (Cantor) . EMI 7470652.
Wolfgang Amadeus MOZART – Les deux derniers mouvements de la Sonate pour deux pianos K 448. Murray Perahia et Radu Lupu. LMK 39511.
Wolfgang Amadeus MOZART – Adagio et Allegro, le premier mouvement de la Symphonie en ré K. 504 dite Prague. . Orchestra Mozart sous la direction de Claudio Abbado. Archiv Produktion 4777598.
Wolfgang Amadeus MOZART – Non piu andrai, et l’ho perduta, extraits des Noces de Figaro. Lorenzo Regazzo, Nuria Real et Concerto Köln dir° René Jacobs. Harmonia Mundi HMX 2961818.
Wolfgang Amadeus MOZART – 12 Variations sur l’air Ah vous dirais-je Maman. Andras Schiff. DECCA 4213692.
Johann Nepomuk HUMMEL – Winton Marsalis & English Chamber Orchestra dir° Raymond Leppard. Sony 57497.
Joseph HAYDN – Le deuxième mouvement de la Sonate en mi bémol majeur pour piano Hob XVI : 49 Nr 59. Leif Ove Andsnes. EMI 5567562.
Wolfgang Amadeus MOZART – Le premier mouvement du Quatuor en ré mineur K 421. Quatuor Arcanto. HM 902168.
Production et présentation : Axelle THIRY
Réalisation : Loïc Nicolaj