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Le jumelage, une relation de l’après-guerre qui s’oublie mais survit

© Belga Image

À Gembloux, on organise régulièrement des repas pour entretenir les liens unissant la Cité des Couteliers à la cité vosgienne d’Épinal. Depuis 1974, les deux villes sont jumelées et malgré les années, des citoyens continuent d’être impliqués dans cette amitié de longue durée.

Ces repas sont alors l’occasion de remplir les caisses communes finançant des projets en lien avec la ville française, comme l’explique Véronique Lesne, bénévole au Comité de jumelage. " Avec les bénéfices, on emmène une fois par an des enfants de 5e primaire, un groupe de 40, à la Saint-Nicolas d’Épinal et ça nous permet aussi de recevoir des représentants de la ville d’Epinal. La dernière fois, c’était un échange avec l’école d’Horticulture ", précise-t-elle au micro de Canal Zoom.

Ce passage à la Saint-Nicolas permet aussi de faire découvrir le folklore de chez nous puisque les fameux géants de Gembloux font également partie du voyage.

>> Le reportage complet de Canal Zoom

Un repas vosgien pour contribuer à l’amitié Gembloux-Épinal

Mais d’où viennent ces jumelages ?

Dater ces relations de jumelage entre villes et villages n’est pas chose aisée. Au 9e siècle déjà, la ville française du Mans entretenait un " jumelage religieux " et officieux avec les Allemands de Paderborn afin de permettre un échange de reliques (un jumelage officiel sera conclu entre les deux villes en 1967).

Mais c’est vraiment après la Seconde Guerre mondiale que plusieurs villes européennes décident de s’associer afin d’entretenir des relations amicales et d’éviter de nouveaux conflits en Europe. Ce lien au niveau le plus élémentaire, celui des communes, est alors vu comme un moyen de progresser sur le plan des relations internationales et d’apaiser les rancœurs en échangeant des connaissances, des expériences, du savoir-faire dans tous les domaines de la vie locale.

C’est dans ce contexte que Tournai fut la première à développer ce " jumelage européen " en s’associant avec la ville de Troyes en 1951. Et ce rapprochement n’est pas un hasard : les deux cités constituant des centres textiles, les usines de bonneterie de Tournai ont pu profiter de la méthode de travail expérimentée et développée à Troyes pour rendre le travail des ouvrières moins fatigant et plus rémunérateur.

Avec les années, ces jumelages se sont multipliés, au point de dépasser les frontières européennes. Près de 70 ans plus tard, rares sont les villes belges ne partageant pas ce type de relations aux quatre coins du globe. Mais finalement, ces jumelages sont-ils encore vraiment d’actualité ?

Un lien parfois victime de l’actualité

Avec les années, certains jumelages se perdent et n’en gardent que le nom. Dans de nombreux cas, ce sont des comités mis en place par les habitants qui vont permettre de garantir ce lien au fil du temps. Le temps fait parfois son œuvre et certaines communes oublient ces vieux jumelages datant d’une autre époque.

Mais l’actualité peut aussi mettre à mal ces relations : la crise du Covid et la succession des confinements ont stoppé net le dynamisme de certains organismes qui n’ont pas toujours eu le cœur de relancer la machine par la suite.

Dans d’autres cas, c’est l’actualité internationale qui s’en est mêlée. Avant 2014, Charleroi et Donetsk partageaient des liens très étroits, étant donné leur passé industriel, qui ont mené à leur jumelage en 1983. Mais il y a 8 ans, Donetsk s’est autoproclamé République populaire et a déclaré son indépendance dans la foulée de l’invasion de la Crimée par les troupes russes. Depuis, il n’y a plus eu de contacts avec Charleroi.

Avant 2014, la ville de Charleroi accueillait chaque année des étudiants de Donetsk durant 6 semaines afin qu’ils améliorent leur français et qu’ils découvrent notre culture, comme le rappelle Télésambre.

En mars 2022, à la suite de l’invasion russe en Ukraine, Liège a de son côté suspendu son jumelage avec Volgograd. Situation similaire à Bruxelles avec Moscou.

Mais certains persistent

© Télésambre

Du côté de Chapelle-lez-Herlaimont, on fête la saucisse depuis 15 ans et ce chaque année, à la toute fin du mois de mai. À l’époque, Chapelle venait de se jumeler avec la ville sicilienne de Calascibetta, chez qui la " Fête de la Salsiccia " est une institution.

" C’est une fête qui existe à Calascibetta depuis presque 500 ans ", explique Anthony Lapaglia, l’un des présidents du comité de jumelage, à Télésambre" Dans le sud de l’Italie, on n’abattait plus de porc à partir du mois d’avril et on fêtait le renouveau du porc en septembre. D’où cette fête pour célébrer le renouveau du porc et dans le cadre du jumelage, on a transposé cette fête sicilienne à Chapelle. "

Après trois ans d’absence dus au Covid, l’événement a attiré près d’une dizaine de milliers de personnes sur tout le week-end lors de son édition 2022. Pour le retour de cette grande fête, le maire de la ville italienne avait même fait le déplacement.

Rebecq et Monghidoro, deux autres villes, une autre relation. Cet été, une délégation italienne s’est rendue à Rebecq pour le 20e anniversaire du jumelage officiel. Mais les relations entre les deux villages remontent à 1929. À l’époque, des Italiens décident de fuir le régime fasciste et plusieurs d’entre eux trouvent refuge à Rebecq et dans les environs.

Mais c’est surtout à partir de 1946 que l’histoire amicale entre ces deux villages débute véritablement, alors que les premiers ouvriers italiens quittent Monghidoro pour venir travailler à la carrière de Quenast, la plus grande carrière à ciel ouvert d’Europe. En dépit d’une vie très difficile, malgré l’accueil glacial de certains Wallons de l’époque, les échanges entre les deux entités vont se multiplier au fil des ans. Au point qu’il y a 20 ans, les autorités locales décident d’officialiser un véritable jumelage.

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