Le grand serpent de mer : imaginaire ou créature des fonds marins ?

Le grand serpent de mer : imaginaire ou créature des fonds marins ?

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Par Franck Istasse

    Du monstre du Loch Ness au yéti: sur la piste des créatures mystérieuses

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    Le matin du 7 décembre 2014, Sylvie Beauregard, une habitante de Cabel Bay, en Colombie Britannique au Canada, promène ses chiens le long d’un sentier qui borde la mer. Elle fait cette promenade matinale quasiment chaque jour, mais ce matin-là, elle remarque que tout est étrangement silencieux. Elle est sur le point de faire une rencontre qu’elle n’oubliera pas de sitôt.

    " Il y avait une atmosphère particulière ce matin-là. Tout d’un coup, j’ai regardé vers la mer et j’ai vu au loin une chose étrange : une sorte de serpent de mer, sur l’eau… On voyait ses anneaux et ses courbes. J’ai d’abord cru qu’il s’agissait d’un troupeau de phoques, mais ensuite, j’ai vu une tête et un cou qui sortait de l’eau, à un mètre au-dessus de la surface.

    Et son corps faisait bouillonner l’eau à côté. Ça m’a rendue curieuse, alors je me suis approchée. Je devais être à 300 mètres de cette chose, qui est restée là… Mes chiens la regardaient aussi sans faire de bruit. Je l’ai observée longtemps mais malheureusement je n’avais pas d’appareil photo avec moi. Aujourd’hui, je ne sais toujours pas ce que j’ai, je reste sceptique mais… Je dois admettre que l’animal que j’ai vu est spécial… "

     

    Des témoignages comme celui de madame Beauregard, il y en a beaucoup  en Colombie Britannique. Les passionnés de cryptozoologie (la discipline qui étudie les animaux cachés encore inconnus de la science) diraient qu’à coup sûr, Sylvie Beauregard a eu la chance d’observer le serpent de mer local appelé " Cadborosaurus " et affectueusement surnommé " Caddy "

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    © Credit: FLHC 95 / Alamy Stock Photo

    La description de Caddy a de quoi surprendre : un long cou, une tête de cheval ou de chameau, des grands yeux qui font penser à ceux d’une vache et une crinière de poils… De quoi pourrait-il s’agir ? Chimère ou animal réel mystérieux ? Il y a trop de témoignages crédibles, depuis trop longtemps, pour ranger Caddy dans la catégorie des mythes et légendes. C’est en tout cas l’avis de Paul Leblond, un chercheur canadien qui a traqué ce serpent de mer pendant 50 ans.

     

    " Il y a beaucoup de zoologues qui se sont penchés sur la question. Qu’est-ce que c’est ? Apparemment ce n’est pas un poisson, parce qu’on le voit à la surface, on le voit respirer, on l’a entendu faire des bruits. C’est peut-être un mammifère ou alors un reptile… Les experts penchent pour l’un ou l'autre selon certaines caractéristiques décrites de cet animal.

    Les gens qui ont vu par exemple une crinière se disent que c’est sans doute un mammifère marin, une sorte de phoque géant encore inconnu. D’autres disent que c’est un animal qui semble long, allongé comme un reptile… En fait, on ne sait pas de quelle sorte de bête il s’agit. Et pourquoi le voit-on si rarement ? Est-ce qu’il y en a beaucoup ?

    Ce n’est sûrement pas toujours le même animal qui est observé depuis des siècles… D’ailleurs, il a plusieurs fois été observé en groupe. On cherche, on attend que quelqu’un capture un spécimen. C’est un mystère marin, c’est pour ça que c’est si intéressant au fond. En tout cas, il y a assez de preuves pour moi, pour croire qu’il existe là un animal inconnu. "

     

    S’il y a beaucoup de témoignages crédibles concernant Caddy le serpent de mer canadien, il faut néanmoins souligner qu’il n’existe aucune preuve concrète de son existence. Jamais par exemple, on n’a retrouvé une carcasse de Cadborosaurus échouée sur une plage de Colombie britannique.

    Enfin, ce n’est pas tout à fait exact : en 1937, à Naden Harbour, des marins ont découvert dans l’estomac d’un cachalot, une étrange créature allongée. Sur une photo prise à l’époque, on peut distinguer une tête bizarre et mammalienne. Mais hélas, il semble que personne n’ait jugé bon de conserver cette carcasse étonnante pour l’étudier. C’était peut-être LA preuve de l’existence du serpent de mer.

     

    On observe le grand serpent de mer depuis très longtemps, sur toutes les océans du globe, pas seulement au Canada. Les vikings parlaient déjà d’un serpent gigantesque qui hantaient les mers du monde entier. Les marins l’appellent depuis toujours " serpent de mer " car invariablement, cet animal réel ou mythologique, possède un long cou qu’il peut sortir de l’eau, et il avance en faisant des anneaux à la surface de l’eau avec son corps.

    Cependant, Nelson Cazeils, auteur du livre " Les monstres marins ", explique que les témoignages anciens concernant le serpent de mer, peuvent provenir de confusions, dues à une méconnaissance zoologique.

     

    " Les marins ou les terriens voyaient des animaux de loin. Mais ils ne savaient pas trop ce que c’était… Ils pouvaient voir des baleines hors de l’eau, ou des requins, des tortues luth et ils s’imaginaient qu’il s’agissait de monstres fabuleux. D’ailleurs, ils avaient très peur de ces animaux. On voit sur les cartes marines jusqu’en 1650, figurer des monstres marins.

    Et pendant le moyen-âge, on n’osait pas s’aventurer sur l’océan atlantique, parce qu’on disait que cet océan était peuplé de monstres effroyables qui dévoraient les marins ou qui faisaient couler les bateaux. On y a cru jusqu’au 17ème siècle. Ce n’est qu’à partir du 19ème siècle qu’on a commencé à mieux connaître les grands cétacés. "

    © Credit: Quagga Media / Alamy Stock Photo

    Et justement, c’est précisément à partir du 19ème siècle que les témoignages concernant le grand serpent de mer ne semblent plus être des méprises avec des animaux connus. Les capitaines de bateaux, notamment de la toute puissante marine britannique, reviennent souvent de leur périple en mer avec des observations qui défient l’imagination. Un cas célèbre ? En 1848, l’équipage du navire " Le Daedalus " rapporte sa rencontre avec un gigantesque serpent de mer dans l’Atlantique sud, entre le cap de Bonne-Espérance et l’île de Sainte-Hélène.

     

    " Pendant le quart de 4 à 6, à 5 heures environ, nous avons observé sous le vent un poisson des plus extraordinaires, qui a croisé notre arrière dans la direction sud-ouest. Sa tête, qui avec sa nageoire dorsale, était la seule portion visible de l’animal paraissait plus longue, plus pointue et aplatie sur le sommet. La nageoire se trouvait peut-être à 6 mètres en arrière de la tête et n’était visible que par moments. Le capitaine prétendit qu’il avait aussi vu la queue ou une autre nageoire. Le dessus de la tête et des épaules semblait d’une couleur brun foncé et le dessous de la mâchoire inférieure d’un blanc brunâtre. "

     

    © Credit: Antiqua Print Gallery / Alamy Stock Photo

    Difficile de rejeter en bloc le témoignage de cet équipages expérimenté qui a arpenté toutes les mers du globe. Alors ? Qu’ont bien pu voir les marins du HMS Daedalus ? Quel animal pourrait bien correspondre à cette description ? Des témoignages comme celui-là, on en trouve à foison depuis le 19ème siècle. Autre élément étonnant : cette étrange créature terrorise souvent ceux qui croisent sa route, quand elle daigne venir faire un petit tour près d’un bateau. C’est ce qui est arrivé à deux marins expérimentés qui naviguaient au nord de l’île de Vancouver en 1922.

     

    " Quand la créature s’approcha, nous pûmes voir que c’était sa tête et son cou qui dépassaient de l’eau. Nous avons été saisis de terreur, et nous avons poussé un soupir de soulagement, quand elle poursuivit sa route. Ses yeux étaient semblables à ceux d’une vache, mais apparemment recouverts d’une membrane. Sa couleur était brune et avait un aspect écailleux, on ne pouvait distinguer ni bouche, ni narines. On estima sa longueur à 7 mètres 50 : son cou dépassait de l’eau d’un peu plus de deux mètres. Cette bête se déplaçait à 10 ou 11 kilomètres à l’heure, en balançant la tête d’avant en arrière, comme les serpents ! "

     

    Les spécialistes de la mer affirment qu’aujourd’hui nous connaissons mieux la surface de la planète Mars que nos fonds marins, dont une grande partie n’a pas encore été explorée. Alors, pourquoi ne pas garder l’esprit ouvert et envisager l’existence d’un grand animal marin encore inconnu qui remonte à la surface de temps en temps pour titiller notre imagination ? 

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